MOUSTIQUE [mustik]
n. m.
1. Autrefois, employé au féminin (voir p. ex. Rinfret, GPFC). 2. Variantes graphiques : (anciennement) moutic, moustick.
VieilliNom donné à de petits insectes diptères piqueurs des régions boisées et sauvages autres que le maringouin, plus précisément à la mouche noire et (surtout ancienn.) au brûlot.
mouche (sens I.A et I.B.5).
Rem.Le mot a eu cours dans cet emploi du XVIIe au XXe s. (voir p. ex. PPQ 1566x et 1568x). Il s’est inscrit dans des nomenclatures dont les termes servaient à désigner les trois principaux types de diptères piqueurs nématocères américains que sont le maringouin, la simulie (ou mouche noire) et le brûlot; d’abord, opposé à maringouin, il s’est appliqué à la simulie ou au brûlot, et ensuite (à partir de 1675 env.), opposé à maringouin et à brûlot, il s’est appliqué surtout à la simulie. Dans ces nomenclatures anciennes, c’est le mot moucheron qui faisait office de générique regroupant les trois types de petits diptères piqueurs, tandis que mouche, d’emploi plus large, incluait d’autres insectes piqueurs, dont le taon.
Des insectes volans. Ce n’est pas hors de rang qu’apres les Oiseaux parfaicts je donne icy une petite liste des insectes volans et que je dise en general qu’il y en a tant q[ue] la chose n’est pas croyable sur tout de Bruleaux qui sont dautant plus incommodes qu’ils sont presque imperceptibles, et tout a faict incommodes, aussi bien q[ue] les maringouins dont le nombre est prodigieux et plus importuns qu’on ne scauroit imaginer, avecq[ue] les moustiques qui sont tous differens et Tres incommodes [...]. 1675 env., L. Nicolas, Traitté des animaux à quatre pieds terrestres et amphibies, ms. 12223, fo 77.
Il y en tant d’insectes dans ces bois [du Canada] qu’il est quasy impossible d’y aller l’esté, ils sont pleins de maringouins que l’on nomme cousins en France, de moustics et de brulots qui sont si petits qu’on ne peut quasy les voir, et de tons et de guespes, ces insectes exercent la patience de ceux qui y vont en les piquant, et il faut auoir la peau faite exprés pour le pouuoir souffrir. 1709, A.‑D. Raudot, Relations par lettres de l’Amérique septentrionale, 2018, p. 65.
Durant sa maladie qui ne dura que 8 jours on ne scauroit écrire combien par sa patience il nous edifia, presque à chaque instant il faisoit appeller le missionnaire. C’etoit au plus fort des chaleurs et de ces piquantes mouches qu’on nomme maringouins, Brulots, mousticks. Lors qu’on lui disoit qu’il auroit du rester a la cabane, au lieu de s’exposer dehors a ces insupportables moucherons, il répondoit doucement qu’il n’avoit plus ni la force ni le courage de faire d’autre penitence […]. 1730, The Jesuit Relations and Allied Documents, vol. 68, p. 62.
Ici comme chez toi, trois à quatre jours de grandes chaleurs ont développé la feuillaison dans toute sa grandeur et nos promenades au milieu du jour, assombri par l’épaisseur du feuillage et le peu de largeur des routes, sont vraiment belles, mais elles finissent pour cinq à six semaines. Ces grandes chaleurs ont aussi fait éclore les myriades accoutumées de cousins, moustiques & brûlots et Laflamme hier les trouvait un peu incommodes. Jusqu’à la semaine dernière les nuits trop froides avaient retardé leur apparution [sic]. Elle finit ordinairement avec juin. 1853, L.‑J. Papineau à sa femme, Rapport de l’archiviste de la province de Québec pour 1955‑1956 et 1956‑1957, p. 359.
Mais puisque j’ai promis de dire la vérité, toute la vérité, je ne dois pas omettre de mentionner ici une plaie de la vie des bois durant la belles saison [...]. Je veux parler des maringouins. Durant les mois de mai et de juin ces insectes incommodes, sanguinaires, suivis bientôt des moustiques et des brûlots s’attaquent jour et nuit à la peau du malheureux défricheur. C’est un supplice continuel, un martyre de tous les instants, auquel personne n’a pu jusqu’ici trouver de remède efficace. 1862, A. Gérin-Lajoie, Jean Rivard, le défricheur, Les Soirées canadiennes, vol. 2, p. 179‑180.
Nous commençons sérieusement la vie de voyageur du St‑Maurice. Nous déployons nos tentes pour camper sur le bord de l’eau. Notre wigwam est l’abri le plus agréable que je connaisse. Seulement les maringouins, les moustiques et les brûlots sont des compagnons de voyage dont on se dispenserait volontiers. Ils nous dévorent; le seul moyen de défense que nous ayons contre eux, c’est de fumer. Il n’y a pas le moindre doute que c’est aux mouches que nous devons l’usage de la pipe. 1872, E. Gérin, Le Saint-Maurice : notes de voyage, Revue canadienne, vol. 9, no 1, p. 37.
Aux maringouins, ajoutez les petites mouches noires appelées moustiques, race impudente, importunante, que ni le mouchoir, ni le feuillage ne peut chasser; elles vous aveuglent et vous ne pouvez vous en défendre; elles se collent à votre peau comme des sangsues, et elles vous saignent sans que vous vous en aperceviez. Passez votre main sur votre chignon, derrière vos oreilles, et vous la retirerez toute couverte de sang. Aux moustiques, ajoutez les brûlots, engeance satanée, invisible, qui pénètre partout, passant à travers les habits et les couvertes, et dont la piqûre brûle comme un tison ardent. 1886, J.‑B. Proulx, À la baie d’Hudson, p. 140.
Je veux parler des maringouins. Durant les mois de mai et de juin, ces insectes incommodes, sanguinaires, suivis bientôt des moustiques et des brûlots, s’attaquent, jour et nuit, à la peau du malheureux défricheur. C’est un supplice continuel, un martyre de tous les instants, auquel personne n’a pu jusqu’ici trouver de remède efficace. Heureusement que ce fléau ne dure généralement pas au‑delà de quelques semaines. 1914, C.‑É. Mailhot, Les Bois-Francs, p. 74.
Ajoutez à cela le fléau enrageant des moustiques, brûlots et maringouins, particulièrement nombreux et collants cet été. 1930, Le bulletin des agriculteurs, Montréal, 30 octobre, p. 4.
Chez beaucoup d’insectes la bouche se termine en une sorte de trompe qui est organisée pour absorber les liquides seulement. On les appelle les suceurs puisqu’ils aspirent les sucs des plantes, la sève, comme les pucerons, ou qu’ils boivent le sang des animaux, comme les moustiques, les maringouins et les punaises. 1933, G. Maheux, Guide pratique de la protection des cultures, p. 7.
(Variantes des XVIIe et XVIIIe s.).
Mousquite ou raremousquitte n.
Les Mousquites [mouches noires ou brûlots] & Maringuins, que nous appellons icy [en France] cousins, & nos Hurons Yachiey, à cause que leur païs est découvert, & pour la plupart deserté, il y en a peu par la campagne mais par les forests, principalement dans les Sapiniers, il y en a en Esté presqu’autant qu’en la Province de Canada, engendrez de la pourriture & poussiere des bois tombez dés longtemps. 1632, G. Sagard, Le grand voyage du pays des Hurons, p. 303.
(Hapax; d’après mouche). Mouchequite n.
Il y en a encore d’une autre espece au païs de nos Montagnais [...], si petites, qu’à peine les peut on voir [...]; & les François [leur donnent le nom de] mouches-quilles, ou mouchequites [brûlot], qui ne viennent que vers le mois d’Aoust, & n’ont pas longue durée. 1636, G. Sagard, Histoire du Canada, 1866, vol. 1, p. 185.
(Autres noms, XVIIe s.).
Mousquille n. f.
[...] il y a [dans les grands bois] des mouches communes, des mousquilles [brûlots], des mouches luisantes, des maringoins, & des grosses mouches, & quantité d’autres : [...] les mousquilles sont extremement petites, à peine les peut‑on voir, mais on les sent bien [...]. 1632, The Jesuit Relations and Allied Documents, vol. 5, p. 36.
(Hapax; d’après mouche). Mouche‑quille n. (Voir la citation de 1636 ci‑dessus).
Cour.Nom générique donné aux petits insectes diptères piqueurs se nourrissant de sang (maringouin, mouche noire, brûlot).
2006, Gzen92, Moustique [photo] https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Moustique_(Culicidae).jpg(Plus rarement, par ext.). Nom générique donné aux insectes diptères piqueurs se nourrissant de sang, peu importe leur taille.
Rem.En France, moustique s’applique plus étroitement au maringouin; dans cet emploi, le mot a également cours au Québec, notamment chez les spécialistes et les lettrés; sous l’influence du français de France, les spécialistes et les lettrés ne l’appliquent souvent même qu’au seul maringouin.
Pendant que nous faisons le tour du propriétaire, […] le « Père » Rhéaume, l’un de nos guides, vient nous avertir que les chaloupes sont prêtes pour la pêche. Nous le suivons non sans nous être, au préalable, enduits d’un onguent merveilleux composé par M. Cloutier, qui en possède seul le secret, et fini nous immunise contre la férocité des moustiques : brûlots ou maringouins. 1925, La Revue moderne, décembre, p. 18.
La chaleur est suffocante et les moustiques sont d’une humeur massacrante. […] – Vous avez la face tout en sang! affirme Hervé. – C’est la première fois que les moustiques s’acharnent ainsi à me martyriser! explique M. Lamothe. – C’est signe que nous aurons de l’orage, dit le père Laforce en laissant tomber sa hache, afin d’avoir les mains libres pour accomplir un massacre de maringouins, brulots, mouches à chevreuils, tons à cheval, mouches grises, etc. 1928, H. Lapointe, La terre que l’on défend..., Le Peuple, Montmagny, 17 août, p. 6.
Nous dressons la tente au bord du lac, où des porcs-épics aux poils hérissés déambulent d’un pas indolent. Je n’ai jamais vu autant de moustiques. Quantité négligeable que les brûlots minuscules et les maringouins indiscrets qui se perchent sur leurs longues pattes; tout au plus, ils nous stimulent; mais les mouches noires, voilà l’ennemi féroce! Elles vous assaillent par nuées, vous pénètrent dans les yeux, le nez, les oreilles; elles vous mordent le cou, le front et jusqu’au cuir chevelu, et vous laissent la figure ensanglantée et tuméfiée... 1932, J. Rousseau, Promenade scientifique au cœur des Shikshoks, La Revue moderne, février, p. 5.
On ne connaît pas tout des mœurs propres aux maringouins et mouches noires ou brulôts [sic]. Rares sont les personnes cependant qui n’ont pas éprouvé l’acharnement de ces moustiques à prélever l’impôt du sang et le tourment des démangeaisons qui s’ensuivent. 1954, Le Droit, Ottawa, 14 août, cahier 2, p. 18.
L’un des bons petits journalistes du Petit Journal [...] découvrait récemment qu’une foule de Canadiens du Québec, vont passer leurs week-ends sur des plages du Vermont pour s’épargner les piqûres des moustiques qui, de la fin de mai jusqu’au début d’août, infestent nos Laurentides. [...] Il existe actuellement d’excellents moyens de défense contre ces hôtes ennuyeux que nous, Canadiens, divisons en trois groupes : les maringouins, les « mouches noires » et les brûlots, ces derniers presque invisibles à l’œil nu. 1965, J.‑Ch. Harvey, Des bois... des champs... des bêtes, p. 41‑42.
Les moustiques de l’est du Canada comprennent : les maringouins, angl. mosquito, (plusieurs espèces de Culex et Aedes), étroitement apparentés aux cousins d’Europe (mais on aurait tort de remplacer un nom par l’autre), les mouches noires, angl. black flies, scientifiquement simulies (plusieurs espèces des genre Simulium, Prosimulium et Cnethia), les brulots, angl. gnats, (espèces des genres Culicoides, Lasiohelea, Leptoconops). 1968, J. Rousseau, L’avenir des Amérindiens de la toundra et de la taïga québécoises, Les Cahiers des Dix, no 33, p. 77.
Quand on parle de vacances ou d’excursions en plein air, on ne saurait oublier les moustiques. Disons tout de suite que les mouches noires ou brûlots, c’est inconnu à Venise-en-Québec. Ça n’a donc jamais posé de problème. À cause d’une suite de printemps récents où les inondations ont été nombreuses, il y a eu quelques maringouins (ou cousins), mais ça n’a pas duré, heureusement. 1971, La Patrie, Montréal, 25 juillet, p. 24
[Ce chasse-moustiques] n’a presque pas d’odeur. Il assure jusqu’à huit heures de protection contre les mouches noires, les maringouins et autres moustiques. Parce qu’il est concentré, il dure plus longtemps et s’avère donc plus économique que les marques soi‑disant moins coûteuses. 1980, Le Quotidien du Saguenay–Lac-Saint-Jean, Chicoutimi, 14 mai, p. A9 (annonce).
Les moustiques tels que les brûlots, les mouches noires, les maringouins, les mouches à chevreuil et les mouches à orignal (thon [sic] à cheval) hantent nos voyages de pêche printaniers et apparaissent comme le seul inconvénient de notre sport préféré. 1990, Progrès-dimanche, Chicoutimi, 1er juillet, p. 110.
Les moustiques se paient la traite! [titre] Si vous avez récemment fréquenté la forêt, vous avez constaté, vous aussi, que les maringouins, mouches noires et autres insectes piqueurs et suceurs de sang sont déjà présents en nombre incalculable et fort actifs. […], ils sont sortis très tôt, comme on dit communément, et ils sont enragés! C’est parce que la neige a été abondante durant l’hiver et que le temps a été pluvieux durant les dernières semaines. 1995, Le Soleil, Québec, 28 mai, p. S10.
Pour ce qui est de cas de réactions anaphylactiques aux moustiques comme les brûlots et maringouins, ils [sic] sont encore plus rares. En plus, aucune étude pour le moment ne permettrait de démontrer clairement l’efficacité des traitements d’immunothérapie pour ce genre d’allergie. 2021, Le Nouvelliste (site Web), Trois-Rivières, 7 juillet.
Par ext., Rare Nom générique donné aux insectes diptères piqueurs.
On devait s’attendre aussi [en Abitibi] à se faire piquer par au moins cinq sortes de moustiques : les maringouins, les brûlots, les taons [= bourdons], les mouches à cheval et les mouches à orignal. 1994, P. Doyon, Le bout du monde, Le Nouvelliste, Trois-Rivières, 20 décembre, p. 26.
Vous trouvez pas qu’il y a beaucoup de bibittes cet été? En quantité, mais aussi en variétés. Quand j’étais jeune, il me semble qu’on pouvait compter les sortes de moustiques sur les doigts d’une seule main : la mouche noire, le brûlot, l’abeille, la guêpe et son cousin le maringouin. 2008, Le Courrier de Saint-Hyacinthe, 9 juillet, p. A4.
Histoire
1Depuis 1675 env. Au cours du XVIe s., les marins de France ont créé une terminologie populaire pour nommer les petits diptères piqueurs nématocères américains appartenant à trois familles distinctes : les culicidés (dont le type est le maringouin), les simulidés (dont le type est la simulie, ou mouche noire) et les cératopogonidés (dont le type est le brûlot). À la base, cette nomenclature ne comprenait que maringouin et mousquite (devenu plus tard moustique). Ces deux appellations se sont implantées dans les colonies françaises, la première s’appliquant au diptère piqueur de la famille des culicidés (genre Aedes, Anopheles, Culex, etc.) et la seconde, aux diptères de taille plus petite appartenant aux deux autres familles (v. PellFaune 226). En Nouvelle-France, la nomenclature s’est enrichie par la suite du mot brûlot, attesté dès le dernier quart du XVIIe s., ce qui a permis d’associer plus étroitement moustique à la simulie, ou mouche noire. Le système conceptuel à trois termes opposant maringouin, moustique et brûlot a rapidement été adopté par les Canadiens dès cette époque et est resté stable dans la langue commune, du moins jusqu’au début du XXe s., comme le révèle la documentation et comme en témoigne ce passage du botaniste français A. Michaux en 1792, époque où il herborisait dans la région du lac Saint-Jean en compagnie de Canadiens français et d’Autochtones : « Malgré les fatigues de ce voyage et les souffrances occasionnées par les Maringoins (cousins) par les mousketiques (très petites abeill[es] dont l’air est rempli) et par les Brulots aut[re] petite mouche qu’on ne peut distinguer qu’au microscope, ma santé s’étoit retablie entierement. » (v. Proceedings of the American Philosophical Society, 1889, vol. 26, no 129, p. 85). Par conséquent, on ne peut interpréter comme un reflet de l’usage réel la confusion des noms et des référents que l’on observe parfois chez certains auteurs, comme c’est le cas par exemple chez Arthur Buies (v. Chroniques, humeurs et caprices, 1873, p. 365; pour un autre exemple, v. J. C. Chapais, dans Le Naturaliste canadien, 1929, vol. 48, no 10, p. 221‑224). Dans l’histoire du français, le mot moustique a d’abord eu cours sous la forme mousquit(t)e, attestée dès 1601 environ dans port aux mousquittes et port de mousquitte, ancien nom d’un port de l’actuelle Haïti dont il est fait mention dans une relation attribuée à Champlain (v. Brief discours, Ch.‑H. Laverdière (éd.), Œuvres de Champlain, 1870, vol. 1, p. 13 et 14, et pl. XIX; v. aussi TLF). On lui connaît toutefois une variante plus ancienne, mouquite, qu’un auteur normand anonyme a consigné dans une relation sur les Caraïbes datant de 1586 ou 1592 environ et qu’il associe à un petit diptère du type brûlot (v. Histoire naturelle des Indes, fo 72 : Mouquites Sont petites mouches lesquelles sont sy petites que lon ne les peult veoir). À moins qu’elle ne résulte d’une transcription erronée de mousquites, par suite d’une mise au propre d’un original disparu, elle est peut-être due à l’attraction d’un mot comme mouquette « moucheron », bien attesté dans des parlers de la Normandie (v. FEW mûsca 63, 251a, ALN 651 et ALF 877; sur le manuscrit normand et son auteur, v. F. Lestringant, dans J.‑L. Augé (éd.) Image du Nouveau Monde en France, 1995, p. 81‑85). Mousquite est la forme francisée du mot mosquito (diminutif de mosca « mouche ») qu’employaient les Espagnols pour nommer des diptères piqueurs des côtes américaines au XVIe s. et que leur ont emprunté les marins de France et d’Angleterre à la même époque (v. FriedAm, s.v. mosquito; pour l’anglais mosquito, surtout associé au diptère du type maringouin, v. OED, Craigie et DARE; v. aussi DNE 1990, qui associe le mot dans l’anglais de Terre-Neuve au brûlot, au XVIIe s., et à la simulie, dès le XIXe s.). Mousquite figure (avec les var. mosquite et mosquille) dans certains dictionnaires de France des XVIIIe et XIXe s. comme terme de relation désignant un petit diptère piqueur des Indes, de l’Afrique et de la Chine (v. Fur 1727, ValmHNat 1764, s.v. mosquilles, Trévoux 1771, s.v. moschites, Laveaux 1820‑1828, s.v. mosquilles, Besch 1847, Landais 1853). À la suite d’une métathèse qui s’est produite au XVIIe s., mousquite est devenu moustique (v. FEW 63, 257, et TLF), lequel a d’abord eu cours dans les colonies françaises comme nom d’un diptère piqueur plus petit que le maringouin, comme c’était le cas aux Antilles (depuis 1654, en parlant du brûlot) et en Nouvelle-France (depuis 1675 env., en parlant de la simulie). Pour les Antilles, v. J.‑B. du Tertre, Histoire generale des isles, 1654, p. 329 : Il y a encore une autre espece de mouche, que les habitans appellent Moustiques, lesquelles ne sont pas plus grosses que de petites pointes d’espingles, & qui picquent plus vivement que les Maringoins, & laissent une marque sur la peau, comme une tache de pourpre; v. aussi R. Breton, Dictionnaire caraibe-françois, 1665, p. 345 : la Mousquite est ordinairement sur le bord de la Mer, pas plus grosse qu’une pointe d’épingle, qui ne picque pas moins que le Maringoüin. À notre époque, on l’a encore relevé dans les créoles français des Antilles et de la Louisiane par opposition à maringouin (v. TournGuad, s.v. mangngwen et moustik, PoulGuad, s.v. man’engwen et moustik, JourdMart 41, BentKreyòl, s.v. marengwen et moustik, ReadLouis, qui n’atteste l’opposition que dans quelques localités, DitchyLouis, et ValdmCreole, s.v. marengwen et moustik). C’est sans doute à partir des colonies qu’il a pénétré dans des parlers de la France maritime – par les ports de l’Ouest et du Sud‑Ouest – avant de connaître une certaine diffusion vers l’intérieur et de passer en français; cette hypothèse est d’autant plus plausible qu’on observe même, dans de nombreuses localités de l’Ouest, une opposition significative entre moustique, désignant de petits diptères piqueurs, et des mots désignant le maringouin tels que cousin et grand bec (v. ALO 442; v. aussi ALG 47 et 48, dont les relevés laissent croire que la même opposition existe dans des parlers gascons, de même que FEW 63, 250b et 258, note 5, qui doute que le mot mousquite relevé dans ces parlers ait été emprunté à l’espagnol mosquito). Les dictionnaires de France enregistrent moustique comme terme colonial de la fin du XVIIe s. jusqu’à la fin du XIXe, d’après des relevés du mot dans les relations anciennes, et ils le donnent comme employé aussi bien au masculin qu’au féminin (v. Corn 1694, dont la source est J.‑B. du Tertre, Trévoux 1752‑1771, Enc, Besch 1847‑1892 ‘employé spécialement aux colonies’, Larousse 1866 ‘surtout dans les colonies’). Ce n’est qu’à partir de la première moitié du XXe s. qu’il y est présenté comme un mot intégré au français désignant les diptères du type maringouin, concurrençant alors cousin, lequel était jusqu’alors d’usage courant (v. E. Pichon, Le Français moderne, 1939, t. 7, p. 26, et A. Dauzat, Le génie de la langue française, 1943, p. 72). La variante ancienne mousquite a servi de base pour la création de nouvelles formes resuffixées en ‑ille ou remotivées sur mouche : mousquille (de 1632 à 1695 env., Fabvre 297), mouchequille (1636, Sagard) et mouchequite (1636, id.; relevé également aux Antilles en 1645, v. König, s.v. moustique). On relève ces trois variantes dans les parlers du Sud‑Ouest de la France, ce qui indique sans doute qu’elles y ont été introduites par les ports basques à l’époque coloniale en même temps que moustique (v. FEW 63, 250b, ALF 877, ALG 47 et ALLOC 330; v. aussi LespyBéarn, s.v. mousquilh, MousGers, s.v. mousquil, et PalBéarn3, s.v. mousquilh). 2Depuis 1925. Au cours du XXe s., le mot moustique a connu une nouvelle évolution : concurrencé par mouche noire dans son emploi spécifique, sous l’influence des spécialistes et des lettrés, il a fini par s’employer comme générique englobant les trois types de petits diptères piqueurs, puis, plus rarement, d’autres types de diptères de plus grande taille, dont des représentants de la famille des tabanidés (depuis 1928). Depuis 1994, le nom est aussi attesté comme générique s’étendant à l’ensemble des insectes diptères piqueurs, dont certains de la famille des apidés (abeille, bourdon) et de celle des vespidés (guêpe).