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DRAB ou  DRABE [dʀab]
adj. et n. m.

Rem.

Le mot s’écrivait généralement drab (invariable en genre) jusqu’aux années 1970; depuis lors, la variante drabe, qui s’est imposée au sens 2 (plus récent, voir Histoire), est en voie de supplanter drab. On trouve aussi drable, qui est rare cependant.

1

adj. Pop.Qui est de couleur beige ou d’une couleur s’apparentant au beige.

Du tissu drab, brun et drab, gris et drab. Des gants, des bas, des chapeaux drabs. Des culottes drabs. Un manteau, un paletot, un costume drab. Une sacoche en cuir, en suède drab. Des tapis drabs.

 n.m. Cette couleur.

Un beau drab. Un drab pâle, clair, foncé. Une femme habillée en drab.

La pierre à chaux cimente si bien les parties [de la caverne] entr’elles que l’on ne distingue aucune fente ou crevasse nulle part. Des bosses, des creux; une irrégularité charmante dans les chambres et les passages; des grottes d’une blancheur de neige et d’une transparence de marbre frotté; des corridors gris, des pans de mur noirs, des alcôves drabs; tantôt un mélange de ces couleurs [...]. 1876, B. Sulte, Mélanges d’histoire et de littérature, p. 20-21.

Peinture à bon marché [titre]. Délayer de la chaux dans du lait écrémé au lieu d’eau, et servez-vous-en pour blanchir de la manière ordinaire : la couleur sera d’un beau drab. 1884, La Gazette de Joliette, 16 mai, p. 3.

Le beige, le drab, le brun pâle font encore des murs de vivoir très pratiques, et qui ne changent pas à la lumière et sont durables parce qu’ils sont à peu près toujours de mode. 1920, Le Devoir, Montréal, 15 avril, p. 4.

Non cette couleur ne convient pas au demi-deuil... c’est un drab plutôt qu’un gris. 1923, Le Soleil, Québec, 20 octobre, p. 4.

Tout en haut du fameux mât du stade, on a une vue imprenable sur Montréal et sur le Parc olympique qui, telle une grosse tache drabe, se démarque sur l’asphalte noire. 1988, La Presse, Montréal, 7 août, p. D1.

Plais.Colonne verte et drab, vertébrale.

 (Variante ancienne). Drape ou drappe.

Des portes, des escaliers, des plinthes de couleur drape. Un plafond peinturé en drape.

2

adj. Fig. Qui est dépourvu d’intérêt, qui est terne, moche, ennuyeux.

Une personne, un animateur drabe. Une vie drabe. Des matins drabes.

Rem.Usité surtout par les lettrés (écrivains, journalistes); de façon générale, on dit plutôt plate (variante de plat).

Ce disque [...] est curieusement, en même temps, moins audacieux et moins vivement coloré [que le spectacle]. Ce qui ne veut pas dire que cette production-là est drabe et que les chansons qu’on y trouve ennuient. Loin de là! 1973, La Presse, Montréal, 10 février, p. D6 (Corpus Clas).

Les jours où une personne se sent vraiment drabe, elle doit s’abstenir de porter un vêtement qui contrasterait avec son émotion profonde. 1983, Au masculin, septembre, p. 56.

Les Zommes détiennent tous les postes importants de l’Anusvérité. Ils sont faciles à reconnaître : ils ont toujours une cravate, des sujets de conversation drabes, et un petit renflement dans le creux des pantalons qui fait qu’ils se sentent à l’aise partout. 1983, M. Proulx, Sans cœur et sans reproche, p. 73.

Il devient fastidieux de regarder la télé quand les Expos tirent de l’arrière par trois points ou qu’ils mènent par deux points à la troisième manche. Dans un cas comme dans l’autre, on sait qu’ils vont perdre sans blessures, résignés, bref sans avoir livré le combat pour lequel on les paie. C’est frustrant pour eux et pour l’amateur. Ce doit être d’ailleurs ennuyeux de jouer à la balle de cette façon. Dans mon livre, comme on dit, ils sont drables à voir jouer. 1990, La Presse, Montréal, 9 août, p. 2

Elle [la chanteuse] croit aux voyants et aux diseuses de bonne aventure et jure que son oncle a le don d’arrêter le sang. Elle fait aussi tous les psycho-tests des revues et des journaux. Mais elle ne perd pas de temps avec les mots croisés. C’est trop sec, trop drabe, trop rangé. 1992, L’Actualité, 15 juin, p. 56.

Histoire

1Depuis 1825 environ (BAnQQ, AP-G 103 : 2 culotte de drap drab). De l’anglais drab (v. Craigie, Longman 1981, Random 1983, Gage 1984, Webster 1986, OAD 1980). La variante drap(p)e (de 1836 à 1869, dans les documents notariaux) est probablement issue de drap(p), variante ancienne de drab attestée en anglais aux XVIIe et XVIIIe s. (p. ex. dans a drapp-colour coat et dark drap colour’d coat, v. OED). 2Depuis 1973. De même origine (v. OED; Longman 1981 : drab lives; Webster 1986 : a drab subject, a drab vision of life; ne paraît cependant pas s’employer en parlant de personnes); cp. en outre le sens voisin de « unwell, under the weather » (v. DARE : I’m just feeling drab today).

Version du DHFQ 1998
Trésor de la langue française au Québec. (1998). Drab ou drabe. Dictionnaire historique du français québécois (2e éd. rev. et augm.; R. Vézina et C. Poirier, dir.). Université Laval. Consulté le 9 décembre 2024.
https://www.dhfq.org/article/drab-ou-drabe