DÉSENFARGER [dezɑ̃faʀʒe]
v. tr. et pron.
v. tr. Rural Libérer (un animal) de son enfarge (sens 1).
Rem.Relevé surtout dans des lexiques (Dunn, Clapin, Rinftret, Blanch1, GPFC et DulCanad2). Signalé également en Acadie (voir Poirier).
Il arrivait pourtant qu’une vache soit si nerveuse [au moment de la traite] qu’en tentant de ruer elle se fasse tomber. Il fallait alors la désenfarger et recommencer l’opération. 1977, Saint-Bruno (Lac-Saint-Jean-Est), Cueillette et transport du lait de la ferme à la fromagerie (ms.), AFEUL, B. Bergeron, p. 20.
Par ext., VieuxDépêtrer, dégager quelqu’un ou quelque chose. (Clapin).
Fig.
Quoi qu’il en soit, l’utilité d’un Conservatoire de déclamation ne devrait faire de doute pour personne dans un pays où la langue française a besoin d’être sciemment enseignée. Il suffirait déjà qu’on apprit à tous les élèves à prononcer le simple mot : Montréal, pour donner à ce Conservatoire une utilité réelle. […]. À ceux que ces propos pourraient surprendre ou choquer, je conseille d’observer un peu dans la rue, dans les tramways, dans le monde, et d’écouter pendant quelques jours tout ce qui passe par la radio où le meilleur et le pire s’affrontent ingénument. On admettra peut-être, ainsi que me le disait récemment un ami de New-York, que nous avons souvent la langue « enfargée ». Eh bien! qu’on nous la « désenfarge » un peu! 1934, L.‑P. Morin, Le Canada, Montréal, 24 novembre, p. 6.
v. pron. Vieux Se dégager les pieds d’un embarras quelconque. (Clapin; voir aussi GPFC).
(Hapax). Partir d’un endroit où l’on s’était immobilisé.
– Y’a un bardeau qui te manque à quelque part! dit Junior. Et pas juste un petit, esti! [/] Il se désenfarge du seuil de la porte et, par grandes enjambées, marche vers ce bosquet derrière lequel a disparu Judith […]. 2009, V.‑L. Beaulieu, L’héritage, p. 774.
Histoire
1Depuis 1880 (Dunn). Héritage de France; a été relevé dans le Maine, le Berry, l’Aunis et en Saintonge (v. FEW ferrea 3, 469b). Figure comme adjectif dans l’œuvre de George Sand à titre de mot du Berry, notamment dans Claudie (1851) : C’est un coureux de femme, une tête à l’évent, un poulain désenfargé (p. 6). Cet emploi se rencontre dans plusieurs paroisses de la Louisiane (« to unfetter a horse », v. DLF, s.v. désenferger), ce qui confirme l’origine provinciale française de ce verbe. Au sens de « dépêtrer, dégager quelqu’un ou quelque chose », depuis 1894. 2Depuis 1894. N’a pas été retrouvé en France.