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CHAUDIÈRE [ʃɔdjɛʀ]
n. f.

Rem.

Variantes graphiques : (d’après des prononciations populaires) chauguiérechedièrecheguiére, cheillérechéyérechayére, etc. (voir PPQ 37, Lavoie 1288, et Histoire).

I

Récipient qui sert à chauffer qqch.

1

VieuxRécipient de cuisine de dimension variable, général. muni d’une anse et avec ou sans couvercle, dans lequel on fait bouillir de l’eau ou cuire des aliments sur le feu.

Chaudière de cuivre, de fonte, de fer, de fer-blanc, de zinc. Chaudière en granit. Étamer une chaudière. Grande chaudière. Petite chaudière. Une chaudière de trois seaux, de dix seaux. Une chaudière avec un petit chaudron. Chaudière à soupe. Faire cuire un poisson dans une petite chaudière.

   chaudron (sens 1).

 Par méton. Contenu d’une chaudière.

Une chaudière de pois cuits. Une chaudière de bouilli. Une chaudière de ragoût.

Apres qu’il [le grand Sagamo Anadabijou] eust achevé sa harangue, nous sortismes de sa Cabanne, & eux commencerent à faire leur Tabagie, ou festin, qu’ils font avec des chairs d’Orignac, qui est co[m]me bœuf, d’Ours, de Loumarins & Castors, qui sont les viandes les plus ordinaires qu’ils ont, & du gibier en quantité : ils avoient huict ou dix chaudieres, pleines de viandes, au milieu de ladicte Cabanne, & estoient esloignees les unes des autres quelque six pas, & chacune à son feu. 1603, S. de Champlain, Des Sauvages, p. 4.

Celuy qui veut faire festin fait mettre une grande chaudiere sur le feu, ou deux, ou trois, selon le monde qu’il veut traiter : dans lesquelles chaudieres on met de la viande ou du poisson, & en suite de la farine de bled d’Inde […]. 1664, P. Boucher, Histoire veritable et naturelle, p. 107.

On suspend deux chaudières ensemble dans un fourneau de briques, de manière que le feu agit sur les cotés aussi bien que sur le fond. 1770, La Gazette de Québec, 8 mars, p. 1.

2 chaudrons, 2 chaudières a soupe, 4 sassepintes [= saucepan], 2 poëles a frire quatre piastres. 1867, Lévis, BAnQQ, greffe L. Bégin, 24 mai.

Ils vinrent aussitôt se placer au tour [sic] de vingt-cinq grandes chaudières où bouillaient et rôtissaient les viandes du festin. S’il me fallait énumérer toutes les pièces de gibier et les poissons qui cuisaient dans ces chaudières et qui devaient être dévorés durant la nuit par ces trois cents diables d’affamés enragés, je n’en finirais plus et vous ne me croiriez pas ou seriez épouvantés. 1873, J. Marmette, Le chevalier de Mornac, p. 78.

Marguerite Morel, qui avait fini de surveiller la cuisson du blé-d’inde dans la chaudière de zinc, est venue vers lui, souriant de tout son frais visage rose animé par le contact du feu sur lequel elle s’est maintes fois penchée. 1925, D. Potvin, Le Français, p. 154.

La langue de l’animal, que j’ai si souvent vu négliger de faire servir à l’alimentation, est cependant très savoureuse et agréable au goût lorsqu’elle est bouillie à point. Tous les os, surtout ceux des pattes, sont broyés à coups de tête de hache et mis dans une chaudière pour bouillir toute une nuit, avec les bajoues, le foie et les tissus cartilagineux qui peuvent être extraits sans abîmer la chair. 1940, O. C. Pelletier, Mémoires, souvenirs de famille et récits, p. 176.

Pour la traite [avec les Autochtones], un seul ustensile qui compte pour 4 ou 5 % de la valeur totale des stocks : la « chaudière » ou grand chaudron de cuivre, aisément transportable, qui dès les premiers contacts avec les Européens a transformé les techniques traditionnelles de cuisson. 1974, L. Dechêne, Habitants et marchands de Montréal au XVIIe siècle, p. 156.

VieuxChaudière à thé : récipient dans lequel on fait bouillir le thé ou servant à le transporter; théière.

   bouilloire (sens I.1).

Une vente des articles ci‑dessus bien connus, aura lieu mercredi prochain, le 6 novembre, […] rue StPaul, à deux heures de l’après-midi [...] : Poêles de goût, de cuisine et autres [/] Fourneaux de camp, Réfrigérants et Tourtières [/] Cendriers, etc. [/] Chaudières à thé, Poêlons et Conduits à eau. 1850, Le Canadien, Québec, 30 octobre, p. [3] (annonce).

Chaudière à mitraille, en mitraillepour mitraille ou propre à mitraille : chaudière hors service, qui n’est bonne qu’à réduire en petits fragments pour refonte ou pour charger les canons (XVIIe-XVIIIe s.).

[…] trois vielle chaudiere en mitraille ajugée a la dame Mesnage vingt et une livres dix sols […]. 1717, Procès-verbal de vente des biens meubles, Papiers relatifs à la succession de Pierre Mesnage, charpentier demeurant à la rivière Saint-Charles (TL5, D1571), BAnQQ, p. 4.

Dans la cuisine s’est trouvé […] Une vieille grande chaudière de cuivre rouge trouée prisée et estimée quinze livres. […] Une vieille moyenne chaudière de cuivre rouge propre à mitraille prisée et estimée huit livres. 1726, P.‑G. Roy (éd.), Inventaire des testaments, donations et inventaires du Régime français conservés aux Archives judiciaires de Québec, 1941, vol. 3, p. 191‑192.

(Ancienn., dans des appellations de récipients servant à chauffer diverses substances).

 Chaudière à brasser de la bière, chaudière à brasserie, dans laquelle on fait chauffer le brassin.

Pour lors tous nos sauvages s’en retournere[n]t fort saouls & remplis de viandes, ayant fait faire la cuisine en une chaudiere à brasser de la biere, qui tenoit prés d’un tonneau. 1632, Les voyages de la Nouvelle France occidentale, dicte Canada, faits par le Sr de Champlain, 2e partie, p. 37.

 Chaudière à brai, servant à faire chauffer le brai.

Louis Bruseau, accusé d’avoir volé une hache, une chaudiére à bré [= brai], une doloire, et une tille, à bord d’une goelette […]. 1766, La Gazette de Québec, 11 août, p. [3].

 Chaudière à potasse, servant à faire chauffer l’eau chargée de cendres dans le processus de fabrication de la potasse.

Pour la lessive de potasse il faut se procurer de bonnes cuves étanches, capables de contenir de dix à douze minots de cendre. […] On mettra la lessive dans la chaudière à potasse à mesure qu’elle sortira des cuves pour la faire bouillir ou réduire. 1865, Revue agricole, manufacturière, commerciale et de colonisation, janvier, p. 137.

 Chaudière à sucre, dans laquelle on faisait bouillir l’eau d’érable.

Rem.Peut se dire aussi du seau dans lequel on recueille l’eau d’érable (voir sous III).

   chaudron (sens 3).

À vendre par le Soussigné – 12,000 planches de Kamouraska […], Chaudières à Sucre, de Batiscan, Essence réelle d’Epinette, comme à l’ordinaire. 1813, La Gazette de Québec, 28 octobre, p. [4] (annonce).

Ont costamment [sic] en mains une grande variété de Poeles Simples et Doubles, Poeles de Cuisine, Charrues, Chaudières à sucre, Chaudrons à soupe, Bombe […] 1881, Le Canadien, Québec, 16 mars, p. 2 (annonce).

(Dans une appellation ancienne relative à une coutume autochtone).

 Chaudière de guerre, festin qu’on préparait en collaboration et au cours duquel on invitait les convives à participer à une guerre.

Rem.Attesté depuis de la deuxième moitié du XVIIe s. jusqu’au début du XVIIIe s., puis chez les historiens, (p. ex. J. B. A. Ferland, Cours d’histoire du Canada, 1861, p. 429 : Le troisième [point] était une invitation de mettre des présents dans la chaudière de guerre, c’est-à-dire de fournir aux dépenses communes de la confédération.). 

Premierement la chaudiere de guerre, comme ils l’appellent, est sur le feu dés l’Automne, afin que tous les Alliez y puissent mettre quelque bon morceau, qui cuise tout l’Hyver : c’est à dire, afin qu’ils contribuent à l’entreprise qu’ils premeditent. 1655-1656, The Jesuit Relations and Allied Documents,  vol. 42, p. 170.

 Fig. Dresser, lever, pendre la chaudière (de guerre) : recruter les guerriers, organiser l’expédition. Fig. Renverser la chaudière de guerre : arrêter les hostilités.

La façon qu’ils font les levées, la voicy : Un Capitaine fait festin, (on appelle cela pendre la Chaudiere) il invite à son festin tous les jeunes gens de son bourg, il leur déclare qu’il a dessein d’aller en guerre pour vanger la mort d’un tel ou d’une telle : il exhorte ceux qui sont de ses amis de l’accompagner […]. 1664, P. Boucher, Histoire veritable et naturelle, p. 118‑119.

NOTICE ENCYCLOPÉDIQUE

Le mot chaudière a été employé jusqu’au XXe siècle en parlant de l’ustensile de cuisson. La chaudière pouvait être suspendue à une crémaillère ou être utilisée avec un trépied. Dès les premiers contacts entre les Français et les Premières Nations, cet ustensile a été, avec la couverte et la hache, un objet très recherché par ces derniers. La chaudière a modifié complètement les habitudes des Autochtones qui, jusque-là, se servaient, pour chauffer l’eau ou les aliments, de contenants en écorce ou en terre cuite dans lesquels ils jetaient des pierres brûlantes. Chez certains groupes autochtones, la chaudière figurait parfois en bonne place parmi les objets qu’on enterrait avec le défunt pour lui servir dans son existence future.

Sources : S. de Champlain (1613), Les Voyages du Sieur de Champlain, 1re partie, p. 195; N. Genêt et autres (1974), Les objets familiers de nos ancêtres, p. 81‑82; RJ 4 (1626), p. 200 (sépultures autochtones); VézGloss 522‑523.

2

VieuxFaire chaudière (parfois faire la chaudière). (Dans un contexte de vie en forêt, en pleine nature). Faire une pause pour prendre un repas; prendre un repas chaud.

Faire chaudière deux fois par jour.

Faire chaudière à part : préparer son propre repas, ne pas partager un repas avec d’autres.

Rem.L’expression faire chaudière était encore connue des trappeurs et coureurs de bois au Québec dans les années 1950.

Nous cabanasmes assez proche d’eux, & fismes chaudiere à la Huronne, mais je ne pû encor’ manger de leur Sagamité pour ce coup, pour n’y estre pas accoutumé, & me fallut ainsi coucher sans souper, car ils avoient aussi mangé en chemin un petit sac de biscuit de mer que j’avois pris aux barques, pensant qu’il me deust durer jusques aux Hurons, mais ils n’y laisserent rien de reste pour le lendemain, tant ils le trouverent bon. 1632, G. Sagard, Le grand voyage du pays des Hurons, p. 62‑63.

Le P. Joseph, pareillement, après s’etre rendu, avec toutes les peines inseparables d’une navigation & d’une marche aussy difficile qu’est celle de faire cinq ou six cents lieuës en un canot d’ecorce parmy des bouillons, des courants & des chutes d’eau continuelles, parmy les incommodités indicibles des moustiques qui se rencontrent le soir & le matin dans les bois où l’on arreste pour faire la chaudière & prendre son repos à plate terre, […] il se fit faire […] une petite cabane d’ecorce soutenue de quelques perches fichées en terre où il passa son hyver vaquant à ses exercices spirituels […]. 1689, S. Le Tac, Histoire chronologique de la Nouvelle France ou Canada depuis sa découverte, p. 95‑96.

Nous étions partis dans le temps des plus grandes eaux ; le fleuve avait monté à son ordinaire plus de quarante pieds : presque tout le pays est terre basse, et par conséquent il était inondé. Ainsi nous étions exposés à ne point trouver de cabanage, c’est-à-dire, de terre pour faire chaudière et pour coucher. 1737, The Jesuit Relations and Allied Documents, vol. 67, p. 286.

Je tirai du fond du canot un moccaron [ensemble de quatre petits barils attachés les uns aux autres] de rum pur : je lui mis entre les mains en lui disant d’aller porter cela à nos camarades, qu’ils prissent un coup en m’attendant, que nous allions faire chaudière. Il partit et me jetta une belle loutre qu’il avoit dans son canot. 1830 env., L.‑P. Cormier (éd.), Jean‑Baptiste Perrault, marchand voyageur, 1978, p. 86.

La première chose à faire était d’y allumer un bon feu, et Alexis s’y entendait à cette besogne. […] – Ah! Père, je suis bien content de faire chaudière, dit Alexis. (Cette expression employée par les Sauvages et les Métis signifie camper dans un endroit où l’on peut allumer du feu et faire un dîner chaud.) 1893, A.‑B. Routhier, De Québec à Victoria. p. 214‑215.

Un deuxième soir, les hommes s’en allèrent encore aux pièges. Il ne restait plus, au campement, que quelques poissons pourris que la vermine achevait de dévorer. On revint, le lendemain matin, avec une gelinotte qu’un homme avait tuée d’un bâton habilement lancé... Faudra-t-il, mon Dieu, faire « chaudière » avec les peaux qui vous protègent du froid et dans lesquelles vous dormez; les disputer à la vermine, elles aussi? 1932, D. Potvin, La robe noire, p. 100.

Nous nous arrêterons là un jour pour faire chaudière, et nous écouterons les belles paroles d’un capitaine de ce pays. 1975, F.‑A. Savard, Discours, p. 152.

DisparuFaire, mettre chaudière haute : faire un bon festin.

Le lendemain un Sauvage qui remontait avec nous, mit pied à terre pour aller à la chasse; nous continuâmes notre route; nous n’eûmes pas fait une demi-lieue, qu’il parut sur le rivage avec un chevreuil sur les épaules; nous cabanâmes sur la première batture pour faire sécher nos hardes et pour faire chaudière haute. Ces repas que l’on fait après une bonne chasse, sont tout-à-fait à la sauvage; rien n’est plus plaisant […]. 1727The Jesuit Relations and Allied Documents, vol. 67, p. 314.

DisparuMettre à la chaudière : faire chauffer, faire cuire.

[…] la viande [du castor] demeure deux jours sur les perches à la fumée, avant que de la mettre à la chaudière. 1691, Chr. Le Clercq, Nouvelle relation de la Gaspésie, p. 358.

(Expression). VieuxFaire chaudière ensemble : être marié, se marier.

Rem.Relevé dans Clapin 352.

 Par anal.Travailler en collaboration (avec d’autres).

Par quel hasard une correspondance de St. Louis de Kamouraska signé [sic] Vidi dans le Canadien, signale-t-il la visite de l’honnorable [sic] Chabat et F. Lemieux […] et a omis les noms des autres messieurs? Ces derniers auraient-ils cessé de faire chaudière ensemble, seulement à Kamouraska […]. M. Vidi devait-il oublier de mentionner les noms des messieurs Baby, Gourdeau et Gauvreau, compagnons de voyage d’une exploration jusqu’au Métis pour des travaux publics? 1854, Le Journal de Québec, 19 janvier, p. [2].

3

Grand récipient fermé contenant de l’eau que l’on fait chauffer pour produire de la vapeur servant à divers usages (chauffage, mouvement mécanique, etc.); (en partic., par méton.) appareil de chauffage central.

Chaudière à charbon, au mazout, au bois. Chaudière à vapeur. Chaudière de locomotive. Par ext. Chaudière électrique.

Rem.Emploi qui est celui du français de référence; il est parfois perçu au Québec comme inadéquat pour parler d’appareils de chauffage autres que ceux qui produisent de la vapeur ou de l’eau chaude.

   boiler (sens 2); bouilleur (sens 2); bouilloire (sens II); fournaise (sens 2).

Le fond de ce procédé consiste donc à précipiter instantanément le carbonate de chaux contenu dans l’eau, de façon à l’avoir en suspension au lieu de le laisser se déposer peu à peu et adhérer aux parois des chaudières. Bien que ce dépôt pulvérulent en suspension soit inoffensif, il est bon, néanmoins, de l’éliminer de temps à autre pour maintenir la pureté constante dans les chaudières. 1870, La Minerve, Montréal, 14 mars, p. [3].

M. St. Charles était employé à la manufacture de fer de Corniug & Co à Troy, et chargé de remplir d’eau l’une des immenses bouilloires de l’établissement. Lundi matin, vers 7 heures, cette chaudière fit explosion, détruisant la bâtisse et tuant du coup le malheureux St. Charles dont le corps fut retrouvé quelque temps après sous les débris. 1879, Le Nord, Saint-Jérôme, 9 janvier, p. [2‑3].

La station aux bouilloires est actuellement en meilleure condition qu’en aucun temps depuis que nous l’avons pris [sic] sous notre direction. Une seule chaudière est hors de service, et nous travaillons à cette chaudière qui a besoin de nouveaux tubes. 1920, Le Devoir, Montréal, 12 janvier, p. 4.

Homme assez âgé, très recommandé, parlant anglais, français, pouvant chauffer chaudière à vapeur, toutes fournaises et faire ouvrage général […]. 1930, La Presse, Montréal, 14 janvier, p. 14 (annonce).

Sous ses pieds, une grille de cuivre laissait filtrer la chaude haleine des chaudières. 1970, M. Doré, Le billard sur la neige, p. 84.

Cette initiative consiste en l’installation d’une chaudière à vapeur alimentée aux granules qui remplacera une chaudière au mazout lourd. Des chaudières aux granules seront aussi placées dans des édifices connexes à la place de chaudières au mazout léger. 2014, L’Éclaireur‑Progrès (site Web), Saint‑Georges, 11 juillet.

(Ancienn.). Braséro.

Il y avoit en outre deux grandes chaudieres fournies du magazin pleines de feu pour eschaufer la chapelle; […] on avoit donné ordre de les oster apres la messe, mais cela ayant esté negligé le feu prit la nuit au plancher qui estoit au dessoubs de l’une des chaudieres dans laquelle il n’y avoit pas au fond assez de cendre [...]. 1645, The Jesuit Relations and Allied Documents, vol. 27, p. 114.

Rem.Ce mode de chauffage était employé particulièrement dans les églises (voir M. Moussette, Le chauffage domestique au Canada, p. 48‑49).

II

Fig. (Par anal. du sens I.1, par rappel d’une chaudière en ébullition). Cuvette circulaire qui se forme au pied d’une chute ou dans des rapides par l’action de l’eau vive qui tourbillonne.

[…] voicy le saut de la Chaudiere [...] : il est large de plus d’un grand quart de lieuë & demy, il a au travers quantité de petites Isles qui ne sont que rochers aspres & difficiles, […] le tout entre coupé de concavitez & precipices, que ces boüillons & cheutes d’eau de six ou sept brasses, ont faict à succession de temps, & particulierement à un certain endroict, où l’eau tombe de telle impetuosité sur un rocher au milieu de la riviere, qu’il s’y est cavé un large & profond bassin : si bien que l’eau courant là dedans circulairement, y faict de tres-puissans boüillons, qui produisent des grandes fumees du poudrin de l’eau qui s’eslevent en l’air. […] je m’amusois à contempler & considerer toutes ces cheutes d’eau entrer de si grande impetuosité dans ces chaudieres, & en ressortir avec la mesme impetuosité […]. 1632, G. Sagard, Le grand voyage du pays des Hurons, p. 362‑363.

Un jour, dans les chaudières de l’Ottawa, il avait sauvé quatre camarades qui se noyaient, lui-même n’échappant à la mort que par miracle. 1892, L. Fréchette, Baptiste Lachapelle, La Presse, Montréal, 17 décembre, p. [4].

M. Denis Murphy, président de la « Ottawa for boarding Co. », avec des représentants d’Ottawa, va pétitionner le gouvernement pour faire établir un quai sur l’île Victoria, près des chaudières, en prévision de la clôture du Canal Rideau par l’État. 1913, Le Soleil, Québec, 14 avril, p. 1.

À son club, pas loin du lac Pointu, on voit un travail d’érosion merveilleux. Des chaudières immenses, des chaudrons dans la pierre, à quatre-vingts pieds de profondeur, creusés dans le roc vif. 1942, L. Boivin, Dans nos montagnes (Charlevoix), 2e éd., p. 44.

Je préfère pêcher la Montmorency lorsque le niveau de l’eau est plus bas et que le courant est plus calme […]. Les truites se tiennent alors dans les chaudières entre les roches, dans les cirés [endroits où le lit de la rivière se rétrécit] au pied des rapides: elles sont plus faciles à repérer. 1987, Le Soleil, Québec, 17 juillet, p. [B‑1]. 

(Toponymie). Terme bien implanté dans la toponymie québécoise. Rivière Chaudière : nom d’une rivière qui prend sa source dans le lac Mégantic et qui se jette dans le fleuve Saint-Laurent à la hauteur du pont de Québec. Chutes de la Chaudière : nom des chutes qui ont donné le nom à la rivière elle-même, situées à Charny, à environ 3 km de son embouchure sur la rive sud du fleuve. Chaudière-Appalaches : appellation donnée en 1987 à une région administrative englobant six municipalités régionales de comtés riveraines du Saint-Laurent qui s’étendent de Lotbinière à L’Islet et cinq autres de l’intérieur. Voir Commission de toponymie du Québec, Noms et lieux du Québec, 2006, p. 127. 

(Appellations anciennes de lieux situés à l’ouest du Québec). Sault de la Chaudière : désignant une chute dans la rivière Outaouais. Lac de la Chaudière : désignant un lac situé entre les lacs Huron et Érié. Voir BlaisTop 332.

III
1

Cour.Récipient cylindrique ou en forme de tronc de cône, traditionnellement en métal, muni d’une anse et éventuellement d’un couvercle, servant à transporter de l’eau ou autre liquide, ou des matières solides; seau.

Charroyer l’eau à la chaudière. Cueillir des bleuets dans un petit récipient et les transvider dans une chaudière. Par méton. Une chaudière d’eau froide. Une chaudière de framboises. Une chaudière de vingt livres de graisse.

Rem.1. Général. au Québec depuis le Régime français en parlant d’un seau métallique; pour un seau en bois, on utilisait le mot seau, prononcé [sjo] (voir PPQ 36 et 37, Lavoie 610 ; voir Notice Encyclopédique). Chaudière demeure usuel au XXIe siècle, mais seau, qui peut se prononcer encore [sjo] dans la langue familière, peut maintenant s’employer aussi en parlant d’un récipient en métal. 2. Depuis le milieu du XXe siècle, chaudière se dit également d’un seau en plastique.

Celuy qui a songé durant la nuit qu’il se baignoit, des qu’il est levé court aussi tost, & tout nud, à plusieurs cabanes : en chacune desquelles il se fait jetter sur le corps une chaudiere pleine d’eau, quelque grand froid qu’il fasse. 1669‑1670The Jesuit Relations and Allied Documents, vol. 54, p. 96 et 98.

Seiziesmement, tous les propriétaires des maisons tant de la haute que basse ville seront tenus de faire mettre de deux en deux maisons une eschelle apuyée sur le toict de l’un d’icelles, afin qu’on puisse monter sur les combles et les abatre si besoin est en cas d’incendie. Dix septiesmement, au premier coup de cloche chaque habitant sortira de sa maison pour se rendre au lieu où le feu sera indiqué, chargé d’un seau ou d’une chaudière pleine d’eau. 1673, P.‑G. Roy (éd.), Règlement de police pour la ville de Québec faits par M. de Frontenac, Ordonnances et commissions, etc., etc., des gouverneurs et intendants de la Nouvelle-France, 1639‑1706, t. 1, 1924, p. 136‑137.

Un jeune enfant du nom de Lavergne s’est noyé à St. Sévère le 27 du courant en voulan[t] tirer de l’eau d[’]un puits avec une petite chaudière dont il avait passé l’anse dans un crochet de bois. Il paraît qu’il est tombé en se penchant pour y descendre sa petite chaudière. 1867, La Gazette de Joliette, 1er août, p. 3.

Alors pendant que j’étais dans le bois, la mère s’est mise à voyager à la rivière avec une chaudière dans chaque main [...] jusqu’à ce qu’elle ait eu fini de remplir un quart, et quand le quart était plein, elle le chargeait sur une brouette et elle s’en allait le vider dans la grande cuve dans le clos des vaches, à plus de trois cents verges de la maison, au pied du cran. 1916, L. Hémon, Maria Chapdelaine, p. 225.

Elle dit : « Venez-vous aux fraises? » Ils ont tous pris leurs petites chaudières, ils ont pris leurs petits chapeaux de paille, leurs petits sabots de bois, puis ils ont tout embarqué, puis ils ont parti. […] Ils avaient hâte de remplir leurs petites chaudières pour montrer qu’ils étaient capables de ramasser des fraises pour leur maman puis pour eux autres. 1971, Saint-Joseph (Beauce), AFEUL, D. Olivier 84 (âge de l’informatrice : n. d.).

C’est l’été et à l’heure de la traite je me promène sur le petit trottoir, au centre de l’allée des vaches. […] Mais j’aime bien écouter le bruit mat du jet de lait qui tombe dans la « chéyére » (seau), créant une couche de mousse qui se gonfle jusqu’au bord du récipient. Le lait chaud c’est la santé, la vie, la richesse. 1995, R. Fournier, Les sirènes du Saint‑Laurent, Le Soleil, Québec, 22 septembre, p. C9.

Entièrement sans paroles, cette introduction de la danse dans le théâtre est intéressante. Dans cette séquence où les personnages s’aspergent d’eau et se mettent la tête ou les pieds dans des seaux, la salle croule de rire : rien ne réjouit plus les enfants qu’une chaudière d’eau balancée au visage de quelqu’un, et les deux interprètes s’en donnent à cœur joie. 2012, J. Lapointe, La Presse, Montréal, 17 mai, arts, p. 8.

Ils avaient des chaudières de cinq gallons pleines de farine de sarrasin prête pour faire de la galette […]. 2018, L’Écho de Maskinongé (site Web), Trois-Rivières, 29 septembre. 

(Dans des appellations désignant des contenants à usage domestique).

 (Petite) chaudière à boire : récipient individuel pour boire (XVIIe‑XVIIIe s.). 

 VieuxDans une maison ou un milieu de travail, dans une classe, grand récipient d’eau dans lequel on puisait avec une tasse.

Une petite chaudière de cuivre jaune à boire. Une petite chaudière à boire contenant environ trois roquilles [= un peu moins d’une chopine].

Les bûcherons lassés sont revenus au camp, [/] Et se lavent, à même un demi-tonneau sale, [/] Qui, près de la chaudière à boire et la timbale [/] Juche sur un trépied verdâtre et trébuchant. 1930, Alfred DesRochers, Le souper, À l’ombre de l’Orford, p. 67.

Rem.À partir de 1837 (Ph. Aubert de Gaspé (fils), L’influence d’un livre), seau à boire est bien attesté aussi en parlant d’un grand récipient d’eau à usage commun. 

 Vieux(Petite) chaudière à dîner : récipient individuel avec couvercle dans lequel les travailleurs et les écoliers apportent leur repas.

Elle attira l’attention de son compagnon […] sur l’armée de travailleurs, qui, une petite chaudière à dîner à la main, montaient le long de cette rampe si difficile autrefois […]. 1893, D. Howells, Une rencontre. Roman de deux touristes sur le Saint‑Laurent et le Saguenay, trad. par L. Fréchette, p. 95.

Ce n’est pas le pauvre ouvrier qui part le matin avec sa chaudière à dîner ou le chômeur qui crève de faim qui vont acheter dans les gros magasins de l’ouest […]. 1937, L’Autorité, Montréal, 24 décembre, p. 4.     

Rem.On trouve aussi, avec le même sens : petite chaudière (ci-après), chaudière d’ouvrier, chaudière d’école et chaudière à lunch (voir notam. GeoffrZigz 2, p. 90; GPFC, s.v. chaudière, sens 4). 

 VieuxPetite chaudière : Syn. de chaudière à dîner.

Ici Bénoni ôta le couvercle de sa petite chaudière et commença à manger son lunch, composé d’un chignon [= quignon] de pain bis, d’un morceau de tourquière et d’une pomme fameuse. 1879, Le Vrai Canard, Montréal, 20 décembre, p. 2.

Entre les coffres-forts des trusts et les « petites chaudières [»] des ouvriers, mon choix est fait depuis longtemps. J’ai le droit et le devoir de le dire pour le bon renom de l’Église dans la classe pauvre, car c’est celui de tous les prêtres. 1935, E. Lavergne, Le Guide, Sainte‑Marie (Beauce), 25 décembre, p. [1].

(Dans des appellations relatives à la civilisation traditionnelle). 

 Chaudière à eau ou chaudière à l’eau, placée à un endroit commode, dans la maison ou à l’extérieur, et dans laquelle on puisait avec une tasse pour boire.

Ce lot comprend : Plats à vaisselle, marmite, 8 pintes; bain-marie, 2 pintes; bouilloire, 5 pintes; théière, 8 tasses; cafetière, 8 tasses; chaudière à eau, 10 pintes; rôtissoire ronde, marmite à patates (4 ou 6 pintes) avec couvercle de sûreté. 1930, La Presse, Montréal, 17 novembre, p. 30 (annonce).

 Chaudière à lait ou chaudière au lait, dont on se sert pour traire les vaches.

Il [le jardin] était enclos, à cause des bêtes qu’on laissait, le soir, ruminer autour des bâtiments tout proches. Dans la clôture, le puits, où dormait l’eau fraîche, arrondissait sa margelle de pierre et dressait, comme une vergue, sa brimbale. Près de la barrière, deux piquets, plus hauts que les autres, étaient coiffés des chaudières au lait renversées, et qui s’égouttaient […]. 1918, A. Rivard, Chez nos gens, p. 53.

Rem.Chaudière, en parlant d’un seau métallique, a servi à former de nombreuses autres locutions, dont : chaudière d’aisances et chaudière de nuit, chaudière à boucane, chaudière à cendre, chaudière à charbon, chaudière à soupe, chaudière à vache, chaudière à vidanges, etc. 

(Expression). À la chaudière, à pleine chaudière : en grande quantité.

Le printemps suivant, les vaches donnaient du lait à pleine chaudière. 1936, F. Bélanger, Mémoires d’un cultivateur, p. 18.

 Chaudiérée n. f. Contenu d’une chaudière.

Qu’est ce que tu veux dire, scélérat? Parle, ou je te jette une chaudiérée d’eau bouillante sur le museau, infâme vagabond! 1892, L. Fréchette, Originaux et détraqués, p. 244.

Grande quantité.

Tante Délia y accumulait [dans le salon] des tourtières, des chaudiérées de beignes dorées et croustillantes [sic] […]. 1975, A. Tessier, Souvenirs en vrac, p. 33. 

À la chaudiérée : en grande quantité.

Par exagér. Pleurer à grosses chaudiérées.

NOTICE ENCYCLOPÉDIQUE

L’opposition entre chaudière « contenant en métal » et seau « contenant en bois », paraît avoir eu cours dès le XVIIe s. Les énumérations de contenants, dans les inventaires de biens, suggèrent en tout cas que les deux mots ne se disaient pas de la même réalité, comme dans le passage suivant où les substantifs paraissent tous référer à des contenants pour liquides : Deux cuvettes, une cuve, quatre seaux, deux chaudières, trois baquets. (Saint-Anselme (Dorchester), BAnQQ, greffe J.‑C. Bélanger, 8 novembre 1842, p. 5). Cette opposition est soulignée par L.‑Ph. Geoffrion en 1925 : « Dans nos parlers populaires, nous ne conservons le nom de seau qu’aux seuls seaux en bois, en toile, ou en fibre comprimée. Les seaux en métal sont presque toujours appelés chaudières. »

Source : L.P. Geoffrion (1925), Zigzags autour de nos parlers, t. 2, p. 96.

2

(Spécial.) Contenant généralement en tronc de cône, sans anse, mais muni d’un couvercle, qu’on accroche au chalumeau pour recueillir l’eau d’érable.

Chaudière à sucre (dont le sens peut être ambigu, puisqu’il s’est dit d’abord en parlant du récipient dans lequel on fait bouillir l’eau d’érable, voir sous sens I.1). Chaudière à sève.

Voici les moyens employés par M. Marquis pour faire d’aussi beau sucre. Il recueille l’eau des érables dans de petites chaudières de fer blanc. Il fait bouillir cette eau avec la plus grande précaution. 1867, La Gazette de Joliette, 14 février. p. [2].

Comme on ne fait point du sucre d’érable en France, on n’y a encore adopté aucun mot pour désigner le vase dont on se sert pour recueillir la sève. Autrefois, dans notre pays, ces vases étaient en bois creusé, et portaient le nom d’auge ou d’auget. Maintenant que ces vases se fabriquent en ferblanc, chacun les nomme à son goût. Je crois cependant que le nom de chaudière est le plus communément usité. 1895, L. Fréchette, La Patrie, Montréal, 16 février, p. [2].

À maints endroits nous avons employé le mot chaudière à sève, chaudière pour récolter la sève, etc., tandis qu’il aurait été plus français de mettre seau à sève, récipient, etc. Nous nous sommes servi du mot chaudière parce que chez nos cultivateurs on l’emploie familièrement et que l’on désigne plutôt par le mot seau, un récipient en bois. Une chaudière, n’est en réalité qu’un vase pour faire chauffer un liquide. On voudra donc en prendre note. 1927, C. Vaillancourt, Nos érablières : pourquoi les conserver, comment les exploiter, 2e éd., p. 76.

Après s’être régalés tous ensemble à la grande table de la cabane, de sirop, de trempette, de tire et de sucre, les jeunesses se dispersèrent dans le bois. Mimi et Jean marchaient à l’aventure parmi les grands arbres aux troncs rugueux garnis de petites chaudières, dans lesquelles coulait, goutte à goutte, la claire et délicieuse eau d’érable. 1940, Maxine [pseud. de M.‑C.‑A. Bouchette], Mimi, Almanach du peuple Beauchemin, 1940, p. 135.

D’abord, je dirai que c’était très différent à ce qui se passe aujourd’hui. D’abord, pour les chaudières, on prenait un sapin d’environ dix pouces de diamètre, on le fendait en deux avec une hache, on le creusait à la tille, et ensuite de ça, on plaçait ce petit auge près de l’érable et avec une gouge, on entaillait l’érable, c’est-à-dire un morceau de fer demi-rond qu’on faisait une entaille sur l’érable, et ensuite, on plaçait un petit auge de même forme que la gouge dans le tronc de l’érable, et c’est ce qui donnait la sève qui tombait goutte par goutte dans le petit auge fait de sapin. 1970, Saint-Étienne-de-Bolton, AFEUL, G. Dulong 112 (âge de l’informateur : 75 ans).

L’utilisation du système de collecte [de l’eau d’érable] sous vide a de multiples avantages. Les heures de travail par livre produite sont diminuées et ce dans des conditions plus faciles; la main d’œuvre elle-même est réduite de plus de 50 %. Fait important, on dit maintenant, après de nombreuses études, que la qualité du sirop en est augmentée; l’eau d’érable ne subit plus les intempéries et les risques de contamination sont amoindris. De plus, comme l’eau ne reste pas dans les chaudières, elle ne reçoit plus les rayons directs du soleil qui lui donnent une couleur blanchâtre et la rendent plus acide avec un goût plus fort. 1983, P. Beaulne, De feuille en sucre… d’érable, p. 55.

Quoi de plus classique qu’une sortie familiale à la cabane à sucre. On entasse les enfants dans l’auto et on part faire un tour en campagne par un dimanche après-midi ensoleillé. Sitôt arrivés, les enfants réclament de la tire sur la neige qu’ils dévorent goulûment et en redemandent pour se faire répondre : « Mangesen pas trop, tu vas avoir mal au ventre! » Une fois gavés, ils se mettent à courir dans les sentiers de la sucrerie pour être les premiers à goûter « en cachette » à l’eau d’érable en buvant à même la chaudière. Après une heure, on en a assez et on retourne à la maison. 1999, Ch. Thériault, Le Droit, Ottawa-Gatineau, 19 mars, p. 21.

Au milieu de l’après-midi, on est allé recueillir l’eau puisque les chaudières étaient pleines à rebord. Le chaud soleil donnait à la neige ses gros cristaux qui font que les bottes de caoutchouc n’adhèrent plus au sol. Ce qui devait arriver arriva, mes bottes m’ont jetée par terre et j’ai renversé une chaudière d’eau d’érable. « Bon, bon a dit mon copain, c’est pas d’avance! » 2011, La terre de chez nous, Longueuil, 14 avril, p. 31.

Unité de mesure servant à évaluer la capacité de production d’une érablière*.

Une sucrerie de 800 chaudières. Érablière de 3000 chaudières.

   entaille (sens 2).

Histoire

Mot qui dérive du latin caldaria signifiant « récipient de cuisson » (v. FEW 21, 75b; TLF). La prononciation [ʃɔdjɛʀ] était moins répandue dans la population autrefois au Québec, ce que confirme le journal humoristique Le Goglu (Montréal), en 1931 : « chaudière s. f. Façon dont les frais prononcent le mot chéyére. » (27 mars 1931, p. 5). Quelques années auparavant, L.‑Ph. Geoffrion écrivait : « Chez nous, chaudière se prononce souvent chauguiére, chauyére, chaguiére, chayére » (v. GeoffrZigz‑2, p. 98).

I1Depuis 1603 (Champlain). Emploi usuel dans le français de l’époque, encore enregistré sans marque dans le TLF : « Grand récipient généralement en métal qui sert à chauffer, cuire, bouillir » (figure avec la marque « vieux » dans Larousse 1982, avec la mention « anciennt » dans PRobert 2018). Les mots composés avec chaudière sont nombreux dans l’histoire du français, v. par exemple TLF qui relève chaudière à lessive, chaudière de cuisine, de teinturier, de raffineur de sucre, de brasseur de bière; v. aussi Fur 1690; chaudière à brai (Fur 1727, Chambaud 1805). Chaudière à thé, depuis 1833 (Québec, 11 novembre, ASQ, Sém. 127, no 253). Chaudière à mitraille, depuis 1674 (Québec, BAnQQ, greffe P. Vachon, 19 juin). Chaudière à brasser de la bière, depuis 1632 (Champlain), chaudière à brasserie, depuis 1636 (G. Sagard, Histoire du Canada et voyages que les frères mineurs recollects y ont faicts, vol. 2, nouv. éd. par E. Tross, 1866, p. 517). Chaudière à brai, depuis 1680 (Montréal, BAnQN, greffe A. Adhémar, 20 mars, p. 3). Chaudière à potasse, depuis 1770 (La Gazette de Québec, 8 mars, p. 1). Chaudière à sucre, depuis 1813. Chaudière de guerre, depuis 1655‑1656. Chaudière « ustensile de cuisine » demeure en usage en Louisiane (v. DLF : « any cooking pot or kettle, esp. of cast iron »). 2Depuis 1632. Mettre chaudière haute, depuis 1635 (dans RJ 8, p. 94 : […] aussy tost il fait mettre chaudiere haute, appreste un bon festin, convie tout le village […]). Expression issue du langage maritime, v. Fur 1727 : « Chaudiere, en termes de Marine, signifie, Cuisine. Faire chaudiere, c’est, Preparer à manger pour l’équipage. » En 1690, Furetière faisait ce commentaire : « Les Mariniers qui ont pris à la ligne ou au harpon de gros poissons, en font chaudiere, c’est à dire en font festin entre eux. ». V. aussi Littré (s.v., sens 3, « Terme de marine. […] Faire chaudière, faire bonne chère »); Larousse 1866 (s.v. : « Faire chaudière, Faire bombance, dans le langage des marins »). Besch 1847‑1892 apporte un complément qui a trait à une pratique ayant eu cours en Nouvelle-France et dont témoignent les Relations des jésuites : « Parmi les sauvages, Faire chaudière avec les étrangers, Mêler ses viandes avec les leurs, les partager en signe d’amitié ou d’hospitalité, et les manger avec eux. ». V. aussi JalNaut 1848, qui confirme les usages maritimes décrits dans les dictionnaires généraux. L’expression faire chaudière paraît encore vivante en Louisiane dans son sens primitif : « to stop, during a fishing or hunting excursion, in order to prepare a meal » (DLF). Le mot chaudière est passé en anglais nord-américain sous la forme chowder pour désigner un plat qui, selon certains, aurait été inventé par les voyageurs canadiens : « Chowder (Fr. chaudière). A corrupted French word designating a dish of fish, pork, onions and biscuit, invented by the Canadian voyageurs […] and so named from the receptacle in which the savoury mess was compounded. » (ClapAmér 114; v. aussi Craigie et Mathews, s.v. chowder). On ne trouve pourtant aucune mention de ce plat dans la documentation relative aux voyageurs canadiens-français. Il paraît plus plausible que l’emprunt de chaudière par les Anglais ait été effectué plutôt « dans les régions côtières de l’est du Canada », dans le milieu des marins, où « les rapports entre les colons francophones et les colons, soldats, marchands anglophones étaient devenus plus étroits » (v. VézGall 175). Faire chaudière ensemble « être marié, se marier », depuis 1894 (Clapin 352); expression bien attestée également en Louisiane (DLF).  3Depuis 1822 (La Gazette de Québec, 28 octobre, p. [3] : Les articles suivans qui se débarquent du Québec Packet, arrivé de Londres : […] 4 chaudières à vapeur); en français de référence, cet emploi n’est attesté que depuis 1835 (chaudière à vapeur, v. TLF). Au Québec, chaudière se rencontre assez souvent dans la documentation depuis cette époque, surtout en parlant d’un appareil de chauffage central; il a été concurrencé par fournaise à partir des années 1840, et ce dernier est demeuré plus usuel jusqu’à nos jours.

IIDepuis 1613, dans un toponyme (Les Voyages du Sieur de Champlain, 2e partie, p. 46 : En continuant nostre chemin, nous parvinsmes au Saut de la chaudiere). Emploi par analogie du mot au sens I.1. Héritage de France, v. BlaisTop 32 : « Dans son sens géographique, ce substantif est relevé sporadiquement dans les parlers de France. Cp. en picard caudière tourbillon d’eau dans la Somme; dans les parlers de l’Est bassin au bas d’une chute d’eau; en Suisse endroit profond dans un ruisseau; il est en outre fréquent dans la toponymie de ce pays (v. FEW caldaria 21, 75b, 77a, qui signale l’emploi canadien; GPSR). » Le mot a été emprunté en anglais nord-américain sous sa forme traduite kettle, laquelle est attestée dans la toponymie du Canada anglais (v. DictCan, s.v. chaudière et kettle). 

III1Probablement depuis 1613 (Les voyages du Sieur de Champlain, 1re partie, p. 85) : Le 23. dud[it] mois de Juillet, quatre où cinq mariniers estans allés à terre avec quelques chaudieres, pour querir de l’eau douce, qui estoit dedans des dunes de sable, un peu esloignee de nostre barque, quelques sauvages desirans en avoir aucunes, espierent l’heure que nos gens y alloyent […]). Il n’est pas exclu que, dans ce passage, chaudière renvoie au sens premier du mot (ci-dessus I.1), puisque la chaudière pour chauffer pouvait avoir une anse ou deux anneaux, ce qui rendait possible son utilisation pour le transport de l’eau; cela pourrait d’ailleurs expliquer l’origine du sens québécois de « seau ». Ceci dit, ce récipient de cuisine était souvent de grande taille et, dans ce cas, n’aurait pas été facile à manier. La première attestation explicite est celle de 1668 (citée). Chaudière en parlant d’un récipient pour transporter de l’eau est sans doute, malgré tout, à rattacher au parler angevin (v. VerrAnj, s.v. chaudière : « Vase de fer-blanc ou de zinc avec lequel on puise l’eau. – Pour traire les vaches »). L’opposition qu’on a observée au Québec entre chaudière « récipient de métal » et seau « récipient de bois » pourrait aussi suggérer une origine locale du sens de « seau »; comme les deux récipients étaient utilisés pour l’eau, le premier pour la chauffer, le second pour la transporter, le mot chaudière a pu connaître une extension en parlant du seau en métal. En parlant d’un seau métallique, chaudière est général en Acadie mais ne paraît pas connu en Louisiane (v. Mass no 1183, CormAcad; DLF ne relève que siau). Chaudière à boire, depuis 1664 (Beauport, BAnQQ, greffe P. Vachon, 19 août : une grande chaudierre neufe avec une pettite chaudiere a boire); cette locution, très courante anciennement et relevée jusqu’au XXe siècle, confirme l’ancienneté de chaudière en parlant d’un seau en métal. (Petite) chaudière à dîner, depuis 1890 (La Justice, Québec, 29 août, p. [4] : L’irlandais qui portait à la main une petite chaudière à dîner, se voyant aux prises avec ses trois louches adversaires, en asséna un coup dans la face de l’agresseur). Petite chaudière, depuis 1633 (dans RJ 5, p. 164 : Le vin de ceste hostellerie c’est l’eau de neige fonduë dans une petite chaudiere qu’on porte avec soy, si on ne veut manger la neige pour boisson). Chaudière à l’eau, depuis 1887 (L’Évènement, Québec, 5 mai, p. 4 : plats en fer blanc de toutes sortes et grandeurs, chaudières à l’eau et autres). Chaudière à lait, depuis 1881 (Le Journal d’agriculture illustré, Montréal, janvier, p. 192 : chaudière à lait de Fairlamb). Chaudiérée, depuis 1843 (Appendice du troisième volume des journaux de l’Assemblée législative de la Province du Canada, p. R‑3 : chaudiérées d’eau). Héritage de France, v. VerrAnj, s.v. chaudiérée : « le contenu d’une chaudière, ou plutôt d’un seau ». Relevé également en Acadie et en Louisiane (v. Mass no 1184, CormAcad; DLF relève le mot en parlant du contenu du récipient qui sert à chauffer).  2Depuis 1867. Chaudière à sève, depuis 1903 (Le Prix courant, Montréal, 16 janvier, p. 28).

Nouvelle entrée de la deuxième édition

Dernière révision : janvier 2023
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Trésor de la langue française au Québec. (2023). Chaudière. Dictionnaire historique du français québécois (2e éd. rev. et augm.; R. Vézina et C. Poirier, dir.). Université Laval. Consulté le 17 avril 2024.
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