COPPE [kɔp] ou
COPPRE [kɔpʀ]
n. f.
1. La graphie coppre était en usage anciennement. 2. Les formes avec r ne sont attestées qu’au sens I.1. 3. Variantes graphiques : copre, cope.
Ancienn., syn. de sou (sens II), puis de cent (sens II.1, après l’instauration du système décimal en 1858).
Livre de vingt coppres, livre ou chelin de vingt coppres : livre française (voir livre2, sous Notice encyclopédique).
3 louis, 17 chelins, 10 coppres.
VieuxDix cents en coppes : dix cents en pièces de un cent.
Par ext., VieuxToute pièce de monnaie de faible valeur.
Une poignée de coppes.
Rem.On trouve aussi à l’occasion la forme d’origine copper (voir Histoire).
token (sens 1).
De la Melasse Françoise, à trente coppres du gallon [...]. 1771, La Gazette de Québec, 11 juillet, p. [3].
– Q. Peut-on faire ou contrefaire les copres? – R. Toute personne qui fera, fabriquera, ou contrefera quelqu’une des monnoies de cuivre de ce royaume ou qui sont fabriquées par ordre de sa majesté, connues sous le nom de copres, ou en achetera, vendra, prendra, recevra, payera ou fera passer, sera coupable de félonie [...]. 1814, J.-Fr. Perrault, Questions et réponses sur le droit criminel du Bas-Canada, p. 335.
Suit l’argent monnayé [:] Un billet de la Banque de Montréal, une piastre... 6 [livres françaises]. Un trente sols... 1 [livre] 10 [sols]. Vingt huit coppres... 1 [livre] 8 [sols]. L’argent monnayé se monte à la somme de huit livres dix huit sols. 1837, Saint-Michel-d’Yamaska, BAnQQ, gr. P.-J. Chevrefils, 7 novembre, p. [5].
Peut-être aussi, qu’il faut déposer une cope dans le trou pour faire partir la musique. Y a peut-être aussi quelque part une manivelle à tourner. 1934, La Presse, Montréal, 3 février, p. 55 (chron. humor.).
Le 23 avril 1793, le forgeron Plessis-Bélair [...] cède à l’avocat Arthur Davidson son terrain sur lequel il y a une maison de pierre, pour la somme de 10,000 livres « de vingt coppes ». 1936, É.-Z. Massicotte, dans Les Cahiers des Dix, no 1, p. 135.
Vieilli(Dans des tournures négatives, pour exprimer la plus petite somme possible).
Ne pas avoir une coppe (dans ses poches). Ne pas devoir, ne pas payer une coppe, une vieille coppe. Ne pas coûter une coppe (à qqn). Partir sans une coppe.
token (sens 2).
Tenez, moi qui vous parle, je connais des gens qui, dans leur vie privée, sont des modèles de loyauté et d’honneur; ça ne volerait pas une coppe au prochain, ça tromperait personne, et ça se ferait couper en morceaux plutôt que de faire du tort à qui que ce soit. 1911, La Presse, Montréal, 23 décembre, p. 4 (chron. humor.).
Moi, Joson, je dis qu’une amanchure où il n’y a pas d’argent pour tout le monde, c’est mieux qu’il n’y ait pas une bonguienne de cope qui frotte sur l’autre. 1937, A. Bourgeois, Voyage autour du monde de Joson et Josette, 12 décembre, p. 3 (radio).
Mais lorsqu’un voisin dont la ferme était hypothéquée lui disait d’une voix enrouée par l’envie : « T’as ben d’la chance, toé, ’Charis. Tes affaires vont ben, pi tu dois pas rien à personne », il consentait : « Ça c’est vrai, par exemple, j’dois pas une coppe. » 1938, Ringuet, Trente arpents, p. 106.
Il crut entendre son ton bourru alors qu’elle se laissait aller à accorder quelque crédit : « Acré fou, t’auras jamais une cope devant toi », disait-elle au quémandeur. 1945, G. Roy, Bonheur d’occasion, p. 41.
– Odilon : Vous lui aviez donné trois piasses pour aller au-devant du Survenant, à Sorel! – Pierre-Côme : Il pouvait toujours pas partir... allège, sans une coppe sur lui. 1963, G. Guèvremont, Le Survenant, 5 avril, p. 6 (radio).
Fig., vieilli(Dans des tournures négatives, exprimant une mesure minimale). Ne pas valoir une coppe, une vieille, une mauvaise coppe : (en parlant de qqch. ou de qqn) ne pas valoir grand-chose.
Pas compliqué, pas méchant pour une coppe. (Suivi d’un subst. désignant une qualité). Ne pas avoir une coppe de bon sens.
cent (sens II.3).
VieuxValoir (X piastres, cents, etc.) comme une coppe : valoir largement cette somme; par ext. en valoir la peine. Coûter, demander, etc., (tel montant) comme une coppe : coûter, demander, etc., cher.
Figurez-vous que mon gendre avait une jument, qui valait cinquante piastres comme une cope et qui nous aurait hiverné [sic] comme des rois. Cette bête était si bonne et si aisée à mener qu’une créature aurait pu la conduire jusqu’au bout du monde. 1859, P. Stevens, « Esquisses de mœurs », dans L’Écho du Cabinet de lecture paroissial de Montréal, 15 mai, p. 153.
Débarque donc, véreux d’chien, que j’dis à Boulé. Mais i’était collé au bed, i’tremblait comme une feuille avec pus une coppe de cœur... 1899, L. de Montigny, « Une histoire de loup-garou », dans La Presse, 15 février, p. 7.
Jamais de la vie; le guerrier blanc en question n’est pas belliqueux pour une coppe, tout le monde te le dira. C’est pas un chant de guerre, je t’en passe un papier; c’est plutôt comme qui dirait une manière de marche nuptiale pour enterrement [...]. 1913, La Presse, Montréal, 12 avril, p. 12 (chron. humor.).
Tu prends les docteurs, v’là encore des gens qui gagnent leur vie avec des devinettes. Tu vas voir un docteur, il t’osculte de la cave au grenier et te découvre trente-deux maladies mortelles pour lesquelles il te charge $ 10.00 comme une cope. 1937, A. Bourgeois, Voyage autour du monde de Joson et Josette, 19 décembre, p. 3 (radio).
– Donalda : Pis t’as prêté deux mille piasses pour ça? – Séraphin : Viens-tu folle, j’ai été voir la terre avec lui pis la maison qui voulait acheter, quatre mille piasses. I d’i manquait deux mille. La terre vaut sept à huit mille comme une coppe. Une rôdeuse de belle place. 1945, Cl.-H. Grignon, Un homme et son péché, 28 mars, p. 6 (radio).
Par ext., Vieilli (Au pluriel). Des coppes : de l’argent; montant indéterminé d’argent.
Gagner quelques coppes au chantier. Se faire des coppes.
Avoir des (ou les) coppes : avoir de l’argent, beaucoup d’argent. (Au singulier). De la coppe : de l’argent. Être sans la coppe, sans le sou, sans argent.
Messieurs les Electeurrrrrrrs, Je vous dois des explications pour avoir laissé ma place à M. Massue. Je l’ai fait dans l’intérêt du parti. Personne ne voulait de moi. D’ailleurrrrrs, si je m’étais présenté, il m’aurait fallu faire des dépenses; tandis que je puis avoir quelques coppes en ne me présentant pas et en supportant M. Massue. 1878, Le Perroquet, Sorel, 27 août, p. 2.
Il y avait toujours une bonne assiettée de soupe et une tranche de jambon à la cuisine pour toute cette vermine de vagabonds sans la cope, cré nom!... qui viennent embêter le monde respectable, t’entends bien, pour vivre, alorsse... aux dépens du public, mardi!... [...]. 1892, L. Fréchette, Originaux et détraqués, p. 360.
Jeunes gens qui avez moisi tout l’hiver à ne rien faire, parce que Houde ne voulait pas faire partir les travaux, voici enfin votre chance d’être votre boss et de faire des coppes. Vous avez vu que les grandes routes sont ouvertes et que les frais qui ont des autos ont commencé à courir les chemins. Ouvrez-vous un garage et ne laissez pas aux autres la chance d’avoir leur argent. Il y a une fortune à faire dès le premier été. 1931, Le Goglu, Montréal, 17 avril, p. 4.
J’étais toujours pas pour l’engager rien que pour le plaisir d’y faire gagner quèques coppes quand j’suis capable de faire mon ouvrage. 1962, G. Guèvremont, Le Survenant, 26 septembre, p. 5 (radio).
VieilliCuivre; métal de la couleur du cuivre.
De la coppe. Un fil de coppe. Un tuyau en coppe.
Rem.S’entend encore dans le milieu de la construction.
Hier soir, à une heure très avancée le prisonnier accompagné de deux compagnons dont il a fourni les noms à la police, après avoir pénétré dans la manufacture[,] mirent de côté, dans le dessein de l’emporter avec eux, une énorme quantité de cuivre et de coppe. Pour mieux pouvoir saisir les objets qu’ils désiraient enlever, les voleurs se donnèrent le spectacle d’une illumination complète de l’établissement. 1900, La Presse, Montréal, 9 janvier, p. 10.
Cottage, boulevard Gouin, 8 chambres, cave cimentée, corniche en coppe; le tout moderne et de 1ère classe. 1920, La Presse, Montréal, 4 mars, p. 17 (annonce).
– Y voulait un cercueil plutôt simple, me demande quoi choisir... – À votre convenance... Mais me trouver dans votre situation à votre place dans vos culottes sauf votre respect, je prendrais ce qu’y a de mieux en pareil cas. [...] De la belle cope épaisse, par exemple. Pour un être cher, pour un père, hen!, on rit pus. [...] Faut pas que les vers pis les bibites le griffent, le tiraillent la première semaine. 1974, J.-M. Poupart, C’est pas donné à tout le monde d’avoir une belle mort, p. 83.
Histoire
Les graphies avec r sont relevées de 1771 à 1877, et celles sans r, depuis 1796.
I1Depuis 1771. Coppre « sou », de 1771 jusqu’en 1877; relevé par les glossairistes jusqu’à la fin du XIXe s. (v. Dunn, s.v. coppe, Clapin, id.). De l’anglais copper « a penny or halfpenny » (depuis 1588, v. OED, sens 2), lui-même attesté comme tel en français du Québec de façon épisodique anciennement, notamment dans les années 1760 (v. par ex. un document de 1762 cité dans Rapport des archives publiques pour l’année 1918, 1920, p. 82 : le Sol marqué françois Vieux a Un Copper et demie; DictCan l’atteste en anglais canadien depuis 1767). Coppe « cent », depuis 1879 (Le Vrai Canard, Montréal, 20 septembre, p. [2] : à une coppe la pièce); en anglais canadien, copper est attesté depuis 1863 au sens de « a Canadian one-cent piece » (v. DictCan). Livre de vingt coppres (1799-1873), puis chez les historiens; livre ou chelin de vingt coppres (1793-1877). Au sens de « pièce de monnaie », depuis 1814 (sous la forme copre), correspond à l’anglais copper (v. par ex. Craigie : « a copper coin »; Random 1983 : « a coin composed of copper, bronze, or the like, as the U.S. cent or the British penny »). 2Depuis 1820 (J. Papineau, dans RAPQ 1951-1953, p. 192 : je suis Resolu de ne lui pas confier un seul coppres). Correspond à un emploi de copper en anglais (v. Craigie, sens 3c : « a unit for measuring value in money; usu[ally] with negative »; Mathews, sens 2b : « as the type of a small amount of money, usu[ally] with a negative »; DARE : « a penny; hence, something of little value »). 3Ne pas valoir une vieille coppe, depuis 1920 (dès 1894, dans un exemple de Clapin, au sens de « ne pas avoir un sou »); cp. en anglais as if she wa’nt worth one copper (Craigie, dans un exemple de 1832, sous le sens 3c). Pas (+ adj.) pour une coppe, depuis 1913. Ne pas avoir une coppe de cœur, depuis 1899. Pour valoir (x piastres, cents, etc.) comme une coppe (depuis 1859), cp. en français valoir X franc(s) comme un sou, attesté depuis 1700 (v. GLLF, s.v. sou; Littré, TLF et Robert 1985, id.). 4Au pluriel, depuis 1878; au singulier, depuis 1892.
IIDepuis 1900. De l’anglais copper.