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MOTONEIGE [motonɛʒ]
n. f.

Rem.

Variante graphique : moto‑neige.

  

Petit véhicule motorisé, monté sur chenille et muni à l’avant de skis manœuvrés par un guidon, qu’on enfourche comme une moto pour se déplacer sur la neige.

2013, TLFQ, Motoneige [photo]. 2013, TLFQ, Motoneiges [photo].

Chemin, passage, piste, sentier de motoneige. Balade, course, excursion, expédition, randonnée en motoneige. L’industrie, le marché de la motoneige.

 autoneige (sens 2); ski‑doo.

 Par méton. Pratique, sport de la motoneige.

Faire de la motoneige. Adepte, amateur, de la motoneige. Club de motoneige.

Bottes, casque, habit de motoneige, conçus pour la pratique, le sport de la motoneige.

Rem.En France, on emploie aussi scooter des neiges.

Amateurs de motoneige. Après une balade au grand air une invitation spéciale vous est faite de vous rendre au restaurant […]. Un goûter se servit aux propriétaires de motoneige. La liqueur douce sera servie gratuitement. 1967, Le Nouvelliste, Trois-Rivières, 18 février, p. 18.

L’extraordinaire invention de la moto‑neige figure certainement parmi les réalisations les plus spectaculaires du monde du froid après la conquête des pôles et la mise au point des aliments surgelés. La moto‑neige est née au Québec il y a dix ans cet hiver. Son apparition était entourée d’un avenir imprévisible. 1968, Le Soleil, Québec, 26 décembre, p. 5.

J’ai visité Povungnituk à vingt ans d’intervalle. Là où j’avais vu la première fois un magasin et deux tentes, se dresse maintenant un village d’une centaine de maisons [...]. L’hiver, la moto‑neige remplace de plus en plus l’ancien kométik tiré par les chiens. 1968, J. Rousseau, Les Cahiers des Dix, no 33, p. 64.

Les sapins lourds de neige semblent s’enfoncer dans la terre froide. Déjà les rivières gelées deviennent des routes pour les motoneiges. Les hommes du pays ont inventé ces bruits pour peupler leur hiver sec. 1976, J. Garneau, La Mornifle, p. 94.

– Mais l’hiver, ça doit souffler raide ici? – Oh monsieur, pauvre monsieur! – Les rafales, les nordais, les doigts, les pieds et le nez gelés dur, comment faites-vous? [/] Il me regarde paternel : – Pauvre monsieur, on a des habits en duvet de canard avec des bottes de moto‑neige et des casques de phoque qui ne laissent que les yeux à découvert, pas de problèmes. Le froid, c’est comme de la corne, il épaissit la peau; en février, on ne sent plus rien. 1978, F. Leclerc, Le petit livre bleu de Félix, p. 209.

Il y a aussi une certaine irritation à sentir que nous avons tant de mal à nous comprendre entre nous qui partageons la même langue. Nous Québécois sommes les inventeurs de ce véhicule que nous avons appelé « motoneige » après moultes [sic] réunions, consultations, etc. Les autres parties de la francophonie ont réagi très diversement, et à l’invention et à son appellation. [...] Quant à son nom, [...] il fut transformé en scooter-des-neiges, en luge mécanique, en moto-luge, en traîneau mécanique, et je ne sais quoi, alors que nous les inventeurs, Armand Bombardier et compagnie, l’avions appelé « motoneige ». 1980, H. Bergeron, C’est‑à‑dire, vol. 12, no 3, p. 4.

Johnny Sam Annanack, chasseur [inuit] de métier, parcourt 39 000 km chaque hiver en motoneige. L’an dernier, il partait en expédition avec la mission de faire l’essai de la première motoneige conçue spécialement pour le Grand Nord. Conclusion : mis à part les skis trop courts pour la neige molle et les grilles du porte-bagages trop basses, la Samak a passé le test. D’ici peu, Johnny Sam pourra commander ce nouvel outil de chasse modifié selon ses recommandations. 1988, L’actualité, vol. 13, no 4, p. 13.

C’est la nouvelle vocation de la motoneige : la conquête des grands espaces. L’hiver, la forêt ne dort plus. De la baie James à la Gaspésie, quand les chemins forestiers sont recouverts de neige, que les lacs sont gelés dur et que l’accès au bois paraît impossible, un réseau de voies de communication parallèle sort de nulle part et traverse le Québec. 1992, L’actualité, vol. 17, no 7, p. 38.

On est en plein bois. On suit les repères de l’ancien sentier de motoneige. Il mène à un gazouillement de plus en plus profond, percé de plus en plus fort par le cri des geais. 1994, R. Ducharme, Va savoir, p. 166.

Il existe deux conceptions du plein air diamétralement opposées. La première consiste à utiliser l’espace sauvage comme terrain de jeu. Il implique des moyens mécaniques pour maximiser son plaisir (hors-bord, motoneiges, quatre-roues, ski alpin, etc.) et donner à leur propriétaire l’impression de domestiquer la nature. [...] La seconde conception implique le respect de la nature. Il s’agit essentiellement d’activités non polluantes et non agressantes envers la nature (canot, vélo, marche, pêche, etc.). Poussée au maximum, cette façon de profiter du plein air devient la philosophie du « no trace » où aucune empreinte de son passage ne doit être laissée. 2003, Le Devoir, Montréal, 26 août, p. A7.

L’industrie de la motoneige, qui réunit près d’un million d’adeptes et qui génère des retombées annuelles de plus de 1,5 milliard de dollars, repose en grande partie sur le réseau de sentiers dont le développement, l’aménagement, l’entretien et la surveillance sont tributaires de l’engagement de milliers de bénévoles œuvrant partout au Québec. Il s’agit probablement de la seule industrie ayant un tel impact économique qui repose d’abord et avant tout sur les épaules de bénévoles. 2006, Le Devoir, Montréal, 10 mai, p. A8.

La pratique de la motoneige hors-piste gagne de plus en plus d’adeptes au Québec […]. L’activité inspire les amateurs de sensations fortes, qui recherchent des endroits où la neige est abondante. 2022, J. Houle, Le Journal de Québec [site Web], actualité (société), 27 octobre.

 RareMotoneigisme n. m. Pratique, sport de la motoneige.

Les affiches auront pour thème les dangers du motoneigisme à proximité des voies ferrées. Treize adeptes de la motoneige ont été tués et neuf ont été blessés depuis 1969 dans des accidents reliés à la voie ferrée. 1971, Le Bulletin de Buckingham, 9 décembre, p. 14.

Le « motoneigisme » est devenu pour certains une nouvelle forme de snobisme sportif, à l’instar de la « roulotte ». Que l’on s’en serve aux fins que l’on voudra, peu importe. Mais si l’on veut éviter qu’il ne devienne à brève échéance une plaie sociale dans tous les sens du terme, il est urgent qu’on le fasse en demeurant des « adultes », en manifestant plus d’intelligence et de retenue qu’on ne le fait actuellement. 1972, Le Soleil du Saguenay–Lac-Saint-Jean, Chicoutimi, 13 janvier, p. 4.

Pour Tourisme Québec, [...] l’important demeure d’offrir une diversité de produits et des activités intégrées, comme est en train de le devenir le motoneigisme, en combinant de plus en plus hébergement, transport et randonnées. 1997, Les Affaires (cahier spécial), 21 juin, p. 7.

L’hiver fait partie de notre vie. On peut toujours attendre à l’intérieur qu’il passe, ou comme bien des concitoyens le font, profiter de cette saison unique pour jouer dans la neige. Il y a tant de sports d’hiver! Par ailleurs, plusieurs sportifs plus aventureux préféreront les sports motorisés : le motoneigisme et la randonnée en quad sur la neige! 2011, L’Hebdo Mékinac-Des Chenaux, Saint‑Tite, 9 novembre, p. 30.

 VieilliMotoneigeur, Fam.motoneigeux n. Motoneigiste.

Rem.La forme substantive féminine motoneigeuse n’est pas attestée dans la documentation consultée.

 motoneigiste.

Raquettes compactes [...]. Compagnons indispensables du motoneigeur. 1970, Le Nouvelliste, Trois-Rivières, 18 février, p. 25 (annonce).

La vérification et l’entretien de la bonne tension sur la chaîne de traction comporte [sic] un simple ajustement que tous les motoneigeurs doivent apprendre à effectuer. 1970, Le Nouvelliste, Trois-Rivières, 5 décembre, p. 17.

Casques protecteurs pour skieurs et motoneigeurs […] 1971, Le Soleil, Québec, 17 février, p. 31 (annonce).

 RareMotoneigeux, motoneigeuse adj. Relatif à la motoneige.

D’intérêt général, on suggère son assimilation dans les écoles et les réunions d’adultes… Une heure praticable pour le « cross country » ou le ski de promenade dans nos monts et collines des environs : entre 5 heures et 6 heures de l’après-midi, après et avant les « caracolages motoneigeux ». 1970, La Revue de Gatineau, 7 janvier, p. 5.

Quand on fait 300 km dans la même journée et que, là‑dessus, il faut subir grosso modo 150 km de « planche à laver », on se dit que la passion est tiède dans les troupes motoneigeuses, sachant toutefois que le « grattage » est fait bénévolement. 1989, La Presse, Montréal, p. F4.

[L’homme], avantageusement connu des lecteurs de la vie d’ici comme un athlète‑né, un sportif dans l’âme, a finalement décidé d’ajouter un volet motorisé à sa palette déjà très diversifiée de disciplines sportives : il s’agit de la motoneige. […] Pourtant un soir qu’il revenait à la maison, il arriva à bonne vitesse dans un trou et son moteur s’arrêta brusquement. Il tenta donc le démarrage pendant une bonne demi-heure mais rien n’y fit. […] [Il] l’avait acheté [sic] « tankée full » et il croyait être bon pour passer l’hiver. […] Justement cela m’amène à vous entretenir du second épisode des incartades motoneigeuses de notre ami […]. Étant donné son talent à s’autopeaudebananiser, il ne s’écoula guère de temps avant que notre homme n’apprenne la règle no 2 en motoneige : si ça dépasse ça casse. 1997, La vie d’ici, Shipshaw, vol. 15, no 4, p. [11].

Si certains esprits pionniers acceptent de vivre au Nord […], si les peuples premiers vivent maintenant entre deux frigidaires et une télévision internisée, les esprits soignés, eux, semblent ne pas avoir grande envie de mouches noires pendant les deux mois d’été, de boucane dans les yeux ou trop de grands frettes par ‑40 degrés dans une tente de nylon montée sur une presqu’île de la toundra. Quoi faire? Réfléchir à cette problématique dans un casse-croûte de Chibougamau, la ville la plus motoneigeuse de tout le Nord-du-Québec, un beau dimanche tranquille, alors les amis rassemblés pour le déjeuner laissent tourner pendant des heures le moteur de leur camionnette? 2015, J. Désy, L’Esprit du Nord, p. 214.

notice encyclopédique

La motoneige est créée par l’ingénieur et entrepreneur québécois Joseph-Armand Bombardier, qui la lance sur le marché à l’automne 1959, après de nombreuses années de recherche et d’innovation technique consacrées à l’autoneige. Ce lourd véhicule, lui‑même employé au Canada depuis les années 1940, était équipé d’un moteur d’automobile dont le poids représentait l’une des difficultés retardant la mise au point d’un petit véhicule à une ou deux places. C’est la sortie sur le marché des moteurs à deux temps, à la fois légers et puissants, qui permet enfin à J.‑A. Bombardier de construire le « Ski‑Doo » – nom de marque déposée qu’il avait adopté avant que ne soit créé le terme motoneige –, dont la traction est assurée par une large chenille de caoutchouc et qui est équipé d’un remarquable système de suspension permettant d’épouser les irrégularités du terrain. Le succès immédiat de la motoneige comme véhicule utilitaire et récréatif entraîne la prospérité de l’entreprise de Bombardier. Au cours des années 1960, faire de la motoneige devient une activité familiale et sociale et donne lieu à la création de nombreux clubs de motoneigistes. Cependant, les dégâts causés à la faune et à la flore, ainsi que les nombreux accidents mortels, obligent les provinces canadiennes à adopter au début des années 1970 une législation restreignant la circulation des motoneiges. Le déclin du marché, amorcé vers 1973 et dû, entre autres, à la crise de l’énergie et à la récession économique, fait disparaître la majeure partie des fabricants de motoneiges. Au Canada, seule Bombardier survit et, à partir de l’année suivante, elle adopte une stratégie de diversification de ses activités qui la conduit à s’engager dans les domaines du transport ferroviaire et de l’aéronautique. En 2003, la multinationale prend la décision de se départir de la division des produits récréatifs, dont une partie est alors acquise par la famille de J.‑A. Bombardier. 

Sources : L. Bovet (1990), Québec français, (76), 84‑85; Commerce-Montréal (1969), 26(6), 37‑44; L’Encyclopédie du Canada (1987); R. Lacasse (1988), Joseph-Armand Bombardier, p. 165‑183; L’actualité (1971, décembre), 48‑52; id. (1974, janvier), 16‑19; Québec Science (1973, février), 4‑8.

Histoire

Depuis 1967. Création québécoise formée de moto et neige, sur le modèle de autoneige. Au cours des années 1960, la motoneige n’était connue que sous les noms de ski‑doo, qui était usuel à l’oral, et autoneige (sens 2), qui était fréquent dans les écrits et dans des noms d’associations regroupant les motoneigistes. En 1967, le Comité de linguistique de Radio-Canada propose de traduire ski‑doo par motoluge, mot qu’on rencontre occasionnellement par la suite à l’écrit jusque dans les années 1970 (v. RC‑Fiches 190). À la fin de l’année 1968, l’OLF opte pour l’utilisation des termes moto‑neige (écrit avec un trait d’union, motos‑neige au pluriel) et motoluge (v. Cl. Tessier, dans Le Soleil, Québec, 27 décembre 1968, p. 9; v. aussi Colpron1 120, qui témoigne du même choix chez J.‑M. Laurence). Des deux termes, le premier s’impose rapidement – mais avec l’orthographe motoneige – et reçoit un accueil favorable chez la plupart des commentateurs linguistiques (v. RC‑Fiches 277). Seul, semble‑t‑il, P. Beaudry estime en 1973 que motoneige ne respecte pas les principes de la formation des mots en français et, par conséquent, il le condamne au profit de scooter des neiges, mot du français de France qui n’est toutefois jamais passé dans la langue commune au Québec (v. La Presse, Montréal, 5 septembre 1973, p. F12; v. aussi Robert 1985‑2001, qui indique, à tort, que scooter des neiges est employé au Québec).

Motoneigisme, depuis 1971 (L’éclaireur-progrès, Saint-Georges-de-Beauce, 27 janvier, p. 38 (annonce) : Tout pour le motoneigisme!). Motoneigeur, depuis 1970; motoneigeux (nom), depuis 1969 : Les motoneigeux, caricature publiée dans La Presse (perspectives), 20 décembre, p. 4. Motoneigeux, motoneigeuse (adj.), depuis 1970.

Nouvelle entrée de la deuxième édition

Dernière révision : décembre 2022
Trésor de la langue française au Québec. (2022). Motoneige. Dictionnaire historique du français québécois (2e éd. rev. et augm.; R. Vézina et C. Poirier, dir.). Université Laval. Consulté le 19 avril 2024.
https://www.dhfq.org/article/motoneige