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HERBE [ɛʀb]
n. f.

Rem.

Variantes graphiques : (d’après la prononciation populaire du mot) arbe, harbe.

I
A

(Dans des noms communs de plantes général. herbacées, le plus souvent formés de herbe à suivi d’un subst. et écrits sans trait d’union).

1

Région. Herbe à bernache(s) ou (surtout à l’oral) herbe à barnèche(s) : nom donné à la zostère (Zostera marina, fam. des naïadacées), plante à feuilles étroites et très longues qui forme de vastes colonies dans les eaux salées calmes et peu profondes et qui joue un rôle important dans l’alimentation des oiseaux aquatiques (en particulier dans celle des bernaches cravants).

Une prairie d’herbe à bernache.

Rem.D’usage courant dans tout l’estuaire du Saint-Laurent, mais peu employé en dehors de cette région. Plus à l’est, la zostère est appelée herbe‑outarde, appellation typiquement acadienne, ou herbe à outarde (voir sens 7). Plus à l’ouest, cette plante est également connue sous le nom de herbe à outarde, mais on la nomme plus généralement mousse de mer.

Cette herbe, que les gens de la côte désignent sous le nom d’herbe à Bernache ou d’herbe à Outarde, [...] tapisse souvent la surface des battures vâseuses [sic] ou sablonneuses que couvre et découvre la mer à chaque marée. 1899, H. de Puyjalon, Rapport du commissaire des Terres, Forêts et Pêcheries de la province de Québec, p. 76.

Les prairies de grèves! Joncs, rouches, herbes à bernaches et foins de mer livrés au vent. Comme une eau moutonnante, en bordure du fleuve. 1970, A. Hébert, Kamouraska, p. 74.

On en faisait de l’isolant pour les murs, du rembourrage pour les matelas et pour les sièges de la Ford T. On lui prêtait même des vertus contre le rhumatisme. Dans les années 1920, on fauchait allègrement « l’herbe à bernache » dans les marais des environs de l’Île Verte, dans le Bas-Saint-Laurent. Chaque année, on en récoltait près de 1000 tonnes. 2013, Québec science, vol. 52, no 2, p. 7.

(Par méton., avec valeur de collectif). Feuilles de cette plante, longtemps utilisées à des fins agricoles et commerciales.

L’herbe à bernaches sert d’isolant pour les maisons et de litière pour les bêtes. On l’utilise aussi pour rembourrer les colliers de chevaux, les sièges de voiture, les matelas, les paillasses et même les sommiers disposés sous les matelas de laine. 1984, J. Provencher, C’était l’automne, p. 100.

2

Herbe à chat(s) : nom donné à la cataire (Nepeta cataria, fam. des labiées), plante aromatique et médicinale apparentée à la menthe, dont l’odeur forte attire et excite les chats.

2007, Kenpei, Herbe à chat [photo], CC BY-SA 3.0, Wikipedia. https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Nepeta-catarica1.jpg

Infusion, tisane d’herbe à chat.

 (Plus rarement). Nom donné à la valériane (Valeriana officinalis, fam. des valérianacées), qui produit le même effet sur les chats.

Rem.Ces plantes sont parfois appelées herbe aux chats, comme en France.

Mal de matrice. – Castoreum, chloroforme, liniment de chloroforme, emplâtre roborans, emplâtre de pois de Bourgogne, cataplasme de graine de lin et d’herbe à chat, emplâtre souverain. 1869, Sœurs de la Charité de la Providence, Traité élémentaire de matière médicale, p. 1476.

Le docteur lui dit de prendre des tisanes d’herbe à chat, et ça ne lui fait pas grand chose. 1881, Le Vrai Canard, Montréal, 4 juin, p. 2.

Une infusion de feuilles d’herbe-à-chat faisait venir plus vite les premières menstruations ou calmait les douleurs menstruelles des adolescentes. 1974, Québec, AFEUL, Fr. Miville-Deschênes, ms. 31.

Il s’agit tout simplement et avec patience, d’habituer votre chaton à faire ses griffes sur son petit poteau. [...] Mais si votre chat a encore des réticences, sauproudrez‑y de l’herbe à chat, un produit spécialement conçu pour attirer les félins. La majorité des chats ne peuvent y résister! 1986, Protégez-vous, avril, p. 52.

Placez dans la boîte de transport une couverture ou quelque chose de moelleux avec une odeur que le chat reconnaîtra, cela le sécurisera. On peut en outre y placer des gâteries, de l’herbe à chat ou des jouets pour encourager le chat à y entrer. 2012, Le Canada français, Saint-Jean-sur-Richelieu, 11 octobre, p. C27.

La cataire contient un composé volatil qui s’appelle la népétalactone. Quand un chat hume la népétalactone, l’information est traitée dans son cerveau comme s’il s’agissait d’une phéromone sexuelle. D’ailleurs, les réactions des chats sous l’emprise de l’herbe à chat ressemble [sic] à celles des chattes en chaleur. Les chatons sont insensibles à l’herbe à chat. Ils ne capotent qu’à partir de leur maturité sexuelle, à partir de six mois environ. 2017, Le Journal de Québec (site Web), accueil, 22 janvier.

Certains produits (herbe à chat, phéromones) peuvent rendre le griffoir plus attrayant. Aussi, jouer avec un bâton avec une corde qu’on fait atterrir dessus le griffoir pour montrer au chat qu’il est fantastique est une bonne façon de stimuler votre félin à y planter ses griffes! 2020, Info Saint-Guillaume, mars, p. 23.

D’autres plantes dégagent elles aussi une odeur citronnée de nature à faire fuir les moustiques. Le thym citron ou la mélisse citronnée (tous deux susceptibles par ailleurs de parfumer vos plats, tisanes et limonades), mais aussi la citronnelle ou encore l’herbe à chat (pour ceux qui n’y sont pas trop sensibles…) sont de parfaits insecticides naturels, en plus de ne demander que très peu de travail pour peu qu’on les installe au soleil, dans un sol très sec. 2021, Le Devoir, Montréal, 12 juin, p. C5.

3

Rare Herbe à crapaud : nom donné à la renouée (genre Polygonum, fam. des polygonacées), petite plante à tige noueuse, rampante ou dressée.

Rem.L’espèce la plus commune, la renouée des oiseaux (Polygonum aviculare), est plus souvent appelée herbe à cochon, comme en France.

Puis, allez donc faire de la belle littérature avec de l’herbe à chat, de l’herbe à crapaud, des petits cochons, du bois d’orignal, de la hart‑rouge, etc.; tandis que les mêmes noms de ces plantes, cataire, renouée, sarracénie, viorne, cornouiller, etc., se marient si bien au langage soigné, se prêtent si convenablement à la poësie. 1876, L. Provancher, Le Naturaliste canadien, vol. 8, no 2, p. 43.

L’herbe écartante serait‑ce alors l’herbe à crapaud, cette plante à tige plus courte que le tabac du diable, qui croît sur les levées de fossé, et dont le grain, quand il est mûr, ressemble à s’y tromper au grain de blé noir? C’est en mastiquant ces grains noirs – je n’ai pas à vous l’apprendre sans doute – que le crapaud refait la provision de son levain [= venin], ce levain terrible, vrai poison mortel, quand le crapaud le vomit en colère. 1916, L. Groulx, Les rapaillages, p. 119.

Ensuite pour le mal de gorge, de l’herbe à crapaud, faut pas la laver. C’est une petite herbe, ça, courte, courte, là. On infuse ça, là, puis on […] cette eau‑là. 1971, Témiscamingue, AFEUL, M. Deschênes et J. Biron 89.

Rare Nom donné au plantain (genre Plantago, fam. des plantaginacées). (PPQ 944).

Le plantain commun dont les petits oiseaux sont si friands est une des plantes les plus communes. Elle abonde sur le bord des chemins, dans les friches, sur les talus, dans les champs et les prairies. On la surnomme, selon les contrés [sic] : herbe aux coupures, herbe aux puces, herbe aux crapauds, queue de rat, patte d’oie. Une poignée de racine de plantain dans 50 grammes de bouillon de veau forme un excellent remède contre la diarrhée des enfants. 1927, Le Bien public, Trois-Rivières, 19 avril, p. 6.

Région. (surtout à l’ouest du lac Saint-Pierre). Nom donné à la sarracénie (Sarracenia purpurea, fam. des sarracéniacées).

Rem.Parfois écrit herbe‑crapaud (voir Histoire).

4

Herbe à dinde(s) ou Acadie herbe à dindon(s) : nom donné à l’achillée millefeuille (Achillea millefolium, fam. des composées), plante commune des terrains secs, à fleurs blanches ou rosées et à feuilles très découpées, qu’on utilisait autrefois en médecine populaire (notam. comme fébrifuge) et dans l’alimentation des dindonneaux.

2023, G. Ayotte, Herbe à dinde [photo], CC-BY-SA 4.0, Kalos, Bibliothèque de l’Université Laval. https://cdm22018.contentdm.oclc.org/digital/collection/Botanique/id/8462

Tisane d’herbe à dinde.

Rem.Cette plante est aussi appelée herbe à mille feuilles, notamment sur la rive sud du Saint-Laurent, entre la Beauce et Rimouski.

La première nourriture des dindonneaux doit être composée de pain émié [= émietté] [...] avec du lait, un peu de persil et de millefeuilles (appelés [sic] ici herbe à dinde) hachés menu, et formant une pâtée plutôt ferme que liquide. 1837, Le Glaneur, vol. 1, no 4, p. 56.

Elle lui avait donné à boire plusieurs tasses de tisane d’herbe-à-dindes, et sa fièvre était tombée tout à coup. 1968, A. Major, Le vent du diable, p. 68.

(Acadie). Un cri douloureux s’échappa du ventre du petit Cormier. [...] Marie Cormière, sa mère, se hâta d’expliquer que c’était les cerises, rien que les cerises, des cerises à grappes, ça passerait, des coliques, et puis Célina allait revenir bientôt avec du séné et de l’herbe-à-dindon, vous verrez... c’était rien... non?... 1979, A. Maillet, Pélagie-la-Charrette, p. 53.

Flora Fontanges penche son visage sur les fleurs, respire l’odeur fraîche de l’été sur son visage brûlant. [...] Sa voix a des inflexions à la fois tendres et moqueuses : – Jargeau, boutons d’or, marguerites, herbe à dinde, trèfle blanc, trèfle incarnat. 1988, A. Hébert, Le premier jardin, p. 156.

Les infusions de reines-des-prés, qui exerçaient d’habitude une influence heureuse sur les fièvres malignes, ne dégageaient aucune de leurs propriétés habituelles. De même, ses tisanes d’herbe à dindes et ses décoctions de chiendent, connues pour leur action purificatrice, restaient sans effet. Et les intestins du malade résistaient aux macérations de pruneaux et de graines de lin qui auraient dû les stimuler. Une nuit, alors qu’il dormait les pieds découverts, elle allait s’empresser de rabattre la couverture, lorsqu’elle se ravisa. C’était le temps ou jamais d’appliquer un traitement radical pouvant entraîner une baisse de température. Elle se précipita à la cuisine et tapissa le fond d’une casserole de feuilles d’herbe à dindes qu’elle laissa ramollir dans de l’eau chaude pendant quelques minutes. Puis elle essora les feuilles et les déposa sur des linges qu’elle vint enrober délicatement autour des pieds nus. Confiante, elle alla s’asseoir dans la berceuse placée près du lit, et pria le ciel pour que son intervention fasse effet. 1993, M. Ouellette-Michalska, L’été de l’île de Grâce, p. 139‑140.

Sur votre chemin, vous la rencontrerez assurément si vous avez un penchant pour les jardins. Ornementale, hautement médicinale et utile de bien des manières, voilà celle que nos grands-mères appelaient l’herbe à dinde. Outre son feuillage délicat, la rigidité de ses tiges et son port arborescent, ce qui caractérise l’achillée, c’est incontestablement son arôme. Il suffit de prélever un petit morceau de la plante et de le triturer entre ses doigts pour avoir un avant-goût de sa puissance. En infusion corsée, cette intensité déplaît royalement au palais! 2008, Bio‑bulle, no 82, p. 30.

Je croyais à beaucoup de choses. Les plus simples en particulier comme celle de mâcher de la gomme d’épinette pour combattre la mauvaise haleine, boire des infusions d’herbe-à-dindes pour éviter le mal de cœur et d’écorces de tremble pour tuer le ver solitaire. Je croyais aussi que mordre dans un oignon cru et porter des combinaisons longues à l’année évitaient d’attraper le rhume. Finalement, je croyais à la Chasse-galerie. 2016, M. Jutras, 48 Saint-Augustin, p. 121.

Ma mère utilisait [de l’eau de Pâques] pour fabriquer son propre sirop contre le rhume ou le croup. Elle faisait bouillir dans un peu d’eau de Pâques, des fleurs d’herbe à dinde (achillée millefeuille), du miel et du jus de citron jusqu’à ce qu’elle obtienne un sirop clair mais consistant. Il était très efficace. 2017, L’info du Nord, Mont‑Tremblant, 12 avril, p. 17.

[…] ma mère préparait, selon les instructions de ma grand-mère, un sirop contre la toux avec les fleurs de l’achillée mille feuilles communément appelée « herbe à dinde ». Elle les faisait bouillir puis les passait au tamis pour en extraire uniquement le jus. Elle ajoutait de la gomme d’épinette, du gin et surtout beaucoup de miel. Le tout devenait un sirop épais. Une cuillérée matin et soir pendant une semaine et nous étions guéris! 2021, L’info du Nord (site Web), Mont‑Tremblant, chronique, 30 juillet.

5

Herbe à feu : nom donné à l’épilobe à feuilles étroites (Epilobium angustifolium, fam. des onagracées), plante vivace de grande taille produisant de longs épis de fleurs rose violacé, qui forme de vastes colonies dans les lieux incultes et envahit rapidement les terrains dévastés par les feux de forêt.

2022, TLFQ, Herbe à feu (« epilobium angustifolium »), Parc national de l’Île-Boneventure-et-du-Rocher-Percé, Gaspésie [photo].

Rem.1. On dit aussi bouquets rouges ou, plus rarement, fleur à feu, de feu. 2. L’épilobe est l’emblème floral du Yukon.

On me dit que l’épilobe pousse en assez grande abondance dans d’autres parties du nord de la province, dans les endroits où le feu a passé, c’est pourquoi cette plante y est généralement connue sous le nom d’herbe à feu ou de plante à feu, les Anglais l’appellent Fire Plant. 1917, L’Almanach du peuple de la librairie Beauchemin, p. 265.

Dans la forêt de conifères aux fûts serrés, une étincelle, une seule, sournoisement, s’est faufilée… La flamme, écuyère infernale, galope dans la f[r]ondaison crépitante de résine et laisse derrière elle des troncs calcinés et tordus sur un sol fumant. [...] Pendant un an, désert total [...]; mais le vent souffle de partout les soies de l’herbe à feu; l’été suivant, entre les noirs fantômes, flamboient les épilobes. 1961, J. Rousseau, Les Cahiers des Dix, no 26, p. 25.

6

Région. (dans les environs du lac Saint-Pierre notam.). Herbe à lien(s) : nom donné à des graminées à tige longue et résistante qui croissent en terrain humide, notamment sur les rives des cours d’eau, et dont on se servait autrefois pour lier les gerbes de céréales et les bottes de foin, et pour couvrir les bâtiments de ferme (général. la spartine pectinée (Spartina pectinata), variété nord-américaine de spartine; plus rarement Calamagrostis canadensis, mieux connue sous le nom de foin bleu).

Une batture d’herbe à liens. Cinquante bottes d’herbe à liens. Grange couverte en herbe à liens.

Rem.Ces graminées sont aussi appelées herbe à couvrir entre Montmagny et Rivière-du-Loup.

[...] ils couvriront laqu[elle] grange & boucheron lesq[uels] pignons de bonne herbe à lien. 1699, Montréal, AnQQ, greffe A. Adhémar, 3 novembre, no 4946.

En deux bonds il gravit l’escalier; il entra dans le grenier. Le feu commençait de flamber dans les couches inférieures d’herbe à lien et dans le bois sec. Allumées au cœur du chaume épais, les flammes se propageaient. 1941, L.‑P. Desrosiers, Les opiniâtres, p. 213.

Après avoir recouvert d’herbe à liens son affût, il avait passé la nuit sur un tapon de paille, à chasser, par un beau clair de lune. Les canards attirés par l’eau de la mare s’y jetaient sans méfiance. 1945, G. Guèvremont, Le Survenant, p. 67.

Si nous finissons par arriver au lac Salone, personne ne le voit beaucoup. Devant nous, un filet d’eau étroit qui traverse le muskeg humide, élastique à la manière d’un matelas qui cache des ressorts dans sa bourrure. Une longue passe bordée d’une sorte d’herbe à liens, avec des courbes en S, qui s’élargit en bassins où nagent des familles de canards. Au loin, un reflet bleu turquoise laisse soupçonner la vaste étendue qui nous appelle depuis si longtemps, mais qui continue de fuir. 1954, La Tribune, Sherbrooke, 13 novembre, p. 1.

Le feu? C’est pas si « prenant » qu’vous pensez. J’ai jamais entendu parler qu’une grange d’herbe-à-lien avait flambé! Ça attire pas le tonnerre comme la tôle, et pis les ouragans ont pas d’prise là‑dessus. On dirait qu’ça plie pour prendre le choc… mais la tôle pis les bardeaux, j’en ai vu partir! Et puis, ça finit toujours par prendre l’eau, un jour ou l’autre… 1962, Le Petit journal, Montréal, 11 novembre, p. A49.

Le travail du chaume [titre] Une technique, presque un art, qui se perd. Les bâtiments disparaissent, faute d’être entretenus, car il n’y a presque plus de couvreurs et « l’herbe-à-liens » (le chaume) est de plus en plus difficile à trouver. L’environnement se transforme et les traditions tombent en désuétude. 1979, Décormag, no 74, p. 10.

Le Salon de la chasse aux canards offre en effet un éventail très complet allant de la préparation du voyage de chasse, de l’excursion elle-même et du retour. Ainsi, le chasseur peut y retrouver tout le matériel dont il a besoin pour son excursion, avoir une bonne idée du coût de la partie de chasse s’il décide de s’adresser à une pourvoirie et apprendre comment tisser sa propre cache en « herbe à lien ». Il peut aussi s’informer auprès d’éleveurs compétents sur l’utilité de posséder un chien rapporteur pour la chasse, savoir quels appelants choisir et finalement apprendre ce qu’il doit faire pour naturaliser ses prises. 1987, La Presse, Montréal, 6 septembre, p. A3.

Cache pour la chasse : 2 tapis d’herbe-à-lien (12 pi et 25 pi). 150 $ pour les 2. 1990, Le Nouvelliste, Trois-Rivières, 15 septembre, p. 47.

Parmi les autres espèces poussant sur le haut marais, on retrouve la spartine pectinée, plante indicatrice d’un milieu de haut marais, la salicaire pourpre et le roseau, ces deux dernières étant des espèces envahissantes. La spartine pectinée, appelée « herbe à liens », servait autrefois de corde pour attacher les bottes de foin de mer récoltées sur la batture. 2006, C. Plante, Une nouvelle approche de l’environnement au Québec, Approches pluridisciplinaires : XIXe, XXe et XXIe siècles au Québec, p. 63.

Le chaume est constitué de tiges de roseaux, que l’on retrouve habituellement en Bretagne, en Normandie et en Camargue. Au Québec, on la surnomme « herbe à liens » (Spartine Pectinée), une plante des marais comparée à un foin huileux qui a la particularité de ne pas absorber l’eau. Bien compactée, elle est très isolante, très étanche, mais par contre très inflammable. 2008, Le Soleil, Québec, 11 octobre, p. M18.

Les amateurs de produits du patrimoire apprécieront cette collection étendue de 50 espèces indigènes dont des vivaces, des graminées, des plantes grimpantes et des arbres […]. Ainsi, foin d’odeur, herbe aux gueux, concombre grimpant et gants de Notre-Dame voisineront gueules noires, petits cochons, herbes à liens et pimbina pour le plus grands [sic] bonheur des horticulteurs et des amis de la nature. 2010, L’Express, Drummondville, 12 mai, p. 26.

7

Région. (Surtout à l’ouest de Québec et en Acadie). Herbe à outarde(s) ou Acadie herbe-outarde : syn. de herbe à bernache (voir sens 1).

Les réminiscences du grand dérangement sont encore vivaces et précises le long de la baie Sainte-Marie. Ce littoral fut fréquenté, peu de temps après la dispersion, par quelques-uns des fugitifs errants dans les bois. La crainte d’être surpris les empèchant de se montrer le jour, ils profitaient des nuits claires pour s’aventurer au bord de la mer, où ils ensemençaient de pommes de terre quelques petits prés, entourés de hauts joncs, appelés par eux herbes à outardes, dans lesquels ils se cachaient à la moindre alerte. L’automne arrivé, ils revenaient aux mêmes heures de la nuit faire leurs récoltes. 1887, H. R. Casgrain, Un pèlerinage au pays d’Évangéline, p. 428.

L’herbe à outarde – seaweed – est un excellent engrais, et ceux qui sont assez rapprochés des côtes feraient bien de ramasser tout ce qu’ils peuvent trouver. À part la matière animale qu’elle renferme, le salange qu’elle contient active la production du sol. On se trouve très bien de l’herbe à outarde dans la culture des patates. 1890, La Minerve, Montréal, 17 décembre, p. [2].

Dans le bas du fleuve Saint-Laurent les varechs et le poisson forment aussi d’excellents engrais : le poisson est gras et le varech agit sans doute par le sel marin dont la plante est imprégnée et qu’elle abandonne à la pluie. Le varech de rochers ou, comme on l’appelle généralement, le varech à bouteilles, est bien plus riche que celui que la marée apporte au rivage. Le varech, et ce qu’on appelle l’herbe à outarde, sont excellents dans la fabrication des composts. 1891, J. E. Pouliot, Notions d’agriculture, p. 63.

C’est ainsi qu’à la fin de septembre, ces oiseaux [les outardes] se réunissent en grandes troupes et ne manquent jamais, à toutes les marées basses de venir manger sur les battures découvertes par la mer les zostères, plantes marines dont elles sont très friandes et que, pour cette cause, les chasseurs ont appelées : herbes à outardes. 1893, H. de Puyjalon, Récits du Labrador, L’Opinion publique, Montréal, 13 janvier, p. 75.

C’est un trajet de quatre à cinq heures pour une petite embarcation. La Baie d’En‑Dedans, peu profonde, est couverte à cette saison d’une prairie submergée d’arbe-outarde (zostère) dont les longues feuilles rubanées atteignent la surface, et, continuellement bouchonnent et stoppent l’hélice. 1920, frère Marie-Victorin, Croquis laurentiens, p. 235.

(Acadie). J’ai point fait la dune, ni la mer, ni les poissons, ni le foin salé, ni l’harbe à outarde... 1973, A. Maillet, Gapi et Sullivan, p. 34.

Pour se parer des froids d’hiver, les Madelinots terrassaient leur demeure, souvent même jusqu’à l’égalité des fenêtres. Ils employaient de la terre ou le plus souvent de l’herbe-outarde qu’ils recouvraient de branchages. 1980, J.‑Cl. De L’Orme et A. Leblanc, Histoire populaire des îles de la Madeleine, p. 50.

Dans le Bas-Saint-Laurent, au commencement de septembre surtout, on récolte la zostère marine, appelée herbe à bernaches, herbe à outardes, mousse de mer. Elle croît en abondance sur la rive sud de l’île Verte, où l’on procède comme suit pour la récolter. On se rend en mer en équipe : souvent ce sont trois membres d’une même famille, le père et les fils aînés, accompagnés de quelques enfants moins âgés pour donner un coup de main. La cueillette de cette plante ne peut se faire qu’à marée basse. Les pieds dans l’eau, on assemble d’abord en demi-cercle, de chaque côté du chaland à l’ancre, un enclos de piquets entrelacés de harts, qui sont des branches vertes très flexibles. Cet obstacle empêchera que la récolte ne dérive. Puis, les hommes fauchent l’un derrière l’autre, chacun entreprenant la coupe d’une bande d’herbes en se dirigeant vers l’enclos. Une fois l’opération de coupe terminée, une bonne partie du fourrage se retrouve dans l’enclos formé par le bateau et les perches. Simplement à bras ou en s’aidant de la fourche, on charge le chaland d’herbe à bernaches. 2005, La Terre de chez nous, Longueuil, 1er décembre, p. 22.

Dorian a soufflé comme aucune autre tempête avant, assez pour renverser des roulottes, emporter un chalet. Il a attrapé au passage un kayak rouge que Lise a aperçu le lendemain, elle a lancé un avis de recherche. « Tu as survécu à Dorian, mais t’es pas certain que ton beau kayak rouge a fait de même? J’ai une super nouvelle pour toi… Il est embourré tight dans l’arboutarde en face de chez Hélène des îles du côté de la Baie, mais semble pas magané, juste sale un ti‑peu… » Arboutarde, pour herbe à outardes. Le mot s’est passé, le propriétaire du kayak a contacté Lise quelques jours plus tard, il a dit merci à Lise. 2019, M. Moisan, Le Soleil (site Web), Québec, chronique, 13 septembre.

8

Herbe à poux : plante nord-américaine du genre Ambrosia (fam. des composées) qui colonise les lieux ouverts peu entretenus et qui, au moment de sa floraison, libère un abondant pollen pouvant provoquer des allergies respiratoires.

Petite herbe à poux (Ambrosia artemisiifolia), espèce la plus largement répandue, à feuillage finement découpé. Grande herbe à poux (Ambrosia trifida), de taille plus grande et à feuillage plus grossier.

2023, G. Ayotte, Petite herbe à poux [photo]. CC-BY-SA 4.0, Kalos, Bibliothèque de l’Université Laval. https://cdm22018.contentdm.oclc.org/digital/collection/Botanique/id/8516 2023, G. Ayotte, Grande herbe à poux [photo]. CC-BY-SA 4.0, Kalos, Bibliothèque de l’Université Laval. https://cdm22018.contentdm.oclc.org/digital/collection/Botanique/id/8539 2022, TLFQ, Herbe à poux [photo], Jardin universitaire Roger-Van den Hende, Université Laval.

Arracher l’herbe à poux, lutter contre l’herbe à poux.

La saison de l’herbe à poux : la période de floraison de cette plante (août-septembre). Être allergique à l’herbe à poux, au pollen de cette plante.

Faute de bras, la terre, la bonne terre des Delage, pour la première fois depuis deux cents ans, va rester en friche. [...] Les herbes proscrites vont prendre leur revanche et bientôt il n’y aura plus sur les beaux champs, au lieu du blé d’or et de l’avoine mouvante, que moutarde, herbe à poux et chicorée. 1942, frère Marie-Victorin, Récits laurentiens, 2e éd., p. 132.

On avait été dupes d’un adulte […]. Lui, il nous avait dit que l’herbe à poux, l’herbe à poux, c’est des grandes, des herbes violettes […] un peu, et pis, il nous avait dit que la Ville nous paierait cinq sous du paquet d’herbe à poux qu’on ramasserait. Alors, on s’est fait mourir un été de temps ou presque, en tout cas, disons, un mois à couper ça, faire des tas, la sueur au front, je m’en rappelle encore, pour faire des tas, pour avoir beaucoup d’argent. 1964 env., Montréal, AFEUL, P. Perrault 1224 (âge de l’informateur : n. d.).  

En effet, le pollen des herbes à poux peut atteindre un taux très élevé dans l’atmosphère à la fin de l’été (mi‑août à mi‑septembre) et déclencher une allergie chez les personnes prédisposées : la fièvre des foins. 1978, Fleurbec, Plantes sauvages des villes et des champs, p. 210.

Un règlement municipal prévoit des amendes pour les entreprises et les particuliers qui n’arrachent pas l’herbe à poux qui pousse sur leurs propriétés. 1988, La Presse, Montréal, 26 juillet, p. A9.

L’herbe à poux est une plante annuelle envahissante très répandue dans notre région. Elle germe tôt au printemps et atteint le stade de floraison à la mi‑juillet, où elle commence à libérer son pollen, et ce, jusqu’au premier gel automnal. Ses grains de pollen sont facilement transportés par le vent dans un rayon d’un kilomètre. Un plant peut produire jusqu’à 3000 graines pouvant survivre dans le sol plus de 40 ans. L’herbe à poux aime les sols pauvres, arides et perturbés (bords de route, remblais, terrains vagues, etc.) où les conditions de croissance sont difficiles pour les autres plantes. 2016, Ski‑se‑dit, Val‑David, juin, p. 14.

La Municipalité procédera au fauchage des fossés deux fois au cours de l’été […]. Le débroussaillage des fossés aura lieu une seule fois dans l’été, au cours du mois de juillet. Le fauchage coupe le dessus du fossé, tandis que le débroussaillage affecte à la fois le fond et la levée du fossé. Ces opérations ont pour objectif, entre autres, de prévenir la floraison de l’herbe à poux et ainsi éviter sa pollinisation. 2020, Le Flambeau, vol. 44, no 9, p. 5.

Si vous souffrez d’allergies saisonnières, voici quelques trucs pouvant vous aider à diminuer vos symptômes. Tout d’abord, il faut savoir que ce à quoi nous sommes allergique est le pollen qui se retrouve en grande quantité dans l’atmosphère au printemps et en début d’été (fin de l’été et début de l’automne pour l’herbe à poux). Évidemment la situation est pire par temps sec et venteux. Pour les gens allergiques, il peut donc être approprié de ne pas ouvrir les fenêtres et d’étendre nos vêtements pour les faire sécher à l’extérieur. 2021, L’Oie blanche, Montmagny, 14 avril, p. 10.

9

Herbe à puce(s) ou, plus rarement, herbe à la puce : plante vénéneuse nord-américaine (du genre Toxicodendron ou Rhus, fam. des anacardiacées), à tige ligneuse, rampante ou dressée, et à feuilles luisantes composées de trois larges folioles, qui pousse dans les lieux ouverts (bords des routes, orée des bois, etc.) et peut provoquer une forte allergie cutanée chez ceux qui la touchent.

2023, G. Ayotte, Herbe à puce [photo], CC-BY-SA 4.0, Kalos, Bibliothèque de l’Université Laval. https://cdm22018.contentdm.oclc.org/digital/collection/Botanique/id/2591 2022, TLFQ, Herbe à la puce [photo].

Faire attention à l’herbe à puce. Marcher dans l’herbe à puce.

Rem.Dans la langue spécialisée, cette plante est souvent appelée sumac vénéneux.

 Par méton. Allergie provoquée par le contact de cette plante; inflammation cutanée et démangeaisons qui en résultent.

Attraper, avoir l’herbe à puce. Remèdes, traitements contre l’herbe à puce, pour guérir l’herbe à puce.

Rem.Selon la croyance populaire, cette allergie devait revenir à la même date sept années de suite.

[...] il s’est trouvé dans ce dernier endroit deux [plantes] qui me paroissent particulieres et qui sont peu connues en France : l’une est le cotonnier et l’autre l’herbe à la puce. [...] La seconde est de deux sortes : l’une très venimeuse et l’autre qui ne l’est pas tant. Elles communiquent leur venin et causent de grandes demangeaisons à ceux qui les touchent; l’endroit devient enflé, rouge, cuisant et douloureux [...]. 1709, A.‑D. Raudot, Relation par lettres de l’Amerique septentrionalle, 1904, p. 16.

Ce qu’il y a d’avantageux pour le Public à employer ce puissant Spécifique, c’est qu’un grand nombre de maladies sont guéries par son seul emploi : choléras, diarrhée, dysenterie, coliques, […] herbe à puce, etc. etc. Cette terrible maladie du sexe, l’hystéralgie, comme sous le nom vulgaire de beau-mal est guérie, par l’usage de ce spécifique, à la dose de 30 gouttes, mises dans une couple de cuillrées [sic] à soupe d’eau sucrée au goût de la malade. 1872, Le Courrier de Saint‑Hyacinthe, 5 octobre, p. [3].

Ce fut une volée d’adieux quand l’auto démarra. Les mains sortaient de toutes les fenêtres, s’agitant comme des oiseaux affolés. Les voisines criaient les recommandations d’usage, de leur balcon : « Attention à l’herbe à puce, aux maringouins, aux noyades, aux coups de soleil sur la tête... »; leurs voix se perdirent dans le brouhaha de la rue. 1965, Cl. Jasmin, Et puis tout est silence, Écrits du Canada français, vol. 7, p. 66.

La ville est mauvaise comme un champ d’herbe à puces. 1967, A. Hébert, Le temps sauvage, p. 11.

Elle a mis les guenilles de Questa sur des cintres et les a rangées dans la garde-robe. Je la regardais manipuler corset et soutien-gorge comme si elle avait peur d’attraper l’herbe à puces [...]. 1967, R. Ducharme, Le nez qui voque, p. 174.

On trouvait [des bénévoles] en forêt, au ravitaillement, au chronométrage partout où on en avait besoin. Pas toujours évident de trouver des gens pour veiller au bien-être des coureurs en pleine nuit dans un lieu où l’on compte les moustiques par centaine! Certains se sont même portés volontaires pour arracher l’herbe à puce qui se trouvait sur certaines sections du parcours à leur grand détriment. Un admirable événement qui sera de retour l’an prochain. Bravo à tous! 2014, Le Sentier, Saint-Hippolyte, août, p. 16.

L’autre parcours visait la diversité biologique de la région, notamment par l’observation de l’ostryer de Virginie, de la sanguinaire du Canada et des hêtres d’Amérique. Les jeunes ont également appris à reconnaître et distinguer différentes sortes de plantes comme l’arabette à fruits réfléchis et même l’herbe à puce, ce qui leur évitera de bien malheureuses surprises lors de leur prochaine balade en nature. 2017, Journal des citoyens, Prévost, 17 août, p. 11.

Le projet d’expansion comprend le défrichage d’environ 700 mètres carrés du site existant. Présentement, cette section du terrain est envahie par de l’herbe à puces, ce qui représente une source d’inquiétude notable pour les responsables du jardin pour la sécurité des participants et des enfants. « Suite au défrichement et à l’élimination de l’herbe à puces, l’espace sera occupé par une section permaculture et expérimentations pouvant accueillir des arbres fruitiers pour la production de framboises, camerises, pommes et même de kiwis » […]. 2020, Journal Ici l’Info, Québec, 21 juillet, p. 21.

Qu’il s’agisse de renouveler une prescription annuelle pour une personne âgée ou d’obtenir un traitement pour une réaction à l’herbe à puce, il est parfaitement inutile d’aller voir le médecin en personne; l’envoi de photos et une conversation téléphonique permettent de régler le problème à la satisfaction de tout le monde, et c’est moins stressant et moins fatigant pour les personnes qui ont le problème de santé […]. 2021, G. Dufour, Le Devoir (site Web), opinion (lettres), 18 juin.

Vieux ou région. (notam. dans Bellechasse, dans Charlevoix et au Lac-Saint-Jean). Plante nord-américaine, commune dans les terrains secs, qui produit de petites grappes de fleurs roses ou blanches en forme de clochettes et qui contient un latex blanchâtre pouvant causer une légère irritation cutanée (Apocynum androsæmifolium, fam. des apocynacées).

B

Herbe écartante : dans la croyance populaire, plante maléfique ayant la propriété de faire perdre son chemin au promeneur qui met le pied dessus.

Ce n’est qu’à 7 heures du matin que M. Crebassa, harassé, meurtri, faisait sa rentrée au logis; on peut concevoir la joie de sa famille et de ses amis, qui s’étaient livrés aux plus sinistres conjectures sur son compte. S’étant aventuré seul dans une partie du bois dont il connaissait moins les êtres, il avait du [sic] demander son chemin à quolqu’un [sic] qu’il avait rencontré par hasard et qui lui avait indiqué la mauvaise route; il s’était égaré, et avait marché longtemps sans pouvoir se retrouver, subissant l’influence vertigineuse que le peuple prête aux bois, ayant peut-être pilé sur cette herbe mystérieuse à laquelle les superstitieux ont donné le nom d’herbe ecartante. Enfin, rendu de fatigue, il s’était décidé à attendre le jour dans une cabane isolée, où il goûta quelques heures d’un sommeil réparateur. Au point du jour, il s’était éveillé et avait retrouvé sa route sans trop de peine. 1877, La Gazette de Sorel, 26 mai, p. [2].

Ma grand’mère qui avait vu des feux-follets, presque vu des loups-garous et qui possédait une botanique à elle toute seule, connaissait bien, je vous assure, l’herbe terrible. Quand nous partions pour le bois, aux framboises ou aux mûres, elle manquait rarement de nous faire entendre cet avertissement solennel : « Surtout, les enfants, prenez bien garde de piler sur l’herbe écartante. » Et rien que ce mot mystérieux, vous l’avouerai-je? nous gâtait par avance la joie de nos plus belles excursions. 1916, L. Groulx, Les rapaillages, p. 120‑121.

Non loin de la maison, le bois était épais et le marais profond. De peur de la voir s’y enliser ou s’y écarter, il enseigna à Marie-Ange la malice de l’herbe écartante. Sitôt que les petits enfants seuls passent là où elle pousse, la mauvaise herbe leur monte aux yeux, les aveugle, et plus jamais ils ne retrouvent le chemin de la maison. 1942, G. Guèvremont, En pleine terre, p. 84.

De l’herbe écartante, bien […] ma grand-mère y croyait […] Lorsque nous partions pour aller aux framboises ou aux fraises […], elle disait […] : « Prenez bien garde, mes petits, de pas mettre le pied sur l’herbe écartante ». Parce que l’herbe écartante produisait des effets que j’ai racontés dans mon chapitre. […] Quand on avait mis le pied là‑dessus, on était foutu, hein : on perdait son chemin, on était complètement égaré, puis là, on tournait en rond, puis à la fin, on tombait à terre de fatigue. 1963, Montréal, AFEUL, J. Du Berger 23.

C’était le matin. Je me mis à compter les heures. Qu’elles me parurent longues, interminables! Que faire pour les raccourcir? Je me risquais bien au bord du trottoir. J’écoutais la rumeur de la vaste fourmilière, les mugissements du monstre. Mais je n’osais m’aventurer plus loin, tant il me semblait que de terribles sortilèges, pires que l’herbe écartante, auraient pu me happer. 1970, L. Groulx, Mes mémoires, t. 1, p. 42.

[…] ses parents l’ont cherché, ils ont fini par le trouver couché par terre, […] et puis ceux qui accompagnaient le père de l’enfant ont fait remarquer qu’après ses semelles il y avait une sorte d’herbe qui était entrée dans la semelle. Ils ont dit : « Ça c’est l’herbe écartante, c’est pour ça qu’il s’est écarté. » 1972, paroisse Sainte-Geneviève (Québec), AFEUL, J. Woods 2.

Un soir pluvieux d’automne, la Quine de Petite-Rivière-Saint-François avait envoyé son jeune garçon chercher les vaches qui pacageaient à l’embouchure de la Vieille-Rivière. Quand il s’aperçut que la petite Jeanne l’avait suivi, pour ne pas avoir à l’attendre, il l’installa au milieu d’une « talle » de bleuets, lui disant qu’il la reprendrait après avoir regroupé son troupeau. Entre-temps, Jeanne se mit à marcher dans « l’herbe écartante » et son frère ne put la retrouver en ramenant ses bêtes. Il alla prévenir sa mère que la petite s’était « écartée ». Longtemps après la tombée de la nuit, les gens revinrent de la battue en forêt sans la fillette. 1985, J.‑C. Dupont, Légendes du Saint-Laurent : récits des voyageurs, t. 1, p. 55.

[…] Rémi se laisse entraîner, tout l’été, en des aventures extravagantes pour un homme de son âge. Il dépense une véritable fortune en castors (des cinq sous, seule monnaie reconnue officiellement par la demoiselle). Et, sans trop s’inquiéter, ils se perdent en nature, après avoir marché dans l’« herbe écartante ». Ainsi, ils découvrent ensemble la flore variée qui s’épanouit dans les champs et le long de la petite rivière. 1994, Relations, no 605, p. 284.

C

Herbes salées : mélange de fines herbes et de légumes hachés (persil, sarriette, ciboulette, échalote, oignon, poireau, carotte, etc.), qui est conservé dans la saumure et utilisé principalement comme assaisonnement des soupes.

2022, TLFQ, Herbes salées [photo].

Ajouter une cuillerée à soupe d’herbes salées.

Rem.On dit aussi herbes à soupe, de soupe.

Les négocians de Québec envoyaient autrefois du biscuit de mer, des farines, des choux, des oignons, ails, eschalottes, pommes, herbes salées, et de toutes sortes de légumes, et de racines, tant à Plaisance qu’aux autres postes que nous avions en l’isle de Terre-Neuve [...]. 1754, sieur Boucault, Rapport de l’archiviste de la province de Québec, 1920‑1921, p. 21.

[...] cinq livres d’herbe salés [sic] et des herbes fraiches [...] 1812, Saint-André de Rivière-du-Loup, AnQQ, greffe J. Amyot, 11 juillet.

Enfin avec une tasse de cette riche et grossière céréale [l’orge] passée au pilon, l’on faisait une bonne marmite de soupe épaisse qui bouillait au moins trois heures avec un morceau de lard salé, du navet, de l’oignon et des herbes salées que toute bonne ménagère avait dans son garde-manger. 1976, U. Arsenault, Patrimoine gaspésien, p. 81.

Une équipe de parents […] offrit ses services. Ces mères donnèrent un coup de main, fort apprécié, pour la mise en conserve des légumes et la cuisson de plats appétissants. De septembre à décembre, ces personnes ont rencontré les élèves à la cuisine du Centre communautaire, à raison d’un avant-midi par mois. Ensemble, ils ont préparé des herbes salées, fait des pains au zucchini et réalisé différentes recettes utilisant ces beaux légumes. 2013, Le Phare, vol. 15, no 6, p. [7].

Le repas qui a été servi était au-delà des attentes des convives. En entrée, on a pu savourer des rillettes de sanglier aux herbes salées de Charlevoix sur pain d’épices maison et gelée de canneberges. Ce délice a été suivi d’une crème d’oignons caramélisés. 2018, Nouvelles économiques, L’Ancienne-Lorette, décembre, p. 5.

[Mme Paul] suggère aussi d’acheter du poisson surgelé, « car ça se prépare rapidement, avec un peu de moutarde de Dijon, du sirop d’érable et des herbes salées ». Finalement, elle propose aussi d’opter pour des compotes sans sucre et des conserves de thon en guide de collations rapides. 2020, Journal de Chambly, 25 novembre, p. 6.

Les clochette du tendre [/] Le pissenlit du printemps [/] Pire amer au mauvais temps [/] Tous mes rendez-vous ratés [/] Goûtent les herbes salées [/] Le désespoir emmêlé [/] Si tu voulais bien de moi [/] Tu m’inviterais chez toi [/] L’éternité serait loi. 2021, P. M. Montmory, Tant j’irai le rire aux larmes : poèmes, p. [20].

II

Fig., Vieux Veuve à l’herbeveuf à l’herbe : personne abandonnée par son conjoint ou sa conjointe, ou n’habitant plus avec lui.

Albert S. est‑ce que tu t’ennuies bien de ta petite veuve à l’herbe depuis son départ pour Montréal, toi qui l’aimais? 1921, Le Samedi, Montréal, 9 juillet, p. 39.

Ce n’est pas une raison parce que notre amoureuse est… une veuve à l’herbe, pour lui faire manger de l’avoine. 1923, Le Canard, Montréal, 18 novembre, p. 13.

[…] le département du Procureur Général à Québec songe très sérieusement à créer une « cour des séparations » pout règler [sic] les différends conjugaux. En effet, les séparations de corps et de biens, déjà très nombreuses dans notre province, augmentent avec une telle rapidité depuis quelque temps, qu’une notable proportion de notre population aujourd’hui est formée de « veufs et veuves à l’herbe ». On dit même qu’il se trouve un certain district de la ville où, sur cinq couples qui tiennent maison, il y en a trois qui ne sont pas mariés. 1933, L’Autorité, Montréal, 23 décembre, p. 1.

La mère, une veuve à l’herbe, abandonnée par son époux alors que ses enfants étaient encore bébés, était parvenue à élever sa petite famille en servant dans les auberges de Times Square. 1944, L. Rochefort, Sa marotte, p. 160.

La lecture à la lumière artificielle occasionne des maux de tête qui empirent le lendemain, avec douleurs au globe de l’œil. Les émotions atteignent un point extrême, et le cerveau est tout enfiévré. Dans cet état, une femme se fait des ennemis à la maison, à l’église, au bureau et dans les cercles sociaux. […] Elle pleure et se lamente, devenant pratiquement hystérique et tellement remplie de caprice et de malice que son mari désespéré l’abandonne; elle devient alors une veuve à l’herbe dont parle tout le voisinage. 1946, V.‑G. Rocine, Bon sang, beau visage : le régime alimentaire des femmes qui veulent être belles, p. 57‑58.

Demandez donc à M. P., G. F., ou encore à L., s’ils aiment cela boire du champagne qui provient de quelques « Veuves à l’herbe ». 1957, L’Union des Cantons de l’Est, Arthabaskaville, 2 mai, p. 25.

Mme Bouthiller, une ancienne institutrice de campagne [...] rondelette, râblée, rougeaude, dans la quarantaine, est ce qu’on appelle ici une « veuve à l’herbe » : séparée de son mari, mais, naturellement, pas divorcée. [...] Je ne sais si le mari de Mme Bouthiller lui verse une pension alimentaire. En tout cas, elle travaille comme commis-réceptionniste chez un photographe, avenue Saint-Onésime. 1960, G. Bessette, Le libraire, p. 58.

Un garçon qui a vécu avec une femme séparée de son mari pourra-t-il rendre sa femme heureuse? Le garçon qui me fréquente a eu le malheur de s’amouracher d’une veuve à l’herbe et je sais qu’il a vécu près de deux ans avec elle. Il l’a laissée parce qu’il est devenu jaloux avec ou sans raison. Il a commencé à sortir avec moi quand l’occasion se présentait et moi, je ne voulais pas m’amouracher de lui à cause de cette histoire. J’ai même fait parler de moi à cause de cela. 1968, La Tribune, Sherbrooke, 30 septembre, p. 8.

La veuve à l’herbe qui reste en haut de chez vous me serait un bon parti. 1980, Shawinigan, Corpus du Centre d’études linguistiques de la Mauricie (enq.; âge de l’informateur : 27 ans).

« Veuve à l’herbe ». Vous connaissez l’expression? Je suis une femme au début de la quarantaine, libre, autonome, j’ai fière allure et le sens de l’humour. J’aimerais par votre courrier avoir un correspondant ayant de la personnalité, qui soit autonome, social et cultivé. J’ai confiance en la vie, l’amitié, l’amour […]. 1989, Le Nouvelliste, Trois-Rivières, 5 septembre, p. 16.

Mettre, envoyer son prétendant, son amoureux à l’herbe, l’éconduire.

Histoire

IA 1Depuis 1899. De bernache « nom commun de la bernache cravant ». Contrairement à ce qu’avancent certains auteurs, bernache ne peut pas, dans cette appellation, faire référence à la bernache du Canada, puisqu’avant le XXe s., dans la langue générale, cette oie n’était connue que sous le nom de outarde. 2Depuis 1872 (AUQ, Québec, journal 22, 8 août, p. 7). Hérité de France. Attesté en français moderne et dans le parler normand, mais passé sous silence par les dictionnaires français, qui ne relèvent que herbe aux chats (sauf PRobert 1993, qui est le premier à consigner cet emploi; v. RollFlore 6, p. 292, et 9, p. 9; JorFlore 100 et 151). 3Depuis 1876. Relevé en picard (v. RollFlore 9, p. 193). Pour herbe à crapaud « plantain », cp. herbe de crapaud « id. » en lorrain (ibid., p 88). Comme nom commun de la sarracénie, depuis 1935, dans la Flore laurentienne de Marie-Victorin sous la forme herbe‑crapaud. Cette forme sans préposition ne semble pas correspondre à l’usage commun (v. PPQ 1676, Lavoie 300 et Mass no 176, qui ne relèvent que la forme herbe à crapeau); Marie-Victorin a sans doute été influencé par l’hypothèse selon laquelle on aurait donné ce nom à la sarracénie au contact des langues autochtones (notamment algonquine et innue) qui désignaient cette plante par des noms composés pouvant se traduire par herbe-crapaud (v. MVictFlore1 243; v. aussi NatCan 45/11, p. 165‑166). 4Herbe à dinde (depuis 1810, Viger 260) et herbe à dindon (depuis 1842, AnBot 258) sont des héritages des parlers de France. Les deux dénominations sont attestées dans le parler normand (v. ALN 381, JorFlore 112, RollFlore 7, p. 43); herbe à dindon a en outre été relevé en Picardie, dans les Vosges ainsi que dans l’île de Miquelon (v. RollFlore id., Mass no 233). 5Depuis 1917. Herbe à feu est attesté en France, mais uniquement comme appellation locale de la vipérine (Echium vulgare) (v. FEW fŏcus 3, 655b). L’emploi québécois résulte probablement d’un calque de l’anglais fireweed qui, en anglais nord-américain, sert notamment à désigner l’épilobe à feuilles étroites (v. DictCan, Webster 1986). Cp. toutefois feu sauvage « épilobe velu (Epilobium hirsutum) », attesté dans un parler normand (v. FEW id.). 6Depuis 1699. 7Herbe à outarde, depuis 1893 (dès 1887 dans H.‑R. Casgrain, Un pèlerinage au pays d’Évangéline, p. 428, mais pour désigner une plante poussant sur la partie sèche du rivage : quelques petits prés, entourés de hauts joncs, appelés par eux herbes à outardes, dans lesquels ils se cachaient à la moindre alerte). Herbe‑outarde, depuis 1897 (L. Fréchette, dans La Presse, 23 octobre, p. 3 : herboutade). De outarde « bernache du Canada », en raison de l’habitude qu’ont les outardes de se nourrir de cette plante. 8Depuis 1862 (ProvFlore 322). Découle probablement de herbe à poux « nom donné à diverses plantes herbacées », attesté en français du XVe s. ainsi que dans quelques parlers d’oïl, dont le champenois, où l’on s’en sert notamment pour désigner la bardane et la tanaisie (v. FEW pēdǔcǔlus 8, 149b; ALCB 785 et 795; RollFlore 7, p. 75 et 131). 9Depuis 1685 environ (herbe à la puce, dans L. Nicolas, Histoire naturelle, ms. 24225, fo 8; herbe à puce, depuis 1872 dans une source québécoise, mais dès 1802 dans un ouvrage de botanique publié en France, dans lequel l’auteur n’indique pas l’endroit où ce nom est en usage : Toutes les espèces de toxicodendron sont résineuses […]. Le suc qui en découle est âcre, caustique, mordicant et nauséabonde [sic]; appliqué sur la peau, il y occasionne une ébullition […] et y laisse des taches rouges, ce qui lui a fait donner le nom d’herbe à puce (F. S. Duplessy, Des végétaux résineux, t. 4, p. 42). Par référence aux démangeaisons causées par cette plante. Cette appellation est également attestée en France, où elle s’applique cependant à d’autres plantes et fait allusion à d’autres propriétés, généralement à celle de chasser les puces : cp. herbe à puces, qui servait à désigner la pulicaire et le psyllium en français des XVIe et XVIIe s., et herbe à la puce, qui a été relevé dans quelques parlers d’oïl comme nom commun d’une menthe sauvage (v. FEW pūlex 9, 522b; RollFlore 7, p. 97; ALIFO 292, ALN 382 et ALO 380). BDepuis 1916. Formé à partir de écartant « qui fait perdre son chemin, qui égare ». N’a pas été relevé comme tel en France; cp. cependant herbe d’écarte et herbe tournante attestés dans le même sens dans les parlers angevin et saintongeais (v. VerrAnj, DoussTrav 458 et RézHerb 226). En Bretagne, on croyait que la spiranthe faisait s’égarer qui la foulait du pied (Bulletin de la Société botanique de France, t. 19, 1872, p. 91). Mais « le danger est ici d’autant plus grand que personne ne connaît l’identité de la plante! » (frère Marie-Victorin, Flore laurentienne, p. 835). CDepuis 1703 (AnQQ, Québec, greffe L. Chambalon, 27 janvier, p. 25 : Un petit baril d’herbes sallée).

IIDepuis 1921.

Dernière révision : avril 2023
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Trésor de la langue française au Québec. (2023). Herbe. Dictionnaire historique du français québécois (2e éd. rev. et augm.; R. Vézina et C. Poirier, dir.). Université Laval. Consulté le 30 août 2024.
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