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MÉNÉ [mene] ou  MENÉ [məne]
n. m.

Rem.

Variantes graphiques : (plus rarement) ménéemenée.

1

Nom donné aux poissons de petite taille (qu’ils soient parvenus au stade adulte ou non), en partic. à ceux qui appartiennent à certaines familles peu estimées (cyprinidés, umbridés, etc.), qu’on utilise souvent comme appâts.

Des petits, des gros ménés. Pêcher le brochet, le doré, le touladi au méné. Cages, trappes à ménés.

Chaudière à ménés : seau dans lequel le pêcheur transporte et conserve les ménés vivants.

Vendeur de ménés. L’utilisation de ménés vivants pour la pêche à la ligne est interdite au Québec.

 poisson-appât (s.v. poisson, sens I.2).

 Par ext. Leurre imitant la forme d’un petit poisson et muni d’hameçons.

Un méné artificiel.

Rem.1. On a souvent tenté de remplacer méné par vairon, mais sans succès, celui-ci ne s’appliquant de toute façon en France qu’à un seul petit poisson d’eau douce de la famille des cyprinidés (Phoxinus phoxinus), inconnu en Amérique. 2. Depuis le début des années 1950, méné est utilisé par les spécialistes dans des appellations spécifiques servant à désigner un grand nombre d’espèces de la famille des cyprinidés, par exemple méné de lac (Couesius plumbeus), méné d’argent (Hybognathus regius), méné jaune (Notemigonus crysoleucas), méné laiton (Hybognathus hankinsoni), etc.

J’étais, dit-il, en compagnie d’un pêcheur de profession, sur la rive sud du lac Saint-François, à l’embouchure d’un petit ruisseau où nous espérions trouver du méné pour la pêche au brochet et au maskinongé. 1899, J.-E. Desrochers, dans Le Naturaliste canadien, vol. 26, no 5, p. 70.

J’ai rencontré des types qui refusaient de pêcher parce qu’ils trouvaient que c’est lâche de tendre des pièges à des êtres sans défense. Ces gens-là ne comprennent rien à la vie. Le poisson n’a pas pitié des mouches, des papillons et des « ménés ». Ce sont toujours les gros qui mangent les petits, dans l’eau, sur l’eau et sur la terre. 1934, J.-Ch. Harvey, Les demi-civilisés, p. 27.

On vante, dans les journaux et revues, les dorés et les brochets du Nord. Ceux que nous révèlent les photos, c’est du méné quand on les compare à ces dorés de sept, de dix et de douze livres, que prennent les pêcheurs dans la rivière Saint-François, dans le lac Saint-François, près de Lambton, et dans le lac Aylmer, près de Disraéli [...]. 1957, J.-B.-S. Huard, Hameçons et cartouches, p. 128.

Le pêcheur expérimenté qui a découvert la véritable efficacité des chapelets de cuillères sait très bien qu’au beau milieu de l’après-midi, il pourra se retrouver en plein centre du lac et laisser traîner derrière lui un chapelet de cuillères afin de décider la truite mouchetée, souvent de belle taille, à s’attaquer à ce qu’elle croit être un banc de petits ménés. 1980, P.-R. Mercier, La pêche à la ligne, p. 79.

Comme des milliers d’autres au Québec, le lac avait été contaminé par des ménés apportés sur place par des pêcheurs. L’omble de fontaine n’a pas résisté longtemps. Ne pouvant faire face à la compétition alimentaire (ménés et truites bouffent presque exclusivement des insectes), la population de truites a commencé à décliner. 1994, La Presse, Montréal, 21 mai, p. H5.

 (Variantes). RareMiny, minny ou minné.

Nous avons, dans nos rivières et dans nos ruisseaux, plusieurs espèces de petits poissons que l’on désigne généralement dans nos campagnes sous le nom de ‘minnés’ qui n’est que la corruption de l’anglais ‘minnows’. 1931, Le Naturaliste canadien, vol. 58, no 5, p. 119.

 RareMinnow.

Dans la rivière Rideau, l’appât d’écrevisse (tout entier) est excellent pour l’achigan. Je crus un jour devoir m’en servir dans un lac de la Gatineau. Je voyais à quelques pieds dans l’onde quantité de ces poissons prêts à saisir l’appât habituel, le ‘minnow’. A la vue de mon nouvel appât, tous les achigans [...] prirent la poudre d’escampette. 1909, L’Almanach du peuple de la librairie Beauchemin, p. 239.

Rem.Se rencontre surtout dans la presse de la première moitié du XXe s.

2

Fig.Un méné, un petit méné : un personnage de peu d’importance, de peu de valeur. Un gros méné : un personnage important, influent, bien nanti.

 loc. Ne pas être un petit méné ou (parfois) ne pas être un méné ordinaire : être un personnage important. 

Rem.Moins usuel de nos jours.

 poisson (sens III.1).

Sir Lomer [Lomer Gouin, premier ministre de la province de Québec], ça n’est pas un mennée [sic] ordinaire, et c’est pas n’importe qui, qui est capable d’y passer entre les jambes. 1920, La Patrie, Montréal, 3 janvier, p. 13 (chron. humor.).

Il y a aussi les pétitionnaires, qui ont consenti à se laisser couvrir de ridicule devant toute la province, mais apparemment ce sont de trop petits ménés et ils n’ont pas les dents assez solides pour espérer sauver du carnage les plus petites retailles. 1932, Le Goglu, Montréal, 8 janvier, p. 3.

Les enquêtes sur la boxe, aux États-Unis, ne sont pas terminées. Loin de là. On annonce même que des gros « ménés » seront assignés par les autorités fédérales américaines. Il est à se demander, toutefois, combien de ces grands « manitous » répondront à l’appel de la Cour. 1959, Le Devoir, Montréal, 20 novembre, p. 12.

Je le priai [le ministre] de chercher les opinions de chacun des « gros-ménés », afin que je sache et perçoive de ma retraite les alliés que je pouvais avoir. 1983, Cl. Charron, Désobéir, p. 161.

Histoire

Résulte d’une adaptation de l’anglais minny, variante de minnow (v. OED, Random 1983, Webster 1986). Le mot n’a aucun lien avec méné (ou mené) « poisson de la famille des ménidés que l’on rencontre dans les mers de l’Inde et de la Chine », attesté en français du XIXe s. (v. Besch 1847-1892, Larousse 1866-1897, Quillet 1937-1948; néologisme créé par Lacépède d’après le grec mênê « lune », v. Œuvres complètes de Buffon, vol. 38, t. 77, éd. de 1830-1832, p. 152), ni avec mène « poisson marin de la fam. des sparidés », attesté en français du XVIIe au XIXe s. (v. FEW maena 61, 19; Larousse 1866, Besch 1892).

1Depuis 1899. De l’anglais (v. OED, s.v. minnow : « Often loosely applied to any small fish. [...] In the U.S. it is applied (sometimes with prefixed defining word) to many different fishes of small size, chiefly cyprinoids [...] »; Webster 1986 : « a live or artificial minnow used as bait in fishing »; v. aussi Gage 1984). Certaines appellations spécifiques sont des calques d’appellations en usage en anglais nord-américain, par ex. méné d’argent (d’après Silvery Minnow), méné laiton (d’après Brassy Minnow). 2Depuis 1920. Méné « personnage de peu d’importance » est un emprunt de l’anglais nord-américain (v. Random 1983 : « a person or thing that is comparatively small or insignificant »; v. aussi Webster 1986). Cependant, les composés petit méné, gros méné et la locution ne pas être un petit méné paraissent être des créations locales, sans doute formées sur le modèle d’emplois semblables que connaît le mot poisson (sens III.1)

Version du DHFQ 1998
Pour poursuivre votre exploration du mot méné, consultez notre rubrique En vedette sur le site Web du Trésor de la langue française au Québec.
Trésor de la langue française au Québec. (1998). Méné ou mené. Dictionnaire historique du français québécois (2e éd. rev. et augm.; R. Vézina et C. Poirier, dir.). Université Laval. Consulté le 15 janvier 2025.
https://www.dhfq.org/article/mene-ou-mene