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CHIARD [ʃjɔʀ]
n. m.

Rem.

1. Parfois prononcé [ʃjɑʀ] par souci de correction. 2. Variante graphique chiar

I

Vieilliou région.Syn. de hachis.

Un bon chiard. Manger du chiard réchauffé.

Chiard de goélette, de bateau : mets destiné aux pêcheurs, aux marins, contenant du lard salé et des pommes de terre.

 Péjor.Mets peu appétissant; mauvaise nourriture.

Rem.Fait référence, à l’origine, à un mets bon marché qui revenait souvent au menu dans les collèges (voir notam. Clapin).

 bouette2gibelotte (sens I.2); poutine (sens I.3).

[...] qu’elle me fasse des petits patés car je garde ma faim en attendant que vous veniez[;] je commence un peu à prendre goût au chiarre [sic] et au café ainsi que le pain sec. 1861, Québec, BAnQQ, AP-G 139, 15 octobre (lettre d’un séminariste).

Une vie c’est un peu comme les chiards que Sophie [...] nous faisait, ou ben encore comme ses bagatelles : a faisait ça avec des restes qui, si vous les aviez mangés séparément, vous auraient donné mal au cœur, mais une fois mêlés, tripotés, vous faisaient un délice. 1952, A. Brie, Le père Tobie, 9 septembre, p. 5 (radio).

Sur ce chapitre [celui de la nourriture] les commentaires étaient courts. Le menu d’une seule journée suffisait, tellement les jours se ressemblaient. [...] Le midi et le soir, une sauce blanche à consistance de colle dans laquelle baignaient des pommes de terre; beaucoup de plats difficiles à identifier que nous classions sous le terme général de « chiard »; très peu de viande rôtie, du pain à volonté. 1975, A. Tessier, Souvenirs en vrac, p. 51.

Je sais notamment qu’une des bases de la cuisine de l’île aux Grues est le « chiard » de goélette. On fait revenir de l’oignon dans du beurre ou autre chose, on y ajoute des pommes de terre en dés, un bol de cretons et du bouillon, ou de l’eau, et on laisse mijoter le temps d’une demi-marée. Pour la subsistance, c’est parfait, et pour le goût, c’est pas mauvais. Surtout si ça ne revient pas trop souvent. 1991, J. O’Neil, L’île aux Grues, p. 59.

(Dans un blason populaire).  Les Chiards-Blancs.

Les Chiards Blancs sont les habitants de L’Islet, qui se nourrissaient surtout de hachis au lard salé et aux patates; ce chiard est aussi appelé chiard de goèlette [sic]. 1944, M. Rioux, « Le blason populaire canadien », dans Le Canada français, vol. 32, p. 263.

II

Fig., fam.

1

Grande réunion de personnes; grande fête très animée.

La popularité de Dynamite-Nelson-Henri alias Honoré Mercier consistait à distribuer gratuitement de nombreuses cartes d’admission à son chiard dans toutes les tavernes de son comté. 1932, Le Goglu, Montréal, 25 novembre, p. 4.

Bienvenue à l’homme qui nous comprend si bien. Dieu bénisse sa campagne électorale! [/] De la main droite, les doigts en V, Peter GaDGet saluait à la ronde, heureux de voir autant de monde. [...] Le chiard s’annonçait bien. 1973, J. Côté, On va les avoir les Anglais!, p. 139.

Le lendemain soir je suis allé manger chez un de mes chums qui était revenu en même temps que moi puis qui m’avait invité chez eux pour un grand chiard de famille. 1980, Gr. Gélinas, Les fridolinades 1945 et 1946, p. 253.

T’en fais pas, mon Pierrot, dans l’armée tous mes plans ont réussi, on va très bien s’arranger tous les deux. Prépare la voiture, nous partons à Ottawa pour un chiard des anciens combattants... 1982, J.-P. Filion, À mes ordres, mon colonel!, p. 134.

2

Situation confuse, compliquée; querelle.

C’est tout un chiard, un moyen chiard, un beau chiard, un vrai chiard!

 loc. Faire (tout) un chiard (de qqch.) : donner trop d’importance (à qqch.), en faire tout un plat, toute une histoire.

Fernand : Une gribouille entre qui? [...] Lucie : gabrielle et un paquet de filles! – La mère : Ses compagnes de bureau, je suppose? [...] I’m’semblait qu’un beau jour ç’arriverait! Jalouses comme elles sont! Fernand : Qui c’est qui a commencé l’chiard? 1969, G. Dufresne, Le cri de l’engoulevent, p. 35.

L’Actualité : Et le grand chiard olympique [des Jeux de 1976 à Montréal], faudrait-il s’attendre à une enquête? R. Lévesque : D’abord, on est pris avec. L’éléphant blanc du siècle. [...] Mais il va falloir étudier le délire d’attribution de contrats qu’il y a eu en 1971 et 1973. 1976, L’Actualité, septembre, p. 8 et 10.

Le 14 novembre, je revenais à la charge pour écrire : « si les 10,000 détenteurs de billets de saison [...] manifestaient bruyamment quand ils entendront de l’anglais au Colisée, l’exécutif de l’équipe révisera sa position très rapidement. » Cette phrase ne devait pas être prisée par tout le monde. D’abord le Toronto Globe and Mail de samedi devait en faire tout un « chiard » et ensuite, certains de mes lecteurs m’en ont parlé. 1979, Le Soleil, Québec, 20 novembre, p. A11.

[...] lorsque des personnes chassent en groupe de deux, trois, ou quatre, c’est le chasseur ayant abattu l’animal qui doit lui-même veiller à « l’enregistrement » de son gibier, en ayant soin d’emporter avec lui l’animal abattu au complet! Vous voyez déjà le « chiard »... 1989, Le Soleil, Québec, 9 septembre, p. S11.

Histoire

De chier.

IDepuis 1855 (DictBarb, qui le relève sous une variante chia).

II1Depuis 1932. 2Depuis 1957 (Bélisle1). Cp., en français de France, bouillabaisse et marmelade qui ont pris des valeurs semblables (v. TLF).

Version du DHFQ 1998
Pour poursuivre votre exploration du mot chiard, consultez notre rubrique La langue par la bande et visionnez notre capsule vidéo Dis-moi pas!?.
Trésor de la langue française au Québec. (1998). Chiard. Dictionnaire historique du français québécois (2e éd. rev. et augm.; R. Vézina et C. Poirier, dir.). Université Laval. Consulté le 6 décembre 2023.
https://www.dhfq.org/article/chiard