Recherche avancée

FIFRE [fifʀ]
n. m.

  

loc. adv. VieilliEn fifre : de mauvaise humeur, en colère.

  fiferlot (sens 2).

En vain je m’informe partout de toi : aucune nouvelle, aucune lettre, aucune marque de souvenir ou d’amitié. J’allai hier soir chez Mme T** […]. Je m’attendais à te trouver, du moins à recevoir un paquet bien volumineux à mon adresse. Vrai comme tu es là, il n’y avait rien du tout. Mme T** est au désespoir, Lapointe est aux abois, W. D** est de mauvaise humeur, G** est en fifre, L** est inquiet pour la sûreté de la province. 1853, L. Audet, Lettres d’un étudiant, p. 36 (extrait d’une lettre datée du 6 août).

J’essayit [sic] de le calmer [un paroissien], mais j’t’en fiche! Y sautait dans le canot comme un éturgeon au bout d’une ligne. Ça pouvait nous faire chavirer, vous comprenez ben. Vl’à les camarades en fifre. – Faites‑le tenir tranquille! que me crie le boss, ou ben je le fais bougrer à l’eau. 1898, L. Fréchette, Coq Pomerleau, La Presse, Montréal, 24 décembre, p. 23.

Ah! Tord-nom! si j’avais su ça, j’s’rais parti en calèche, p’us tôt!... J’su’ ben certain qu’la Gritte (Marguerite) va être en fifre de pas m’voir arrivé à soir!... 1899, R. Roy, L’auberge du numéro trois, p. 24.

Les vieux garçons de Québec sont en fifre à cause de la taxe qu’on veut leur imposer. Allons, un coup de cœur, mariez-vous... avec une Montréalaise s’il le faut. 1916, Le Canard, Montréal, 5 novembre, p. 12.

C’est pas que je suis en fifre de contre ceux qui bourrent leurs poches en bourrant tout le monde, mais si le Canayen se servait une fois, rien qu’une fois de sa jarnigoine, on resterait pas toujours dans la grande noirceur. 1941, Valdombre [pseud. de Cl.‑H. Grignon], Le père bougonneux, Le bulletin des agriculteurs, mai, p. 8.

Tiens, il faudra que j’écrive tout prochainement les dessous de cette campagne électorale... […] J’en ai appris des choses!... Tout le monde est en fifre!... Tout le monde crie au scandale!... C’est effrayant!... 1945, L’Avenir du Nord, Saint‑Jérôme, 15 juin, p. [6].

 (Variante). En beau, dans un beau fifre.

– Y‑z‑ont ben mis nos noms [dans les gazettes], mais y nous ont mixés avec une paroisse d’en bas du Saguenay. – C’est ben vrai de dire qu’un malheur vient jamais seul. – Not’ curé est dans un beau fifre, lui qui venait seulement d’arriver par icite. 1910, La Revue populaire, Montréal, octobre, p. 15.

Pour dire vrai, ça me met en beau fifre de te voir agir. Des mois sans travailler, à manger l’argent que ta sœur gagne! 1978, M. Riddez et L. Morisset, Rue des Pignons, p. 30.

Histoire

Depuis 1853. Pourrait se rattacher à la famille de fifre n. m. « petite flûte d’un son fort aigu », mot ayant donné lieu à plusieurs dérivés argotiques (v. FEW 16, 620a : Neuchâtel, Genève fifrer « boire des boissons alcooliques », Lyon fifrer « boire », Paris enfifrer « enculer », etc.). La construction et le sens de cette locution adverbiale rappellent plusieurs autres expressions courantes en français québécois basées sur la même structure (être en + (beau, belle) + subst.) et servant à exprimer la colère (cf. être en fiferlot, être en (beau) joualvert, être en (beau) maudit, etc.).

Nouvelle entrée de la deuxième édition

Dernière révision : octobre 2022
Pour poursuivre votre exploration du mot fifre, consultez notre rubrique En vedette.
Trésor de la langue française au Québec. (2022). Fifre. Dictionnaire historique du français québécois (2e éd. rev. et augm.; R. Vézina et C. Poirier, dir.). Université Laval. Consulté le 18 avril 2024.
https://www.dhfq.org/article/fifre