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CHAR [ʃɑʀ]
n. m.

Rem.

1. On trouve aussi une prononciation [ʃɔʀ] (très fam.). 2. Parfois féminin autrefois.

I

Véhicule de transport sur rails.

1

VieilliWagon, voiture de train. 

Un train de chars; un train de sept, de quinze chars. Accoupler, désaccoupler des chars, les attacher, les détacher. Char à, de marchandises. Char à, de fret, destiné au transport en vrac de marchandises. 

Char à, de bagages : fourgon. 

Char de la malle, destiné au transport de la poste. Char (à) plate-forme, découvert et à bords inexistants ou peu élevés. Char à, de passagers, destiné au transport des voyageurs. Char de première, de seconde classe. 

Char à dîner : wagon-restaurant. 

 (En composition; avec ou sans trait d’union). Char-buffet, char-réfectoire, char-restaurant : wagon-restaurant. 

Char-dortoir : wagon-lit. 

Char-fumoir : wagon aménagé en fumoir. 

Char-parloir, char-salon : wagon luxueux, aménagé en salon. 

Char-palaischar-pullmann : wagon de voyageurs aménagé de façon particulièrement luxueuse, confortable. 

Char-observatoire : wagon destiné au transport des touristes. 

Char-glacière, char-réfrigérant, char-réfrigérateur : wagon frigorique.

Nous annonçons avec regret que la chaudière de la machine locomobile, nouvellement placée sur le chemin à lisses [= chemin de fer] de Harlem, a crevé hier après-midi au moment où elle partait avec deux chariots. La chaudière a éclatté [sic] en pièces le long des rochers qui bordent le passage étroit, et un éclat a tué un des passagers assis sur le devant du char qui précédait. 1834, La Gazette de Québec, 5 juillet, p. [1].

Railroad du St. Laurent et de l’Atlantique. - Nous avons été prié de contredire la rumeur, qui origine, personne ne sait de quelle source, répandant que les travaux de ce chemin sont suspendus. Nous apprenons au contraire qu’ils se poursuivent avec une grande activité. On a fait mettre une locomotive sur les lisses, afin de transporter le fer le long de la ligne, lequel sera posé de suite. On a aussi traversé lundi à Longueuil deux chars à marchandises destinés au même objet quant à présent; ils ont été placés immédiatement sur les lisses. 1848, La Minerve, Montréal, 24 août, p. [2].

Les deux trains étaient à peine à deux cents pas l’un de l’autre quand ils s’aperçurent. La collision était inévitable et fut terrible, mais heureusement ne fut fatale qu’aux machines et aux chars, à une exception près. [/] Le Morin a été mis en pièces, et le Montreal considérablement endommagé. Le char à bagage qui suivait le Montreal brisa le Tender[,] ou char attaché à l’engin[,] où est le réservoir d’eau et de bois; le premier char à passagers brisa le char à bagage et passa par-dessus […]. 1852, Le Journal de Québec, 31 janvier, p. [2].

La semaine dernière, le train de la malle, venant de Boston, sur le chemin de fer de Vermont et du Canada, fut jeté hors des lisses, près de Waterbury. Un des chars fut renversé et assez sérieusement brisé, fort heureusement cependant aucun des passagers n’a été grâvement [sic] blessé. 1856, La Patrie, Montréal, 24 mars, p. [3].

Le char-palais que la Compagnie du Pacifique avait généreusement mis à notre disposition était pavoisé, bien illuminé; et, sur une draperie tendue à chaque extrémité, on lisait les mots : episcopal excursion, excursion épiscopale. À l’intérieur[,] une double rangée de pancartes roses, accrochées au plafond comme des pavillons, indiquait les noms des touristes et les compartiments assignés à chacun. 1893, A.‑B. Routhier, De Québec à Victoria, p. 21.

(Acadie). All-aboard!… quelques coups de sifflets… le train s’ébranle et me voilà parti pour St-Damien, laissant derrière moi Lévis, St-Romuald, Chaudière […]. Un jour sombre d’automne amène vite les ténèbres, surtout en novembre où les heures de soleil sont déjà assez ébrêchées [sic]. Aussi mon parti est pris. En philosophe voyageur, je me confine le nez à l’intérieur… du char fumoir. 1918, A. Melanson, Pour la terre, p. 77.

[…] le voyageur quitta l’hôtel pour reprendre le train en direction de Québec et de son village natal. Trois heures plus tard, après une rapide course à travers la paisible contrée « enneigée » de la rive nord du fleuve St-Laurent, dans un confortable et luxueux char-parloir du grand « Canadian Pacific Railway », le convoi modéra son allure puis s’arrêta. 1944, L. Rochefort, Sa marotte, p. 358‑359.

Voisin de chez Fidor habitait un vieux mécanicien à l’emploi des chemins de fer depuis plusieurs années. Son travail consistait à placer les chars de marchandise sur les voies d’évitement […] et à ramasser les chars vides pour les rouler sur une voie spéciale là-bas à la Bostonnais, en dehors de la ville. Une fois par semaine il menait à la Bostonnais un train de wagons vides. 1946, F. Leclerc, Pieds nus dans l’aube, p. 184‑185. 

Pis, il redescendait sur le train. Pis là il commençait à être fatigué, il s’endormait, ça fait qu’il rabat un bed. Y a des beds en haut dans les chars-là. Il rabat un bed puis… pis il se couche dans le bed pis il s’endort. 1953, Saint-Raphaël (Bellechasse), AFEUL, L. Lacourcière  1655 (âge de l’informateur : n. d.).

De Vancouver à Halifax, les ouvriers ont marché sur Ottawa. Ils marchaient en, à pied, il y en a qui marchaient en automobile. Il y en a qui prenaient des chars de fret […]. Dans l’Ouest ils se sont emparés des chars de fret, pis ils voyageaient en fret. Et pis la police a voulu les faire débarquer, jamais, ils ont jamais été capables. 1964 env., Montréal, AFEUL, P. Perrault 1279 (âge de l’informateur : n. d.).

Accident sur la ligne du grand tronc. [/] - Le convoi de chars à fret a éprouvé un accident hier, sur la ligne du Grand Tronc, aux moulins de Méthot. Sept chars chargés sont tombés à côté des lisses et une partie du fret a éprouvé des dommages. Heureusement, personne n’a été blessé. 1967, L’Action, Québec, 13 avril, p. 3.

Char salon buffet sur le convoi de 8.00 a.m. et char dortoir buffet sur le convoi de 8.45 p.m. […]. Pour billets, réserve d’espace, dans les chars dortoir [sic], et toutes informations s’adresser aux agents de la compagnie. 1898, La Presse, Montréal, 6 août, p. 8 (annonce).

Parmi les événements qui marquèrent l’histoire de la paroisse de Compton, il est bon de noter le célèbre déraillement de 1906 où 93 chars de marchandise télescopèrent près de la gare de Compton. 1981, La Tribune, Sherbrooke, 4 septembre, p. A4.

À ce moment-là, le seul moyen de transport valable est le train, aussi répond-il à tous les besoins. Dans cette optique, ne nous surprenons pas de trouver « le char hôpital » ou « le char de velours ». Armand informe : « Les sièges étaient couverts de velours bleu-vert. C’était “le char hôpital”. On le trouvait en avant, derrière le char à bagages, c’était fermé. Vous pouviez vous coucher ou vous asseoir tranquille, c’était un char pour les malades. Les morts, on les embarquait avec les bagages. » 2008, La Société d’histoire de Chute aux Iroquois, Le chemin de fer du Nord, p. 87‑88.

 VieilliChar à bras, à manivelle : draisine.

 RareWagonnet.

La mine comprend quatre ou cinq grandes galeries ou tranchées qui courent dans différentes directions […]; elles sont sillonnées par des lisses de fer sur lesquelles roulent de petits chars à charbon traînés par des chevaux. 1872, J.‑A. Genand, Notes de voyages, p. 19. 

 RareChariot.

[…] elle s’endormait bruyamment [sur son lit d’hôpital]. On la laissait faire, alors, parce que c’était l’heure du petit déjeuner et qu’un ronflement ne dérangeait plus personne au milieu des conversations, des chars de métal poussés sans ménagement par des sœurs grises et des ablutions matinales qui se faisaient partout en chantant et en riant. 1980, M. Tremblay, Thérèse et Pierrette à l’école des Saints-Anges, p. 316. 

2

Par méton., VieilliContenu d’un wagon; mesure, quantité que représente ce contenu.

Un char de chevaux, de bois, de fer. Acheter, vendre de la marchandise au char. 

Importations par la Compagnie du Chemin de Fer de Montréal et New-York. [titre] Dépôt de la rue Bonaventure. […] M. Bell, Ml., 1 char de Patates. 1856, Le Pays, Montréal, 17 mai, p. [3] (annonce).

Le soussigné vient de recevoir du Haut-Canada et offre en vente 1,300 minots de sarrasin pour la semence. En outre un char de patates de choix qu’il vendra par lots convenables au besoin des acheteurs. 1867, Le Franco-canadien, Saint-Jean d’Iberville, 7 juin, p. [3] (annonce).

Le Soussigné a reçu instruction de Mr. J. Boyte, Agent du Grand Tronc, à Ste. Angèle, de vendre sur les lieux, un char complet de madriers et planches en merisiers le Lundi 15 avril à 11 heures a.m. Il y a eu erreur dans la consignation de ce char, mes instructions sont de faire la vente sans réserve. 1878, Le Journal des Trois-Rivières, 8 avril, p. [3].

Le Demandeur […] avait poursuivi les Défendeurs de ce que les dits Défendeurs, après avoir fait rendre à Arthabaska un char de fleur [farine] qu’ils lui avaient vendu à terme, refusèrent de le lui livrer, à moins qu’il ne payât comptant ou ne fournit cautionnement […]. 1883, Québec, BAnQQ, Cour d’appel (Québec), cause no 7, factum de l’appelant, p. 1. 

J’ai reçu deux chars de beaux jeunes chevaux de 5 à 7 ans, 1000 à 1400 lbs, à vendre garanti sur papier, spécialité de belles juments pour cultivateurs. 1925, Le Soleil, Québec, 16 mai, p. 25 (annonce).

La nouvelle qui depuis quelques jours faisait l’objet des conversations aux veillées était celle de l’arrivée prochaine d’une garde-malade. M. Rolland avait envoyé à Québec « un char de papiers » pour montrer la nécessité urgente d’une garde, et la Commission d’hygiène s’était enfin décidée à en nommer une. 1934, M. Le Franc, La rivière solitaire, p. 90.

Petit à petit, les clôtures de perches disparaissaient. La mode était à la broche. J’ai travaillé à grouper les commandes, afin d’obtenir un meilleur prix. C’était en 1921. Une année qui se ressentait encore de la prospérité de la guerre. J’ai fait venir un char entier. 1950, Fr. Gaudet-Smet, Racines, p. 116‑117.

Une fois, le voyageur de Robin Hood nous avait dit que si nous achetions un char de farine, il pourrait nous vendre une sorte d’engrais d’animaux, très recherché des cultivateurs. Mon mari faisait sa journée à la boulangerie et[,] le soir, il allait vendre l’engrais dans les rangs. 1999, Le Nouvelliste, Trois-Rivières, 10 décembre, p. 29.

En 1908, le voyage de l’Annonciation à Montréal, en première classe, est de 1,90 $ pour un aller simple et 2,85 $ pour un aller-retour. Le transport des biens et instruments aratoires, sur la même distance coûtait 20 ¢ pour 100 livres, 17,50 $ pour un char complet. 2011, S. Guénette, Tchoutchou, tchoutchou… Le train du nord…, La Laurentie, no 10, p. 18.

 Par ext., Fam. Grande quantité. 

Un char de promesses, un char d’amour. Un char d’idées. Avoir un char de dictionnaires.

Si M. F…, qui dit aux jeunes de ne pas écrire sans avoir un char de dictionnaires, avait regardé dans son Larousse seulement avant d’écrire « sanctuaire, » il aurait appris qu’un « sanctuaire » est l’« endroit de l’église où est le maître-autel, » et que « sanctuaire de nos études » n’est pas français […]. 1900, Le Canard, Montréal, 7 juillet, p. 4.

Tu as cent-dix fois raison, humble et suave Violette. Entouré, défendu par mes vaillantes et fidèles abeilles, je ne redoute ni les lions, ni les tigres, ni les ours; car une abeille en colère est, à mes yeux, l’être le plus formidable qui soit sur la terre. Merci pour le char de baisers sucrés, je suce le sucre et te renvoie les baisers. 1904, La Presse, Montréal, 26 novembre, p. 4.

[…] votre bon souvenir à Madeleine de Verchères, à Sagitaire [sic], qui écrit de si jolies lettres; un « char » d’amitié à Jacqueline, à Jean le Téméraire et à tous les cousins et cousines. Je n’ai pas d’autres correspondants de votre paroisse. 1929, Le Progrès du Saguenay, Chicoutimi, 16 mai, p. 6.

Le candidat conservateur parla dans les deux langues, comme devait du reste le faire un instant plus tard son adversaire […]. M. LeBrun ne vient pas devant le peuple avec un char de promesses; il s’emploiera, s’il est élu, à travailler surtout dans l’intérêt des classes agricole et ouvrière, appuyant toute mesure susceptible de leur venir en aide, qu’elle vienne de Bennett, de King ou de tout autre chef. 1935, Le Journal de Waterloo, 11 octobre, p. 1.

En effet, les plus beaux souvenirs de Timmins me viennent de ces années remplies du feu sacré. Vous comptiez les plus nombreuses sections, les plus vivantes, les mieux organisées avec conseils d’écoles, de paroisses, et même un grand comité central. S’il en est encore ainsi, je me charge de vous apporter un char de compliments. 1951, Le Droit, Ottawa, 12 février, p. 15.

Voilà, j’ai tout dit pour cette semaine; je termine donc en lançant un « paquet de tatas[ »] aux petits bonshommes, un gros char de becs à toutes les demoiselles et dames et une bonne poignée franche aux hommes. En d’autres mots, je souhaite a [sic] tous un Joyeux Noël […]. 1973, T. Lapointe, L’Artisan, Repentigny, 19 décembre, p. 89.

Dehors, beau temps, grand soleil, mais dans notre cerveau un char d’idées pas claires et des questions en masse […]. 1982, J.‑P. Filion, À mes ordres, mon colonel!, p. 203.

 (En mauvaise part). Envoyer un char de bêtises à qqn, lui adresser un tas d’injures. Vulgaireou grossierDonner un char de marde (ou merde) à qqn, le réprimander durement, l’invectiver crûment; faire manger un char de marde (ou merdeà qqn, l’envoyer promener. Par ellipse Mange un char! 

Quelques querelles ont été vidées par personnes interposées. Quelques tempéraments se sont manifestés. Une autre preuve de la bêtise humaine a été faite. On a tout simplement envie de dire à tout ce beau monde d’aller au diable et d’en manger un char. 1963, G. Godin, Le Nouvelliste, Trois-Rivières, 9 février, p. 14.

Mais les deux hommes préféraient plutôt en rire. « Il ne s’est rien produit de grave, a dit Bester. On s’est parlé dans la face, un point c’est tout. » Quant à Kordic, il n’en revenait pas qu’un journaliste torontois ait écrit qu’il avait cassé la mâchoire de Bester. « Il y en a qui n’ont vraiment rien à écrire. Je lui ai simplement dit de manger un char de m... et il n’a pas aimé ça. » 1990, Le Soleil, Québec, 28 février, p. S2.

Comme d’habitude, j’étais pressée, énervée, débordée, et comme d’habitude, mon diable de fils traînait de la patte juste pour m’écœurer. Pour sa peine, il a reçu un char de bêtises en plein visage de la part d’une chipie qui s’est immédiatement excusée, mais sans grand succès : Junior était déjà en larmes et convaincu que sa mère était complètement cinglée. 1996, N. Petrowski, La Presse, Montréal, 19 avril, p. A5.

Je rumine des manières de défendre mon bien, pis j’en rumine pas rien qu’une couple, j’en rumine un char. Dis-toi ben que j’ai pas mis la moitié de ma vie à me monter une clientèle comme cordonnier pour la regarder s’en aller sans ruer dans les brancards. Fais-moi confiance, c’est pas ma cordonnerie qui va tomber la première, certain. Pourquoi que je céderais la place quand je suis enraciné dans le patelin comme un vieux chêne depuis vingt ans? 1999, J. Tessier, L’Homme de la rivière, p. 126.

Elmire Page venait de lui envoyer au visage une fleur magnifique plantée dans un pot rempli de vase. II fut sur le point de lui dire de manger un char de marde lorsque son regard tomba sur le bossu Couët qui avait l’air de se cacher derrière un sapin. 1997 A. Mathieu, Rose et le diable, t. 3, p. 277‑278. 

Méthode Toyota [/] Consiste à traiter les patients à la chaîne, quitte à faire un rappel. Aussi : Donner un char de marde à ceux qui n’ont pas de saines habitudes de vie et qu’on est obligés de soigner. 2010, Le Couac, Montréal, mai, p. 4 (chron. humor.).

- De toute façon, cousin, si tu l’as repoussée ainsi, c’est parce qu’elle n’en valait pas la peine. Alors même si c’est le plus beau cul que j’ai vu, qu’elle aille manger un char de marde. 2017, M. Chaput, La Quête, p. 104.

Est-ce que leurs parents auraient pu les garder à la maison? Oui, mais le 19 septembre dernier, il n’y avait que 427 nouveaux cas [de Covid-19] au Québec. Les enfants qui ont organisé les trois autres partys ont aussi des parents, mais eux n’ont pas reçu un char de bouette. 2020, Infos Laurentides.com, Saint-Jérôme, 14 octobre, p. 7.

 (Par renforcement) loc. Fam.Un char (et) pis une barge : une quantité plus que suffisante, une très grande quantité.

Avoir un char pis (ou et) une barge de qqch. En avoir un char pis (ou et) une barge.

Présentez-vous crânement et dites que vous savez tout faire, que vous avez de l’expérience, qu’il n’y a rien à votre épreuve. Vantez-vous, ne craignez pas, vantez, vantez, il en reste toujours quelque chose. Ayez un char et une barge de recommandations, celle de votre curé d’abord, et ensuite celle de l’échevin de votre quartier. Trouvez l’occasion de faire un compliment bien ou mal tourné à votre futur patron. Un homme intelligent comme vous. 1928, Le Monde ouvrier, Montréal, 29 septembre, p. 1.

Des bons p’tits joueurs de hockey ben tendres, il en a pas un char pis une barge icitte. On a été habitué au « Frappe le premier pis pose les questions après »… 1972, La Patrie, Montréal, 21 septembre, p. 48.

Comme Clotilde a fait chauffer quasiment un char pis une barge d’eau rien que pour ébouillanter le thé, [il] en reste en masse pour la vaisselle. 1973, J.‑M. Poupart, Chère Touffe, c’est plein plein de fautes dans ta lettre d’amour, p. 20.

[…] chus-t’allée chez Marie pour m’acheter d’là p’tite bière d’épinette pis a’m’a dit qu’al’avait toute vendu c’qu’al’avait à vot’mari, monsieur Brassard. Quatre bouteilles. Ça fait que j’me demandais si vous pourreriez pas m’en vendre une… J’pense pas que vous buviez toute ça à vous deux d’icitte lundi… Marie m’a dit qu’a’ en recevrait un char pis une barge, lundi matin, mais c’est trop tard, moé […]. 1978, M. Tremblay, La grosse femme d’à côté est enceinte, p. 232.

Le jeune établissement [muséal] a reçu un char et une barge de critiques pour ses subventions gouvernementales jugées imméritées et ses expositions précédentes trop souvent sans saveurs. 1996, S. Baillargeon, Le Devoir, Montréal, 8 juin, p. B2.

Il circule sur internet des chars et des barges de bêtises et d’incongruités, des tonnes de mensonges et de fabulations. Pour notre plus grand plaisir, nous les amateurs de potins! 2007, A. K. Lepage, La Presse, Montréal, 6 octobre, cahier Cinéma, p. 9.

On en aura eu un char et une barge, en 24 fois les Francos, de ces soirées où, autour d’une chanteuse, on réquisitionne les disponibles et les compatibles et on souhaite que ça boume. 2013, S. Cormier, Le Devoir, Montréal, 26 avril, p. B5.

Je fais des fautes et j’oublie des mots de temps en temps : ouan, Pis? Je suis en congé! :) Et aussi on peut dire que de ce temps-là, des mots, j’en chie un char pis une barge. Alors je ne prends pas le temps de tout relire et je clique sur Send pareil. 2013, M. Schiltz, Ah shit, j’ai pogné le cancer, t. 1, p. 117.

 (Variantes). 

 (Hapax). Une barge pis un char.

– Mais encore comment vous appelez-vous? – Tiens. Nous n’avons pas de nom! – Eh bien! vous n’êtes pas des petits Maheu, parce que les miens en avaient un barge [sic] pis un char. Comme Catherine était partie sur les rimettes. 1920, Le Pays, Montréal, 2 octobre, p. 4. 

 (Par exagération, hapax). Un char, une barge et un camion.

[Le] président du comité du oui « Citoyens pour le choix » croit que la participation des résidants [sic] au vote par anticipation est de bon augure pour la journée de dimanche. « Ça regarde bien. Il y a un char, une barge et un camion plein de gens qui viendront voter! », lance-t-il. 2004, La voix de l’Est, Granby, 16 juin, p. 7.

3

Vieilli(Souvent au pluriel, dans les chars). L’ensemble des wagons tirés par une locomotive; le train, considéré comme moyen ou comme service de transport. 

Prendre les chars. Aller, venir, arriver, partir par les chars, en chars, sur les chars. Attendre les chars. Embarquer dans, sur les chars. Monter dans les chars. Débarquer, descendre des chars. Regarder passer les chars. Billet de chars. Conducteur de chars. Station de, des chars. Se faire frapper, se faire écraser par les chars. 

Pont de, des chars : viaduc réservé au passage des trains. 

(Pour désigner un train à vapeur ou au diesel, par opposition à les petits chars, voir ci-dessous, sens 4). Les gros chars

 Voie ferrée; gare. 

Habiter, rester près des chars, à côté des chars. Aller reconduire, chercher qqn aux chars.

Cependant toutes les personnes qui désirent aller et revenir de St. Jean le même jour, ou qui désirent arriver à Montréal dans l’après-midi, seront à même de le faire. Les Mardi, Jeudi et Samedi. En laissant Montréal, dans le Prince Albert à midi et demi et St. Jean dans les Chars à quatre heures et demi [sic]. 1846, La Minerve, Montréal, 3 août, p. [4].

Ces chers compatriotes! voyez-les partir l’œil morne, l’âme abattue. Le sifflet des chars qui annonce le départ, retentit au fond de leurs cœurs comme un coup de massue qui les écrase. 1880, Z. Lacasse, Une mine produisant l’or et l’argent, p. 10.

C’est quand les échevins nous refusent une bibliothèque publique par crainte de rôtir éternellement dans le noir Tartare, que le Grand Tronc installe une bibliothèque dans ses wagons. Tous les trains seront bientôt pourvus de volumes pour charmer la longueur des voyages. MM. Chaussé et Ricard ne voyageront plus à bord des gros chars du Grand Tronc. 1903, Les Débats, Montréal, 14 juin, p. 4.

Au bon vieux temps on attelait « la Grise » pour entreprendre de longs voyages; les marins couraient des bordées sur les fins voiliers… Aujourd’hui on a les chars, les autos, les dirigeables, et on appelle « ville flottante » un bateau à vapeur… 1919, Fr. DesRoches, « En furetant », p. 154.

Le postillon n’était jamais en retard, excepté dans les tempêtes d’hiver. Non pas que son cheval, toujours le meilleur de la paroisse, restât embourbé dans les bancs de neige, mais les chars ne respectaient pas leur horaire. Et, de la gare au village, on comptait bien deux lieues. 1937, L’Oncle Gaspard, Le dessus du panier, p. 18.

– On te demande si t’as eu vent à Sorel du gros accident? – Quel accident? – Apparence que trente-quelques personnes ont péri dans une explosion à la station des chars du Pacifique, à Montréal. 1945, G. Guèvremont, Le Survenant, p. 112.

Elle devrait prendre les gros chars jusqu’à Dauphin. Là, elle devrait changer de train et il se pouvait qu’elle eût à y attendre celui de Rorketon une demi-journée et peut-être toute une journée. 1950, G. Roy, La Petite Poule d’Eau, p. 63.

Vite, vite, vite, il dit, vous avez plus rien, il dit, que cinq minutes avant le train […]. Ça fait que le gars, pas le temps de passer par les miroirs, ni de se laver, il saute vitement dans les culottes, pogne son suitcase et pis… aux chars. 1950,Les Éboulements (Charlevoix-Est), AFEUL, L. Lacourcière 903 (âge de l’informateur : 55 ans).

Aujourd’hui, là, tout le bois, ça descend par les chars, en partie, ou ben par truck. Ben, pas par truck, c’est plutôt par les chars. Toutes les compagnies, là, le bois de la Colombie [Britannique], là, ça descend toutes par train astheure. 1970, Sainte-Croix (Lotbinière), AFEUL, G. Dulong  127 (âge de l’informateur : 70 ans).

Au printemps de 1864, dès la fonte des neiges, la pierre nécessaire ayant été charroyée par chemins d’hiver, il y a corvée pour bâtir, sur la petite rivière Blanche, le « pont des chars ». Ce chantier est à quatre milles de la maison Bourgeois à Saint-Célestin. Le jeune Louis déserte par deux fois, pour aller voir ce qui se passe à l’autre bout de la paroisse : un vrai pont, pour une voie de chemin de fer. Car les « gros chars » vont venir! 1973, Perspectives, 19 mai, p. 8.

Félix Leclerc sait-il que sa chanson ne sera peut-être plus que le dernier témoignage nous rappelant ce « petit train du Nord » qui, hiver comme été, traversait le paysage montagneux des Laurentides. Ce rêve du curé Labelle, celui des « gros chars » qui aideraient au développement du Nord, s’il a un jour existé, n’est plus. 1987, M. Pariseau, Le Sentier, Saint-Hippolyte, juillet, p. 4.

Avec un musée vraiment surprenant, ils ont fait revivre toute l’histoire de la Quebec Central Railway, soit du début de la construction des voies ferrées reliant Lévis et Sherbrooke à la vallée de la Chaudière, en 1870, en passant par la construction de la gare et du « pont des chars » qui enjambe la rivière Chaudière, celle qui déborde trop souvent, hélas! 2000, La Tribune, Sherbrooke, 19 août, p. F2.

Quelques jours plus tard, le cœur léger, il regardait par la fenêtre de son wagon le paysage défiler devant ses yeux. Depuis La Tuque la même scène lui apparaissait : des lacs bordés d’épinettes plantées sur un terrain relativement plat. C’était son premier voyage à bord des gros chars et il en était venu à la conclusion que, si on se laissait emporter par ces engins, c’était le pays qui vous regardait passer et non l’inverse. 2019, D. Gagné, Le lunétique, Le pays des bonsaïs, p. 103.

 loc. Fig.vieilli(En parlant d’un cheval). Avoir peur des chars : prendre le mors aux dents au moindre bruit. (En parlant de qqn). Ne pas avoir peur des chars : ne pas avoir froid aux yeux.

 Fam.Avoir vu, déjà vu (passer) les chars, les gros chars : n’être pas aussi démuni, aussi inexpérimenté que cela peut paraître, en avoir vu d’autres, bien d’autres. 

Alors, M. Marcotte, soyez prudent, renseignez-vous avant de démentir la vérité. Nous sommes des habitants mais on a déjà vu passer les gros chars.... 1940, L’Étoile du Nord, Joliette, 25 avril, p. [11].

– Je t’assure, ma petite fille, que, dans mon temps, quand on disait de quelqu’un : « Il a déjà vu les chars », ça signifiait gros, pour nous autres de la campagne. Cela voulait dire : « Il est allé à Québec en ville, il est déluré et il n’est pas facile de lui faire de la “broue”[ »]. On l’admirait on l’enviait et on se sentait encore plus vert à côté de lui. 1966, Le Clairon, Saint-Hyacinthe, 22 décembre, p. 31.

 (En parlant d’une femme facile, de mœurs légères). 

Elle est passée en dessous des gros chars! Même les gros chars sont passés sur elle! 

 Fam. Les chars, les gros chars (en contexte négatif). 

 (En fonction attribut, en parlant de qqch.). Ce qu’il y a de mieux, de plus extraordinaire. 

Mon salaire de 1928 était de trente-deux piastres par semaine, (ce n’était pas les gros chars, ça, je suis avec vous pour l’affirmer). Aujourd’hui, j’en gagne tout juste vingt. 1933, Le Canard, Montréal, 20 août, p. 11 (chron. humor).

– Il paraît que l’automobile de M. Robert Côté serait très froide pour les passagers… Des malins qui faisaient partis [sic] de la délégation d’Ottawa disaient : « Pour un entrepreneur en chauffage, c’est pas les gros chars! »… 1955, L’Union des Cantons de l’Est, Arthabaska[ville], 3 février, p. 2.

Le bœuf, quand il devenait assez vieux, ben on le tuait pour le manger, le cheval, on le mangeait pas. Mais c’est venu, pour voyager à Sept-Îles ici, un bœuf, c’est pas les chars […], ça prenait un cheval. 1959, Moisie (Sept-Rivières), AFEUL, G. Landry 232 (âge de l’informateur : 78 ans).

La vie parfois c’est pas les chars. 1977, P. Graveline, Chansons d’icitte, p. 73. 

– Tu sais ma grande nouvelle à moi? reprend Félix. Figure-toi que mon père a finalement un emploi. C’est pas les gros chars, mais c’est un commencement. Ou plutôt un recommencement. Je crois que c’est ça, le pire, pour lui : recommencer. Il recommence avec une autre femme, il recommence avec une nouvelle famille, il recommence avec un nouveau travail, au bas de l’échelle. 1991, M.‑A. Clermont, L’engrenage, p. 174.

À la maison, ils sont à l’étroit. Il a fait son temps, le petit appartement mal isolé, tout en haut du gros édifice. Il est fini le temps des voisins bruyants, il achève en tout cas, du moins c’est ce qu’elle espère. Normal d’avoir envie d’espace quand on se sent grandir. Impression d’habiter une cabane dans un arbre mort, mort parce que dans son quartier, les arbres, c’est pas les gros chars. 2017, É.‑A. Héroux, Mara M., p. 177.

(En parlant de qqn). 

Vous êtes p’t-être un bon avocat, mais comme habitant vous êtes pas les chars. 1929, Le Goglu, Montréal, 18 octobre, p. 1. 

« Ma tante, dit-il, je suis membre d’une puissante organisation à St-Jerôme et ça me prendrait une clochette; ne pourriez-vous pas me prêter cela? » « Pauvre vieux! dit-elle, j’aimerais bien t’accommoder mais c’est ton oncle Pacific (pas les gros chars) qui reste à Gorlot Ponction qui les a toutes. Tu peux aller le voir, il te les prêtera sûrement ». 1952, L’Avenir du Nord, Saint-Jérôme, 16 mai, p. 9.

 (En fonction de compl.). Grand-chose. 

Ça vaut pas les chars! Son mari valait pas les gros chars, n’était bon à rien. Tu connais pas les chars dans la politique! 

Que le cri d’une locomotive déchire l’air de la T.S.F. [= télégraphie sans fil], toutes les pièces radiophoniques ne valent pas les gros chars. 1938, En avant, Saint-Hyacinthe, 16 décembre, p. 2.

– « Tiens!… c’est elle; elle s’en est payé un chapeau!… [/] C’est en plein comme les modèles qui étaient sur « La Presse », samedi dernier… [/] Ça coûte assez cher;… [/] pourtant son mari ne gagne pas « les gros chars » 1944, L’Abeille, mars, p. 201.

 (En fonction adverbiale). Tellement, vraiment. 

Ça marche pas les chars! On s’est pas vu les chars depuis une semaine. 

C’était pas vargeux dans c’temps-là pour gagner sa vie pis le métier de colon payait pas les gros chars. J’ai dû r’tourner aux chanquiers […]. 1943, Cl.‑H. Grignon, « Le père Bougonneux », dans Le Bulletin des agriculteurs, décembre, p. 5. 

4

Vieilli(Général. au pluriel, dans les chars). Voiture de tramway.  L’ensemble des voitures qui composent un tramway; le tramway considéré comme moyen ou comme service de transport. 

Chars urbains. Chars de ville, de rues. Chars à chevaux, tirés par des chevaux. Chars électriques, à trolley. 

(Pour désigner un tramway à trolley ou un train de banlieue circulant sur une ligne électrifiée, par opposition à les gros chars, v. ci-dessus, sens 3). Les petits (ou p’tits) chars.

– Nous voyons par un avis affiché dans les chars, des rues St.-Antoine et Craig, que sur cette ligne les passagers doivent payer en entrant. La raison de cette mesure est qu’il n’y a pas assez de voyageurs sur cette ligne-là pour nécessiter deux employés. 1862, L’Ordre, Montréal, 30 juillet, p. [2].

Les rues qui conduisent aux endroits assignés aux différents départements de l’Exposition [Exposition provinciale de Québec], regorgent de visiteurs qui du reste ont toutes les facilités possibles pour s’y transporter, grâce au grand nombre de chars à chevaux, qui sillonnent maintenant la ville dans toutes les directions. 1865, Le Courrier du Canada, Québec, 2 octobre, p. [2].

M. Antoine Desrochers, marchand-épicier, ayant voulu l’autre jour s’embarquer à bord des chars urbains au Carré Chaboillez, manqua le pied et tomba. La roue du char lui cassa une jambe. 1865, L’Ordre, Montréal, 15 novembre, p. [2].

En traversant la rue, l’imprudente ne vit pas un char urbain, à trois pas d’elle. – Attention! la mère, lui cria le garçon, vous allez vous faire frapper. [/] À ses yeux inexpérimentés s’offrit un curieux spectacle. Deux infortunées pécores, morveuses, l’œil larmoyant, la langue pendante, la carcasse à jour, le poil râpé de coups de fouet, avaient peine à se maintenir en équilibre, et prévenaient les piétons par une clochette suspendue à leur cou maîgrichon [sic]. Les pauvres bêtes tiraient après elles, sur des rails inégaux, une façon de cahute roulante de bohémiens saltimbanques. 1904, R. Girard, Marie Calumet, p. 296.

Si je possédais ce soir le tapis magique des « Mille et une nuits », je me ferais transporter en un instant dans la bonne ville de Québec. […] Un char électrique rapide et confortable m’amènerait ensuite à la porte de la Basilique, dont le noble carillon sonnerait le dernier coup de la Messe de Minuit. 1915, E. Bilodeau, Un Canadien errant…, p. 83‑84.

Pis là, il n’y avait plus de communication, il n’y avait plus de goélette. On est descendu par terre jusqu’à Sainte-Anne, par les petits chars […], les chars étaient électriques dans ce temps-là. 1962, Île aux Coudres (Charlevoix-Ouest), AFEUL, P. Perrault 241 (âge de l’informateur : n. d.).

 Il y avait des lampes à pétrole avant d’avoir le gaz. Moi, j’ai pas eu connaissance [de ça], pareil comme j’ai pas eu connaissance des chars à chevaux. 1964 env., Montréal, AFEUL, P. Perrault 91 (âge de l’informateur : n. d.).

Chaque trimestre ramenait la corvée d’aller toucher les loyers des maisons. […] Pour les maisons de l’Est, cela se passait très bien […]. Mais pour Saint-Henri! Ce quartier excentrique, très éloigné du quartier Saint-Louis, nécessitait un véritable petit voyage. Il fallait emprunter plusieurs tramways, changer « de chars », attendre à des coins de rues. Et l’expédition ne pouvait avoir lieu que le soir parce que les locataires des maisons, ouvriers de filatures et d’usines, n’étaient chez eux qu’à la nuit tombée. 1966, R. de Roquebrune, Quartier Saint-Louis, p. 128‑129.

Il avait un commis qui faisait les commissions. Ça vous coûtait cinq cents pour faire une commission. S’il prenait les petits chars, bien, [il] fallait donner cinq cents de plus, peut-être dix cents. 1975, Sainte-Croix (Lotbinière), AFEUL, R. Désy-Proulx 9 (âge de l’informatrice : n. d.).

Kate a refusé de laisser sa fille à l’orphelinat mais elle ne la voit pas souvent : elle a dû la mettre en pension à Rosemont, chez des cultivateurs. C’est loin, Rosemont, même en p’tits chars. On est en 1913 et c’est encore la banlieue. 1987, Fr. Noël, Myriam première, p. 147. 

Les Montréalais habitaient Outremont et faisaient leurs achats rue Sainte-Catherine. Voilà. [/] Cette singulière vision de Montréal ne fut pas démentie par la venue du féerique tramway doré que certains appelaient pour le différencier des autres « petits chars », le char observatoire. Ces véhicules décapotables dont les rangées de sièges étaient disposées en escaliers comme dans un théâtre étaient peints en jaune pâle avec des dorures partout. 1992, G. Dehaies, Le Devoir, Montréal, 8 août, p. A4.

Les premiers tramways électriques sillonnent les rues de Montréal. Ils remplacent les tramways tirés par des chevaux qui existaient depuis 1861. D’autres villes du Québec adoptent également ce mode de transport en commun, notamment les villes de Québec, de Trois-Rivières et de Sherbrooke. Le plus célèbre des « p’tits chars électriques » est sans doute celui qui, pendant des années, a transporté des milliers de Québécois et Québécoises depuis Québec jusqu’au lieu de pèlerinage de Sainte-Anne-de-Beaupré. 2010, L’Action nationale, vol. C, no 9‑10, p. 129.

Si Québec offre aujourd’hui à ses touristes l’autobus rouge à deux étages, la capitale avait autrefois son « char observatoire ». [/] Il a été inauguré le 18 juin 1910. [/] Il s’agissait d’un wagon comptant six rangées de sièges doubles en paliers. [/] On y montait par un escalier situé à l’arrière. 2018, Le Journal de Québec (site Web), actualité (Québec), 20 mai.

II

Fam.Voiture automobile.

2022, TLFQ, Voiture (« char ») [photo].

Char neuf, usagé. Char automatique, à transmission automatique. Char à (la) mitaine, à transmission manuelle. Embarquer, monter dans un char. Débarquer, descendre d’un char.

Un gars de char(s), une fille de char(s) : amateur, amatrice de voitures automobiles.

Partir son char : mettre en marche le moteur de sa voiture. 

Mener, conduire un char. Parquer, stationner un char, le garer. 

Petit char : petite voiture, dont l’usage est réputé économique. 

Gros char : voiture puissante et souvent luxueuse. 

Char de l’année : voiture du tout dernier modèle. 

Char loué : voiture de location. 

Char de police. Char de course.

 bazoucitron.

 VieilliChar privé : voiture individuelle réservée au transport de son propriétaire ou d’une personne en particulier. 

Chauffeur demandé pour char privé.

Lorsque l’automobile, tel [sic] que nous le [sic] connaissons aujourd’hui, était une invention nouvelle, un écrivain déjà oublié énonça dans un journal de commerce obscur la théorie que « tout bon char coûte à peu près tant par cheval-vapeur ». Bien que cette demi-vérité ait été la cause de la perte de la réputation de maints fabricants, et à beaucoup d’acheteurs, la cause de beaucoup d’argent mal dépensé, elle prévaut encore aujourd’hui. 1907, La Presse, Montréal, 9 mars, p. 17.

Automobile à vendre, une belle automobile Cadillac. 1 cylindre, modèle 1906; une chance exceptionnelle d’acheter un beau char à bon marché. 1908, La Presse, Montréal, 6 juillet, p. 7.

Les automobiles « Studebaker » sont fabriqués [sic] en Canada par la plus puissante et la plus vieille manufacture du genre. La longue expérience des fabricants, leur capacité de production, leur capital, voilà ce qui leur permet d’offrir d’aussi bons chars à si bon marché. 1913, Le Soleil, Québec, 12 février, p. 9 (annonce).

Un jour que je dois aller autographier des disques dans un grand magasin, je trouve les portes de devant bloquées. Quatre rues, noires de monde, pas un char ne peut passer. 1955, F. Leclerc, Moi, mes souliers…, p. 220. 

J’ai dit : « Tu oublies une chose, c’est ta petite Canadienne qui te fait vivre, j’ai dit, depuis que tu es rendu ici. Tu te promènes avec un beau char, pis, j’ai dit, tu changes de char presqu’à tous les ans ». 1963, Montréal, AFEUL, P. Perrault 1115 (âge de l’informatrice : n. d.).

Quand le cosmonaute a posé son engin sur le sol lunaire, une fine poussière s’est élevée. Comme celle que tu soulèves vers moi en décollant ton gros char. 1974, Cl. Des Rochers, J’ai des p’tites nouvelles pour vous autres, p. 21.

Police! dit-il. Votre permis et les papiers du char. […] Posez pas de questions et débarquez du char! 1974, J. Poulin, Faites de beaux rêves, p. 11‑12.

Et, heureusement, je n’ai pas vu le nouveau char de Gaston. Je n’y connais rien en voitures, ça ne m’intéresse pas, et je n’aurais pas su quoi dire. Je reste toujours un peu bête devant une voiture neuve qu’on veut me faire admirer. 1986, M. Tremblay, Le cœur découvert, p. 238. 

Et si on gardait nos autos un ou deux ans de plus? Imaginez l’impact positif sur notre santé financière. Mais non, on veut tout de suite flamber le maximum de notre revenu disponible, parader dans notre beau « char » neuf et laisser l’épargne aux vieux, comme un élément démodé. 2008, Le Devoir, Montréal, 1er août, p. A8 (lettre).

Samedi après-midi, le village était carrément envahi par les « gars et filles de char ». L’odeur dominante était celle des pneus brulés et le son, devinez… Le crissement des pneus sur l’asphalte, le vrooom des moteurs et les clameurs de la foule surexcitée. 2011, L’Éclaireur Progrès, Saint-Georges, 28 juillet, p. 3.

Un hockeyeur professionnel recyclé en directeur général du plus important groupe de concessionnaires automobiles de la région qui confesse à une centaine de personnes qu’il n’est pas « un gars de chars », ça fait sursauter. 2015, Le Nouvelliste, Trois-Rivières, 9 mai, p. 22.

Vos « exploits » boursiers, vos projets de rénovations majeures, votre nouveau char et le taux de roulement dans votre cellier, réservez ça pour le monde que ça pourrait intéresser, en l’occurrence ceux qui ne grattent pas les fonds de tiroir pour payer leur loyer. 2020, D. Germain, Le Journal de Québec (site Web), section opinions, 18 septembre.

III

Char allégorique : véhicule à traction ou motorisé, décoré, construit spécialement pour faire partie d’un défilé organisé à l’occasion d’un carnaval, d’une fête populaire.

Les Canadiens-Français des États-Unis commencèrent à sorganiser en même temps, sous la direction d’un comité […]. On calcule qu’il viendra des États-Unis une cinquantaine de sociétés avec vingt-cinq ou trante [sic] bandes de musique, et qu’il paraîtra dans les rangs de la procession dix ou douze sections organisées ayant chacune leurs insignes, leurs drapeaux, et plusieurs des chars allégoriques. 1874, La Gazette de Sorel, 14 avril, p. [2].

La procession de la St. Jean-Baptiste se formera sur la rue Craig, en face du Champ-de-Mars. […] Les citoyens qui tiennent au succès de notre fête nationale sont priés de décorer ces rues aussi bien que possible. Comme quelques chars allégoriques ont vingt-deux pieds de haut, il faut que les arches et autres décorations qui traverseront les rues aient une hauteur d’un peu plus de vingt-deux pieds au milieu du chemin. 1874, Le Franc-parleur, Montréal, 19 juin, p. 2.

La procession du 24 juin, favorisée par un temps magnifique, se composait de plus de vingt mille personnes. […] Des députations de toutes les villes du Canada s’étaient jointes aux sociétés nationales de Montréal, et la procession qui s’étendait sur un parcours de trois milles, offrait un coup d’œil magique. On comptait cent trente et un drapeaux français, cinquante trois [sic] bannières, trente et un corps de musique et quinze chars allégoriques représentant des sujets empruntés à l’histoire du Canada. 1878, H. Beaugrand, Jeanne la fileuse, p. 256.

Demain, à Montréal, c’est la procession de la St-Jean-Baptiste, rue Sherbrooke, de l’est à l’ouest! […] C’est la fête nationale des Canadiens français! Le dernier char allégorique représente toujours le petit Jean Baptiste tout frisé avec son mouton, lui aussi tout frisé. C’est un honneur pour un enfant d’être choisi. Mais c’est fatigant, des heures de temps à saluer et à sourire. Je n’aime pas ce rôle-là. 1931, S. Monet-Chartrand, dans Ma vie comme rivière, t. 1, 1981, p. [102].

Les festivals et les carnavals avec leurs ornements, leurs masques, leurs bonshommes, leurs chars allégoriques accompagnés de corps de majorettes demeurent des riches moments de création populaire […]. 1975, M. Lessard et H. Marquis, L’art traditionnel au Québec, p. 439.

Julienne apparaît aussitôt dans l’embrasure de sa porte […]. Je la salue sans m’arrêter, courtois comme une duchesse du Carnaval sur son char allégorique, mais elle exige davantage, elle veut une halte complète, un autographe, un baisemain, qui sait. 1993, M. Proulx, Homme invisible à la fenêtre, p. 211. 

Des milliers de personnes se sont trouvé des origines irlandaises, du moins pour quelques heures, samedi, à l’occasion du défilé annuel de la St Patrick qui a tapissé d’un vert irlandais les rues du centre-ville d’Ottawa. Pas moins d’une quarantaine de chars allégoriques et de fanfares se sont rassemblés devant l’hôtel de ville, vers 11 h, pour s’engager sur l’avenue Laurier et la rue Bank jusqu’au parc Lansdowne. 2009, Le Droit, Ottawa-Gatineau, 16 mars, p. 7.

Bien installé sur son char allégorique, Bonhomme a salué la foule alors que s’amorce aujourd’hui la dernière journée du 55e Carnaval de Québec. 2009, Le Soleil, Québec, 15 février, p. 3.

Papa Noël n’était pas seul. Un impressionnant contingent paradait devant lui, soit le plus imposant jamais réuni en cinq décennies. Le défilé était constitué d’une dizaine de fanfares, d’une quinzaine de chars allégoriques et de près de mille figurants, petits et grands. 2019, L’Éveil.com, Saint-Eustache, 4 décembre, p. 8.

Histoire

I1Depuis 1834. D’après l’anglais américain car, attesté notamment dans freight car (d’où char à, de fret), baggage car (d’où char à, de bagages), mail car (d’où char de la malle), platform car (d’où char (à) plate-forme), passenger car (d’où char à, de passagers), dining car (d’où char à dîner), buffet car (d’où char-buffet), restaurant car (d’où char-restaurant), dormitory car (d’où char-dortoir), smoking car (d’où char-fumoir), parlor car (d’où char-parloir), palace car (d’où char-palais), Pullmann car (d’où char-pullmann), observation car (d’où char-observatoire), refrigerating et refrigerator car (d’où char-réfrigérant et char-réfrigérateur) (v. Craigie, Mathews et OED (en ligne) 2024‑06, s.v. car noun1; v. aussi Mathews, s.v. freight, baggage car, mail, platform, passenger car, dining, buffet, restaurant, dormitory, smoking, palace, Pullmann, observation, refrigerating car et refrigerator). Pour désigner un wagon, char a été relevé à quelques reprises en français de France dans la première moitié du XIXs. (v. FEW carrus 2, 426b; P. J. Wexler, La formation du vocabulaire des chemins de fer en France, 1955, p. 26, 82, 118 et 124 notam.); cet emploi, qui découle de char « voiture, en particulier voiture à quatre roues destinée au transport de grosses charges » (attesté en français depuis le Moyen Âge, v. TLF et GLLF), est donc sans lien de filiation directe avec l’emploi canadien. 2Depuis 1856. D’après l’anglais américain car (v. Craigie, Mathews et OED (en ligne) 2024‑06, qui ne signalent cependant pas l’emploi par extension). Au sens de « grande quantité », depuis 1900. (En avoir) un char pis une barge, depuis 1928, mais dès 1920 sous la variante une barge pis un char. Selon une hypothèse avancée par CellPain 250, barge, dans cette expression, désigne « un gros tas, une bonne meule, de foin, de blé en paille, […] de bois ». Bien qu’elle paraisse séduisante, cette hypothèse doit être rejetée. Au Canada, c’est essentiellement dans le domaine acadien qu’on relève le mot barge au sens de « meule de foin près de l’étable » (v. PPQ 835; v. aussi PPQ 836 « mettre en meule » : embarger, mettre en barge, faire une barge, des barges, et LucciAc 216). Il s’agit d’un emploi à rattacher à la racine latine *barga et qui est un héritage des parlers du Centre et de l’Ouest de la France (v. FEW 1 253a, *barga; v. aussi TLF, s.v. barge3). Or, au Québec, c’est surtout mule et mulon qui sont traditionnellement en usage pour désigner une meule de foin (v. PPQ 835 et 836). Dans l’expression québécoise (en avoir) un char pis une barge, il y a tout lieu de croire qu’on a affaire à barge au sens d’« embarcation », mot qui se rattache à la racine latine barca (v. FEW 1 251a, barca). Au Québec, char et barge (« type de bateau à fond plat sans moteur consacré au transport de marchandises ») désignent deux véhicules utilisés dans le transport des marchandises. On en trouve des traces à l’écrit dès la seconde moitié du XIXe s. (v. p. ex. Le Sorelois, Sorel, 17 février 1885, p. [3] : Les commerçants de foin des États-Unis qui voudront m’envoyer des ordres pour le foin seront certains que ces ordres seront remplis immédiatement […], ce qui me met [en] position d’expédier cent tonnes de foin par semaineCe foin est transporté de St. Roch aux chars dans une barge qui m’appartient; v. aussi Le Quotidien, Lévis, 25 septembre 1886, p. [2] : […] les marchands de bois américains sont incapables d’avoir des chars ou des barges pour le transport de leurs bois […]). Ces deux moyens de transport étaient souvent utilisés conjointement : les chars « wagons de train » étaient employés pour le transport terrestre par les chemins de fer, les barges pour le transport maritime par les rivières ou les canaux : Bois de chauffage – Les stocks dans les clos sont restreints; les prix en gros se tiennent fermes. […] Le tout en lots de chars ou par barge, pris en gare ou au quai (L’Étendard, Montréal, 23 août 1889, p. [2]). Étant donné que, par métonymie, tant char que barge peuvent renvoyer respectivement non seulement au contenu d’un wagon ou d’une barge ainsi qu’à la quantité que représente ce contenu, mais qu’ils peuvent également signifier « grande quantité » (on relève cet emploi de barge dès 1899 : à faire une barge de somarsettes [« sorte de saut »] comme un soulaud, dans L. de Montigny, « Une histoire de loup-garou : pour les grands enfants qui commencent mal le carême », La Presse, Montréal, p. 7), on peut déduire que (en avoir) un char pis une barge constitue tout simplement une combinaison, par renforcement de (en avoir) un char et de (en avoir) une barge. Par ailleurs, une expression en avoir une (des) barge(s), de même sens, est aussi attestée dès le début du XXe s. (v. p. ex. H. Roullaud, La Presse, Montréal, 30 décembre 1905 : vous voulez du « fun », vous allez en avoir des barges!. 3Depuis 1836 (La Minerve, Montréal, 1er septembre, p. [3] : Chars de Laprairie). D’après l’anglais américain car, usité surtout au pluriel dans cet emploi (dans the cars; v. Craigie et Mathews). 4Depuis 1862. D’après l’anglais car, usité aussi bien aux États-Unis qu’en Angleterre (v. Craigie; v. aussi OED (en ligne) 2024‑06, s.v. car noun1 et Webster 1986). Char de rues, calque de l’anglais américain street(-)car (v. OED (en ligne) 2024‑06 et Craigie; v. aussi Mathews, s.v. street); chars électriques, calque de l’anglais américain electric car (v. Craigie; v. aussi OED (en ligne) 2024‑06, s.v. electric car et Mathews, s.v. electric). 

IIDepuis 1907. D’après l’anglais car, attesté notamment dans police car (d’où char de police) et dans private car (d’où char privé) (v. OED (en ligne) 2024‑06, s.v. police car; v. aussi OED-Suppl 1982, s.v. police et private). Pour désigner une voiture automobile, le mot a été relevé à quelques reprises en Suisse romande, plus spécialement à Genève et à Neuchâtel (MannoSR 213), mais il n’y a pas de lien historique immédiat entre cet emploi et l’emploi canadien. 

IIIDepuis 1874; aussi relevé la même année dans un journal franco-américain (v. L’Écho du Canada, Fall River (Massachusetts), 29 juin, extra, p. 1 : des chars allégoriques, où toutes les branches de l’industrie étaient représentées). Il s’agit d’un emploi français attesté en France depuis le XIXe s., mais qui semble relativement peu usité, ce qui explique pourquoi il n’a pas retenu l’attention des lexicographes. On le trouve, par exemple, en 1817 dans un périodique : le char allégorique représentant le triomphe de la Religion (Journal des débats politiques et littéraires, 18 octobre, p. 1); et en 1852, dans une revue théâtrale : Char allégorique à l’agriculture bordelaise, traîné par des bœufs aux cornes dorées […] (L’Éventail : écho des coulisses, 30 mars, s. p.). Il figure encore de nos jours sporadiquement dans la presse française : Mais on pourra tout de même suivre une parade carnavalesque […] avec des chars allégoriques d’années précédentes, […] une dizaine de groupes de musique et un grand nombre de carnavaliers (Ouest-France (site Web), Pays de la Loire, Nantes, 6 mai 2023). Char allégorique figure d’abord dans des journaux québécois reprenant des extraits de journaux français (p. ex., Le Pays, Montréal, 17 mars 1860, p. [2]; La Minerve, Montréal, 9 juillet 1863, p. [2]; Le Journal de Québec, 4 août 1866, p. [1]); il s’est bien intégré dans l’usage par la suite. 

Dernière révision : décembre 2024
Pour poursuivre votre exploration du mot char, consultez notre rubrique Les fins mots de l'histoire sur le site Web du Trésor de la langue française au Québec
Trésor de la langue française au Québec. (2024). Char. Dictionnaire historique du français québécois (2e éd. rev. et augm.; R. Vézina et C. Poirier, dir.). Université Laval. Consulté le 21 mars 2025.
https://www.dhfq.org/article/char