FIFERLOT [fifəʀlo]
n. m.
VieilliVaurien, mauvais garnement.
Maître Bélial, permettez-moi de vous apprendre que vous n’êtes qu’un fiferlot. 1968, J. Ferron, La charrette, p. 160.
J’ignore si la terre est l’empire des ignorants, des pleutres, des je-m’accroche-à-la-vie-autant-que-je-peux, des sans-lendemains, des sans-aujourd’hui et des sans-hier. J’ignore si la terre est l’an pire des désâmés, des fiferlots, des sous-farine, des accotés, des ameuillés, des blêmasses, des petipetas et des malémus. J’ignore tout cela mais je dis que le monde pourrait être comparé à un serpent à sonnettes qui n’entendrait jamais les sornettes qu’invente sa queue quand il la bouge. 1995, V.‑L. Beaulieu, Mémoires d’outre-tonneau, p. 61.
Ça fait que j’étais là, dans mon garage, le soir, depuis une couple de semaines à déflorer mes couronnes quand une bonne femme vient me voir. La petite misère, la madame : flaubée, chétite, picassée dans la face, une trâlée de morpions mal torchés pognés après la jupe, attelés comme la chienne à Jacques toute la gang. Le Plateau des starlettes pis des vedettes de la tivi, c’est nouveau, ça, avant icitte, c’était laitte par grands bouttes, m’as te dire. Ça doit être marqué dans vos livres. De la grosse famille en masse, du fiferlot, du bum, du ti‑coune, de la morve au nez, de la vaisselle garrochée par les fenêtres, de la chamaille, y’en avait en pas pour rire… 2007, M. Lefebvre, On va gagner!, p. 193.
loc. adv. VieilliEn fiferlot : en colère, de mauvaise humeur.
François Limoges, qu’on avait surnommé « Chemise Bleue », disait de ceux [des touristes] qu’il avait accompagnés : « Il y en a de toutes sortes; ceux qui disent savoir tout et savent rien « en toute »; ceux qui sont ‛flamècheux’ – exaltés – marchent comme des caribous, avironnent sans ‛se maganer’, prétendent connaître la chasse et la pêche, comme nous’aut’s, possèdent des fusils sans pareils, etc… Les uns sont affables, d’autres ‛magniéreux’ et prompts à se mettre ‛en fiferlot’. […]. » 1945, D. Potvin et L.‑A. Taschereau, Thomas, le dernier de nos coureurs de bois : le parc des Laurentides, p. 214.
S’ils sont trop en « fiferlot », je demanderai la protection de la Police montée pour retourner à l’aéroport! 1968, Gr. Gélinas, Hier les enfants dansaient, p. 44.
Les habitants du vieux village se souviennent d’avoir été réveillés à 4 h du matin un jour d’été de 1940 par une violente explosion qui fracassa l’abreuvoir chevalin et fit éclater des vitres de l’église et tous les carreaux de la devanture du magasin général au coin de la rue Sainte-Anne. Le marchand Ulric Baril et sa famille occupaient l’étage au‑dessus du magasin. Sorti précipitamment en pyjama constater les dégâts, Ulric[,] en fiferlot, rentra couper de nouvelles vitres et les remastiqua toutes avant d’aller se rhabiller. 1999, L’œil régional, Belœil, 16 janvier, p. B4.
Histoire
1Depuis 1930 (GPFC). La forme fiferlot est attestée en argot parisien au XIXe siècle avec le sens de « membre viril » comme variante suffixale de fiferlin, désignant au sens premier une chose ou une personne de peu de valeur (v. FEW 16, 621a, qui relève aussi, dans certains parlers régionaux, grand fifeurlin « homme sans énergie » et fiferlin « soldat novice »). Par ailleurs, la forme fifrelot a été relevée, de façon très isolée, dans quelques journaux français contemporains pour désigner une personne niaise (p. ex. dans Le Progrès, Lyon, 18 mars 2018, p. 20, cahier sur le secteur de Saint-Chamond : « Mais le fifrelot, il avait raison sur un truc : le lundi au soleil c’est une chose qu’on n’aura jamais... Ailla, ça a point de sens c’t’affaire! »). 2Depuis 1909 (BPFC 8/3, p. 109). La construction et le sens de cette locution adverbiale rappellent plusieurs autres expressions courantes en français québécois basées sur la même structure ((être) en + (beau, belle) + subst.) et servant à exprimer la colère (cp. p. ex. (être) en fusil, (être) en joual vert, (être) en (beau) maudit et, surtout, (être) en fifre, qui pourrait avoir influencé la création de en fiferlot).