DIACHYLON [diaʃilɔ̃]
n. m.
Variantes graphiques : diachilon, diachillon, dyachilon, dyachillon.
Ruban adhésif de plastique (autref. de coton) utilisé pour fixer un pansement, un tampon de gaze.
Une roulette, un rouleau de diachylon.
Par ext. Petit pansement adhésif.
2022, TLFQ, Diachylon [photo].Une boîte de diachylons. Diachylons imperméables, adhésifs. Mettre un diachylon sur une coupure.
Rem.1. Usité surtout dans la langue soignée, pour éviter plaster et band‑aid, lesquels relèvent du registre familier. 2. En France, diachylon (prononcé de nos jours [djakilɔ̃], voir Histoire) désigne l’emplâtre et, par extension, une toile, un support enduit d’emplâtre.
bandage2; band‑aid (sens 1); plaster (sens 1).
Que faut‑il faire lorsqu’on se coupe? [titre] Lorsqu’un accident de cette nature se produit, on doit soigneusement réunir les abords de la plaie et les maintenir au moyen de colle de poisson, de plâtre ou de diachylon, ou si la coupure est aux doigts, au moyen d’un simple morceau de linge qui se trouve dans les meilleures conditions s’il est trempé de sang. 1893, L’Électeur, Québec, 11 avril, p. [2].
Une salle d’hôpital; à droite et à gauche, deux rangées de lits de fer; une garde, aux souliers caoutchoutés, glisse, à pas menus et sans bruit, sur le parquet luisant qu’ont terni de place en place les acides. Un infirmier, insouciant, l’air ennuyé, pousse une table roulante chargée de seringues, de tampons et d’antiseptiques. Chuchotements, soupirs, bruit de diachylon que l’on déchire. 1912, L’Étudiant, Montréal, 21 mars, p. 131.
Articles de maison […] Bandages Diachylon, 2 pour $ .25. 1919, Le Soleil, Québec, 28 novembre, p. 11 (annonce).
L’athlète, tout sanglant, se retira dans son coin où l’abbé Charton l’attendait. [...] Puis ce ne fut qu’un cri de terreur parmi l’assistance. Le sympathique vainqueur, qui refusait les diachylons du bon abbé, (le sang était le plus bel atout du spectacle) se retourna à temps pour repousser l’attaque sauvage de l’adversaire conspué. 1944, R. Lemelin, Au pied de la Pente Douce, p. 216.
Ruby commença à boiter. Nous avons découvert, ses bas enlevés, qu’elle avait à chaque talon une énorme ampoule sur le point de crever. Heureusement que j’avais pensé à me munir de diachylon. Je lui fis des pansements adhésifs, lui trouvai à boire de l’eau fraîche et même un bâton de route. 1984, G. Roy, La détresse et l’enchantement, p. 469.
J’ai vu un cordonnier à Kamouraska [atteint de myopathie oculaire] qui recourait à une technique moins savante : collé au sourcil, un diachylon gardait chaque paupière constamment ouverte, ce qui rendait son regard toujours fixe. 1987, M. Trudel, Mémoires d’un autre siècle, p. 12.
J’ai une ampoule [sur un doigt] depuis un certain temps déjà et je portais un diachylon très petit pour que personne ne le voie. 1988, Le Nouvelliste, Trois-Rivières, 7 mai, p. 28.
Si Barbiche s’était mêlé de ses affaires, aussi, il n’en serait pas là, avec un diachylon sur la joue qu’il s’est coupée par nervosité en se rasant. 1993, Fr. Ouellette, Le Grand Blanc, p. 235.
L’œil rougi, votre enfant fait une entrée remarquée en poussant de grands cris. Ses pleurs sont dus à une minuscule écorchure sur l’un de ses genoux. Avec un peu d’eau, un antiseptique, quelques bisous et surtout un diachylon à l’effigie de Mickey, vous arriverez à faire sourire votre enfant. 2000, La Presse, Montréal, 17 septembre, p. A13.
Par métaph. Palliatif, solution temporaire et insatisfaisante, moyen peu efficace utilisé pour remédier à un problème complexe.
(Mettre) un diachylon (sur un bobo, sur une jambe de bois) : remédier à un problème de façon insatisfaisante, temporaire.
(En apposition). Solution diachylon.
band‑aid (sens 2); plaster (sens 2).
Le problème cypriote semble insoluble. […] Il ne s’agit pas tellement d’éteindre le feu mais plutôt de faire en sorte que le danger d’incendie n’existe plus. Messieurs Pearson, Vance, Bennet, U Thant parviendront-ils à briser l’impasse? On peut en douter, à moins qu’on ose enfin appliquer, non pas un simple diachylon, mais un remède radical. 1967, La Presse, Montréal, 28 novembre, p. 5.
C’est donc dire que les menaces de crise demeurent, et qu’on va tenter d’imprimer un élan nouveau à l’économie. […] On pourrait penser qu’il n’y a pas assez eu de réduction d’impôts et que la taxe sur les gains de capitaux arrive à un mauvais moment. Mais le gouvernement a posé des diachylons ici et là, autrement il pouvait risquer d’empirer la crise. 1971, Le Soleil du Saguenay–Lac-Saint-Jean, Chicoutimi, 22 juin, p. [4].
Chaque ministre de l’Éducation, depuis une décennie, a posé son diagnostic et dicté des prescriptions qui, lorsqu’elles ont échappé au feu des affrontements périodiques entre l’État et les regroupements de ses employés du secteur de l’éducation, ont eu l’effet d’un diachilon sur une jambe de bois. 1985, Le Quotidien, Chicoutimi, 23 août, p. 8.
Le maire d’Aylmer […] soutient que la nouvelle étude montre avec évidence que la construction d’une troisième voie est la solution au problème de circulation. « Comme on ne peut pas construire un nouveau pont, c’est la solution diachylon qu’il nous faut » […]. 1996, Le Droit, Ottawa-Hull, 31 août, p. 8.
L’arrondissement de Verdun a procédé à 2900 réparations mineures de la chaussée, incluant le remplissage de nids-de-poule, sur le territoire de l’Île-des-Sœurs […]. « Il y a de l’amélioration sur l’Île-des-Sœurs, mais le colmatage est à refaire comme partout ailleurs. C’est le diachylon sur le bobo. Il n’y a pas de remède miracle, sauf souvent de refaire la rue au complet. C’est un combat récurrent qu’il faut toujours recommencer. […] » 2015, Le Magazine de L’Île-des-Sœurs, 15 avril, p. 7.
Je pense que les humains souffrent d’un trouble de l’identité. Nous ressentons le besoin de définir, d’affirmer ou de prouver qui nous sommes parce qu’on veut se rassurer soi-même, parce qu’au fond de nous subsiste un doute. Alors, nous adoptons des étiquettes, des idées, des causes, des idéologies ou des religions qui viennent mettre un mince diachylon sur nos angoisses existentielles. 2021, A. Lachapelle, L’homme qui arrêtait le temps, p. 61.
Par métaph. Arracher, enlever un, le diachylon : mettre un terme plus ou moins brusquement à une chose ou une situation qui cause de l’inconfort psychologique, émotif ou moral.
Arracher le diachylon d’un coup sec.
– Je me suis peut-être mal exprimée, reprend Chloé aussitôt. Mon Dieu, je ne veux surtout pas que vous pensiez que… – Vous venez m’apprendre qu’elle est morte? Vous avez retrouvé son corps? [/] Vas‑y, Chloé, c’est le moment d’arracher le diachylon. – … Nous l’avons retrouvé, oui. Tout près d’ici. 2011, F. Gravel, À deux pas de chez elle, p. 26.
Tout a commencé par un discours [du] président de Sony Entertainment America. Il a présenté des excuses sur les déboires de Sony et du PlayStation Network. Une façon de mettre un point final à ce chapitre et de regarder vers l’avant en promettant sécurité et divertissement de qualité aux joueurs. On le sentait dans la salle, ce malaise du « pourquoi tu en parles? ». Mais bon, vaut mieux enlever le diachylon d’un coup que de prendre son temps. 2011, La Presse (site Web), Montréal, affaires (techno), 7 juin.
Je vous suggère fortement de ne pas accepter de prolonger indéfiniment le « break », même si votre conjoint(e) le réclame. […] Lorsque l’un ou l’autre des deux partenaires ne croient plus à une réconciliation possible, il est toujours préférable d’en informer l’autre […] afin de lui permettre de commencer à faire son deuil de la relation le plus rapidement possible. Arracher un « diachylon » d’un coup sec fait moins mal qu’un peu à la fois. 2011, Progrès-dimanche, Chicoutimi, 7 août, p. 31.
Il fallait arracher le diachylon. Et ç’a été fait très rapidement hier soir. Les remerciements ont été raccourcis, le rythme de la soirée a été accéléré, les numéros de variétés ont été éradiqués, et en deux heures top chrono, on a quasiment entendu Stephane Bellavance et Pénélope McQuade pousser un long soupir de soulagement. Enfin, c’est fini. 2016, La Presse (site Web), Montréal, débats, 24 mars.
Combien de séries ai‑je ainsi enduré en essayant fort, fort de me convaincre que ce n’était pas si mal, qu’il s’agissait d’une mauvaise passe et que le temps allait arranger les choses? Beaucoup trop. Parfois, vaut mieux arracher le diachylon d’un coup sec plutôt que de le décoller petit à petit. C’est pas mal moins douloureux. Clac! 2017, La Presse, Montréal, 10 juin, arts, p. 4.
Histoire
1Depuis 1893, mais le mot figure dès les années 1870 dans des publications québécoises reproduisant des sources d’origine française. Par extension du sens de « toile enduite d’emplâtre », attesté en français depuis le XIVe s. (v. TLF); cette évolution sémantique est parallèle à celle qu’a connue le mot plaster. Le mot diachylon, qui est un emprunt du latin médiéval diakilon (ou diaquilon), s’est prononcé [djaʃilɔ̃] autrefois en France (v. Larousse 1866, Littré et TLF; cette prononciation figure encore dans PRobert 1967, mais elle a depuis été supplantée par la prononciation [djakilɔ̃], v. Robert (en ligne) 2022‑09). 2Depuis 1967. Le passage du sens 1 (sens concret) au sens 2 (sens métaphorique) traduit une évolution sémantique ressemblant à celle des mots plaster et band‑aid (v. ces mots, qui ont en commun, avec diachylon, plusieurs expressions métaphoriques basées sur une structure semblable). En France, diachylon connaît aussi un emploi métaphorique, mais avec une valeur plus neutre (v. Robert (en ligne) ibid.). Arracher, enlever un, le diachylon, depuis 2011. Toutefois, la comparaison entre un diachylon qu’on enlève rapidement et la terminaison d’une situation pénible est plus ancienne, comme le montre cet exemple de 1962 : La rupture rapide est la moins douloureuse. On tire sec, d’un seul coup, comme sur un diachylon. (Le Guide, Sainte-Marie (Beauce), 2 août, p. 6). Cet emploi pourrait être inspiré d’expressions anglaises de même sens et reposant sur la même métaphore, mais construites avec l’équivalent band‑aid, telles que to pull off the band‑aid / to pull the band‑aid off, to rip off the band‑aid / to rip the band‑aid off, etc. (v. band‑aid, Hist.).