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SANS-ALLURE [sɑ̃zalyʀ]
adj. et n.

Rem.

1. Généralement invariable (sauf exception; voir point 2). 2. Variante graphique : sans allure; (au pluriel) sans-allures.

  

adj. Fam.Qui fait preuve d’un manque de jugement ou de savoir-vivre, qui se conduit de manière irresponsable, irrespectueuse.

 n.

Un, une sans-allure. (Comme terme d’insulte). Espèce de sans-allure!

 épais, épaisse (sens I.4); innocent, innocentesans-dessein.

Puis regardez le buggy; on va en avoir pour deux heures encore, samedi, à le mettre propre, si on ne veut pas passer pour des sans-allure, dimanche. » 1915, Cl. Dupont. Un petit fils de Pierre Gagnon, p. 6.

– Tu ne barres jamais? dit-elle décontenancée. – Dans le bois, on laisse les portes ouvertes, répondit-il, surpris de la question. [...] Si je n’y suis pas, il y a du bois sec, une table et les ustensiles. [...] Quand ils partent, [...] ils remettent tout en ordre [...]. Il y a des sans-allure partout, continua le trappeur [...]. Moi, c’est pour les chics types que je fais ça, pour mes amis, au cas où ils se trouveraient dans le besoin. 1950, B. Vac, Louise Genest, p. 42-43.

Le père criait : – Maudite machine! Y a jamais rien qui marche. Fallait bien que ça nous arrive à matin. [/] Bruno bourrait tranquillement sa pipe. Cela contribuait à mettre encore davantage le père hors de lui. – Fais quelque chose, espèce de sans allure! 1981, L. Caron, Le canard de bois, p. 272.

C’était moi leur premier grave problème de couple sans allure. Au début, ça pouvait aller, mais leur premier grave problème a grandi monstrueusement, comme c’est le cas pour tous les problèmes jamais réglés. 1986, S. Trudel, Le souffle de l’harmattan, p. 95.

Si on lui avait dit pendant toutes ces années que cette femme allait un jour la toucher au plus profond de son âme, elle aurait ri. Elle avait toujours été convaincue qu’ALBertine était née sans allure et mourrait sans même s’en être rendu compte. 1989, M. Tremblay, Le premier quartier de la lune, p. 261.

Mais il n’y aurait plus de mère pour les fils sans allure, sans cœur et sans dessein, tant que je ne lui aurais pas rendu le dernier sou de l’argent que je lui avais carotté pour m’équiper, et dont je ne lui avais pas rendu le premier. 1990, R. Ducharme, Dévadé, p. 15.

(Dans un sobriquet).

[…] mes deux amis de cœur, Zotique Labranche et Sanzallure Lallancette. 1929, Le Goglu, Montréal, 8 novembre, p. 6.

 (Variante). Pas-d’allure, pas d'allure n.

Pis vous, j’vas vous dire c’que j’pense! Vous êtes rien qu’un torrieu de sans-dessein! Un maudit pas d’allure! Un gâteux d’sauce! 1951, Y. Thériault, Les vendeurs du temple, p. 223.

Histoire

De sans, et allure. Depuis 1915. Le mot est relevé dans des emplois très proches à la frontière nord-est de la France, en Wallonie, comme adjectif et comme substantif : « négligent », « mal organisé » ou « peu soigné » (v. HanseDiff2, s.v. allure; DeprWall, s.v. alure : une sans-alure, en parlant d’une femme négligente dans son ménage); « désinvolte » (v. LéonNam 277 : sins-alûre); « (un) lourdaud, (un) maladroit » (v. FEW ambǔlare 24, 421a). Le mot est un héritage de France, mais il a connu au Québec un développement sémantique ultérieur qui est attesté d’abord dans l’expression n’avoir pas d’allure, laquelle se dit d’une personne qui n’a pas de jugement, de bon sens, de savoir-vivre. Sans-allure est probablement issu de cette expression et sa lexicalisation a pu être influencée par sans-dessein, qui apparaît un peu plus tôt dans la documentation. La variante pas d’allure illustre mieux encore la filiation entre l’expression n’avoir pas d’allure et les deux substantifs en question.

Dernière révision : septembre 2020
Trésor de la langue française au Québec. (2020). Sans-allure. Dictionnaire historique du français québécois (2e éd. rev. et augm.; R. Vézina et C. Poirier, dir.). Université Laval. Consulté le 22 avril 2024.
https://www.dhfq.org/article/sans-allure