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GOBERGE [ɡɔbɛʀʒ]
n. f., souvent m.

  

Nom donné à des poissons marins apparentés à la morue dont la chair est consommée fraîche ou est transformée en une pâte servant à la fabrication de produits économiques imitant les fruits de mer (Pollachius virens, espèce de l’Atlantique; Theragra chalcogramma, espèce du Pacifique aussi commercialisée sous le nom de goberge de l’Alaska).

2006, Natto, Goberge [photo], CC BY-SA 3.0, Wikimedia Commons. https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Kanikama.jpg

Filet de goberge. Goberge à saveur de crabe, de homard.

Rem.1. Ces poissons, auparavant peu prisés, ont été introduits sur le marché vers les années 1970, à la suite de la diminution ou de l’épuisement d’espèces plus recherchées, et c’est à partir de cette époque que le nom de goberge s’est répandu dans l’usage courant. 2. Les appellations goberge (en parlant de l’espèce de l’Atlantique) et goberge de l’Alaska (en parlant de celle du Pacifique) ont été normalisées par le BNQ et par l’OQLF (voir BNQ-Pêches2 18, et OLF-Avis4, nos 780 et 781).

Le marsouin commun se nourrit surtout de poissons comme le hareng, la goberge, le maquereau et la merluche. 1982, J. Prescott et P. Richard, Mammifères du Québec et de l’est du Canada, t. 2, p. 343.

Je me suis aussi attardé quelque [sic] instants au stand de la goberge où j’ai enregistré ce dialogue surréaliste : – La dame : Ça goûte très fort, le crabe! – La vendeuse : Ce n’en est pas, madame. C’est de la goberge. La goberge est un poisson qui ne goûte absolument rien. On lui donne le goût du crabe en le faisant cuire dans un bouillon de crabe... – La dame, pensive : Si on faisait cuire la goberge dans un bouillon de poulet? – La vendeuse : Ça goûterait le poulet... 1991, P. Foglia, La Presse, Montréal, 2 mai, p. A5.

Entre les deux [services], un choix de plats allant du spaghetti au steak, en passant par le steak haché, le pâté chinois, le filet de goberge, le rôti de bœuf en cocotte, une fourchette de prix (menu complet) de 3,95 $ à 9,35 $ et des portions... généreuses. 1991, La Presse, Montréal, 22 octobre, p. D5.

Il n’y a pas si longtemps, les poissons de fond, comme la morue, l’aiglefin, le goberge, le flétan et le flet, contribuaient à la moitié des emplois dans le secteur des pêcheries de la côte est, jusqu’à ce que la surpêche, le refroidissement des eaux et d’autres facteurs n’épuisent les stocks. 1993, La Presse, Montréal, 19 décembre, p. A1.

Vieux(Chez les pêcheurs du golfe du Saint-Laurent). Nom donné à l’aiglefin (Melanogrammus æglefinus), poisson marin apparenté à la morue.

On a encore la Goberge que les pescheurs nomment poisson de saint Pierre, pour deux marques noires qu’il a au dessus des deux costez de la teste, que l’on dit estre l’endroit par où nostre Seigneur le prit; il est fait comme une petite moluë, excellent à manger, & mesme on le fait secher comme la moluë. 1672, N. Denys, Description geographique et historique des costes de l’Amerique septentrionale, t. 2, p. 267; v. aussi PoirRad 112, et ComAc, s.v. gâbarge; pour poisson de saint Pierre, v. poisson, sens II.4.

Histoire

Depuis 1866 (Rapport annuel de Pierre Fortin [...] pendant la saison de 1865, p. 84; dès 1672, appliqué à l’aiglefin). Héritage de France. Le mot goberge est attesté dans des documents d’archives de l’Ouest de la France (XIIIe-XVe s.) en parlant d’un poisson, sans qu’il soit cependant possible de l’identifier (v. Godefroy et DEAF, s.v. gauberge; MussSaint glose le mot de façon très générale par « aliment »). Diverses données permettent de croire que le mot goberge a été utilisé depuis le XVIe s. par les terre-neuvas en parlant à la fois du Pollachius virens (connu en France sous les noms de merlu, lieu et colin) et du Melanogrammus æglefinus (connu en France et au Québec sous le nom d’aiglefin). D’une part, goberge est l’appellation traditionnelle des pêcheurs des provinces maritimes du Canada, ce qui n’a pas de quoi surprendre en raison de l’attestation ancienne du mot dans l’Ouest de la France d’où sont originaires les Acadiens (v. BrassAtl 343-344 et BrassSPM). D’autre part, les données dont on dispose à propos de ce mot dans des ouvrages ou dictionnaires de France depuis le XVIe s. font voir qu’il sert à désigner un poisson apparenté à la morue que l’on pêche sur les bancs de Terre-Neuve, que ce nom de goberge n’est pas répandu en France et que l’hésitation sur le genre du mot est ancienne. Le premier témoignage est celui du naturaliste G. Rondelet (1558) : « Une autre espece de Merlus est le Goberge, poisson de la mer Oceane, qu’on apporte des terres neuves tout salé, plus large é plus grand que la Molue » (d’après DEAF, s.v. gauberge). Les données de Rondelet sont reprises dans les dictionnaires français, du XVIIe s. jusqu’au début du XXe, le mot étant dorénavant relevé avec le genre féminin, parfois donné comme terme de pêche ou de commerce ou même comme dialectalisme (v. Nicot 1606, Fur 1727, Enc, AcCompl 1836, Besch 1847-1892, DG, Larousse 1866-1928, Quillet 1937-1974; v. aussi Mass no 513, qui cite d’autres documents anciens). Selon Laveaux 1820, « on donne ce nom dans quelques ports de mer à une variété de gade merlus, d’autres disent au gade églefin. Il est probable qu’on le donne à tous les deux ».

Version du DHFQ 1998
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Trésor de la langue française au Québec. (1998). Goberge. Dictionnaire historique du français québécois (2e éd. rev. et augm.; R. Vézina et C. Poirier, dir.). Université Laval. Consulté le 29 mars 2024.
https://www.dhfq.org/article/goberge