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BROUE [bʀu]
n. f.

Rem.

Variantes graphiques : (parfois, surtout à la fin du XIXe et au début du XXe siècle) brou; (parfois, au sens I.2) brew

I
1

Fam.Écume blanchâtre qui se forme à la surface des eaux agitées, de certains liquides ou de matières organiques lorsqu’ils sont battus, chauffés, versés, aspirés ou sous pression. 

Que lorsqu’on a pris le remède, si les excrémens [sic] du malade sont enveloppés d’une certaine broue blanche, à coup sûr il était sujet à la rage, et que s’ils ne le sont point, il n’y avait rien à craindre. 1839, L’Aurore des Canadas, Montréal, 2 novembre, p. [1].

« D’quoi qui faut que j’offrions? » [/] Demanda la servante en le voyant à table, [/] « Un large pot de bière, avec si nous trouvions[ »], [/] « Un tout petit restant de tarte à la framboise[ »] [/] « Cela m’irait assez »[.] Et puis il se versa [/] Dans une large coupe à la forme chinoise [/] Et sur la brou soufflant, à terre la brou sauta. 1865, Le Perroquet, Montréal, 25 février, p. 30.

Le ciel se rasséréna pendant une vingtaine de minutes et la pluie recommença à tomber pendant une couple d’heures, gonflant les ruisseaux qui charroyaient une espèce de brou ressemblant à celle de la lessive. L’obscurité était redevenue aussi complète qu’à midi. 1884, H. Berthelot, dans É.Z. Massicotte (éd.), Le bon vieux temps, 1re série, 1916, p. 63.

D’abord M. le Maire [de Sorel] a voulu profiter de l’érection civique de notre ville en Cité, pour faire mousser sa popularité avec de la broue, de l’écume, de la mousse, oui de la broue de bière, l’écume du whisky, et la mousse du champagne […]. 1890, Le Sud, Sorel, 25 janvier, p. [2].

Lorsque les amis se réunissaient chez lui, il mettait une quinzaine de verres sur la table. Il débouchait une bouteille de sa bière et il n’en sortait que de la brou qui remplissait les verres jusqu’au bord. Alors il s’écriait : Dépêchez-vous de boire, mes amis. Cette bière n’est bonne que lorsqu’elle fermente. [/] Les Peignes ne buvaient alors que de la brou qui, comme tout le monde le sait, est une des causes prédisposantes à la gravelle. 1895, Le Canard, Montréal, 16 février, p. [2].

Un veau difficile à nourrir refusera de boire du lait écrémé, s’il est couvert de brou, parce que cette brou est froide, alors vous n’aurez qu’à l’enlever et tout ira bien. 1924, Le Progrès du Saguenay, Chicoutimi, 6 mars, p. 7.

Ce matin pendant le sommeil des hommes, il était dans l’étable, assis sur le petit banc à trois pattes, et trayait les vaches. […] Il était là, sa chaudière entre les mollets, et zing, zing… le lait chantait en s’écrasant, en faisant la broue blanche qui gonfle, épaisse comme l’écume des chutes. 1943, F. Leclerc, Adagio, p. 183.

Partout, des mains en l’air, des têtes effouèrées [= couchées] sur les tables, c’est éclairé, c’est criard de néon, la télé glapit au-dessus du comptoir. Les ouéteures [= serveurs] courent, les verres toquent et déboulent sur les tables luisantes et brunes, les bouteilles aussi. […] Sur les tables, de la broue molle bave des verres remplis. 1964, J. Renaud, Le cassé, p. 54. 

[…] c’était surtout en dedans […] que je me sentais bien. Excité, frémissant, comme de la belle eau calme qui vient soudain s’éparpiller sur du récif. Là, elle se fend, se brise, déchire, devient tout énervée, va et vient, fait de la broue. On la reconnaît plus, on dirait qu’elle est cent fois plus vivante que dans sa partie étale. C’était comme ça en dedans de moi. 1970, Y. Thériault, Le dernier havre, p. 40‑41.

Broue au sommet des framboisiers : cela est causé par de petits insectes suceurs, les cercopes, qui aspirent la sève de la tige et fabriquent une agglomération de bulles pour se protéger contre les [sic] fluctuations de la température extérieure. 1973, P. Pouliot, La Presse, Montréal, 24 août, p. C8.

– Une bière, s’il vous plaît. […] – Bloody Mary pour monsieur, une bière pour vous. Voilà… Merci. Vous venez d’arriver par le train? demande-t-elle machinalement en craquant l’allumette contre le carton publicitaire de l’établissement. – Oui, s’empresse de répondre le maigre […]. On m’y reprendra plus […]. C’est creux en maudit, ici. [/] Le gros dodeline de la tête, un rien de broue marquant le dessus de sa lèvre. 1993, Fr. Ouellette, Le Grand Blanc, p. 565.

La surface de l’eau est, bien évidemment, l’endroit où l’eau entre en contact avec l’air. Mais dans un rapide ou au pied d’une chute, cette démarcation devient un brin moins nette, puisque nombre de petites bulles d’air se mélangent alors à l’eau. Or pour les mêmes raisons qu’elles forment spontanément un film à la surface de l’eau, les substances humiques ont aussi tendance à recouvrir ces petites bulles sous-marines. Et quand celles-ci remontent à la surface de l’eau, le film de substances humiques qui les enveloppe les stabilise suffisamment pour qu’elles puissent s’agglutiner dans des endroits où le courant est moins fort – et c’est ce qui donne les nuages de broue que l’on voit parfois le long des cours d’eau. 2014, Le Soleil, Québec, 22 juin, p. 16.

Servir la bière dans un verre à vin est toujours l’option idéale pour l’analyse visuelle, utile aussi pour contempler sa mousse dentelée et légèrement persistante. Plongeons pour la suite, le nez littéralement au rebord de la broue! Inspirez les arômes qui s’y dégagent, puis agitez doucement afin de faire remonter quelques bulles et intensifier les différents parfums. 2021, J. Plourde, Journal des citoyens, Prévost, 17 juin, p. 30.

 Mousse odorante que produisent certaines solutions (en partie le savon et le shampoing) lors de leur utilisation. 

Un savon, un shampoing qui fait beaucoup de broue.

[…] la chienne fut mordue [par un chien enragé] et la personne fut égratignée à la main; elle eut même la peau déchirée. Le Monsieur jetta [sic] la chienne dans un réservoir d’eau et la lava avec une grande quantité de savon de manière que tout son corps fut couvert de broue, et il fit la même opération sur lui-même. 1817, Le Canadien, Québec, 27 septembre, p. 63. 

Le moine accepta mon offre [de le raser] avec reconnaissance, et il fut bien vite installé dans un fauteuil, tenant à deux mains sous le cou le plat à barbe dans lequel roulait dans l’eau bouillante une immense boule de savon odoriférant. Je lui couvris le visage de brou de savon depuis la pomme d’Adam jusqu’aux sourcils, pour l’empêcher de remarquer mon émotion, et je me mis à l’œuvre. 1866, Ph. Aubert de Gaspé, Mémoires, p. 105‑106.

Il y a une différence entre les barbiers de Paris et les barbiers canadiens. Les premiers offrent beaucoup moins de confort aux clients que ceux du Canada. […] Il [le barbier] vous a noué autour du col une serviette qui retombe plus bas que les genoux. Le figaro vous a rasé le dernier poil de la face. Vous attendez qu’il enlève ce qui reste de brou de savon sur la figure. Ce n’est pas du tout cela. 1891, La Justice, Québec, 10 août, p. [1].

Un shampoo à la Pearline, lors même que vous n’en prendrez pas souvent, vous tiendra la peau de la tête saine et en bon ordre. N’en usez pas trop. Non pas que cela vous fera du mal, mais cela vous prendra trop de temps pour enlever la broue dans vos cheveux. 1895, La Patrie, Montréal, 9 janvier, p. [2] (annonce).

La femme était sur la galerie, en train de faire un lavage à tout casser. Les manches retroussées, de la broue jusqu’aux coudes. Ça frottait, ôtez-vous de là! 1931, R. Choquette, La partie de cartes (sketch), Au coin du feu ’31, p. 10 (radio).

Il est bien inutile de répéter aux enfants : « La vie est chère, ne gaspillez pas », si on oublie soi-même d’éteindre la lumière dans une pièce que l’on quitte, de s’essuyer les pieds sur le paillasson avant d’entrer dans la maison, de placer le savon dans le savonnier plutôt que de le laisser sur le bord de l’évier où il détrempe et fait de la broue inutile… 1950, Le Bulletin des agriculteurs, Montréal, octobre, p. 49.

« Si à chaque fois que tu prends ta douche tu te retrouves avec la broue jusqu’au nombril. » Ça c’est pas normal! […] Nos experts en plomberie, électricité, chauffage et gaz naturel, sont disponibles pour vos urgences ou pour vos projets de rénovation. 2017, Le Journal de Lévis, 15 mars, p. 12 (annonce). 

Cette fois, ce n’est d’ailleurs pas seulement un savon moussant qui a été déversé dans la fontaine. De forts produits nettoyants ont été utilisés […]. « Le fait est qu’à force de banaliser le geste, il aurait cette fois pu survenir quelque chose de grave, alors que des produits corrosifs ont été versés dans une fontaine où vont se rafraîchir des enfants […]. Par chance, la broue a été signalée tôt ce dimanche matin et des employés s’y sont rendus immédiatement, avant qu’il n’arrive un incident. Mais il y aurait pu y avoir des conséquences », a rappelé la Ville de Rivière-du-Loup, dans une publication sur les réseaux sociaux. 2022, Infodimanche, Rivière-du-Loup, 10 août, p. 10.

2

Par méton., Fam.Bière. 

Une bonne broue. Une petite broue. Un amateur, une amatrice, un buveur, une buveuse de broue. Un brasseur de broue. (Par allusion au sens II) rareFaiseur de broue.

Prendre une broue après le travail, le hockey. Boire une broue dans un bar, une (micro)brasserie. Payer une broue à qqn.

 Par méton., Vieilli Aller à la broue, à la taverne. 

Rem.1. Broue est le nom de l’une des œuvres théâtrales les plus marquantes de l’histoire du Québec. Créée en 1979 par un collectif d’auteurs québécois spécialisés dans l’écriture humoristique (Claude Meunier, Francine Ruel, Jean-Pierre Plante et Louis Saia), cette pièce, dont l’action se déroule en totalité dans une taverne, connaîtra au fil des années un succès populaire retentissant. 2. L’appellation broue figure dans le nom de raisons sociales et d’entreprises québécoises (p. ex. Unibroue ou Broue-Alliance). 

Tu sais, y’a des histoires qui nous paraissent bien bonnes quand on lève le coude avec un ami; mais ça manque de broue […]. Tiens, ma Louise, tu pourrais pas rincer deux petits verres, en faisant ton p’tit train? 1931, R. Choquette, Chez Magloire (sketch), Au coin du feu ’31, p. 5 (radio).

La guerre de la broue déclarée à Broken Hill [titre] […] La guerre est déclarée, à Broken Hill, la ville australienne où l’on boit le plus de bière. Et toute cette bataille se livre entre citoyens et propriétaires de bars, parce que le prix de la bière a été augmenté d’un « penny ». 1955, Le Petit Journal, Montréal, 6 novembre, p. 49.

« Cette décision tardive [le choix d’un candidat] a été prise par un certain nombre de vice-présidents du parti lors d’un meeting à la taverne Terrapin.[ »] « Les électeurs du beau comté de Longueuil, ont-ils conclu après de longues palabres arrosées de broue, les électeurs de Longueuil (et de Jacques-Cartier et de Laflèche) aiment voter.[ »] 1968, La Presse, Montréal, 7 juin, p. 49. 

La bière est de toutes les joies et de toutes les tristesses, de toutes les parties et de tous les chagrins d’amour, de toutes les élections et de tous les enterrements, partout et toujours, dans tous les siècles… […] Occasionnellement, un de vos amis vous demande de lui payer une broue. C’est de bonne guerre. À chacun son tour, ce n’est pas le mien, je ne suis pas le père des enfants perdus! 1974, Gh. Lapointe, Les mamelles de ma grand-mère, les mamelles de mon grand-frère, p. 12. 

Y sont pas mal niaiseux avec leurs publicités qui nous flattent dans le sens du poil. Niaiseux, mais efficaces par exemple! Il suffit de regarder leurs chiffres d’affaires annuels et de compter le nombre de malades (à cause de la bière) dans les hôpitaux… Tiens! je vous gage une caisse de 24 que, l’an prochain, le festival sera encore commandité par un faiseur de broue. 1981, J.‑Cl. Trait, La Voix du Sud, Lac-Etchemin, 18 août, p. 26. 

Et qui a eu l’idée de nous faire servir de la bière dans des verres de plastique? Vaut mieux avoir la bière dans le corps que le corps dans la bière, direz-vous, mais vaut mieux revoir Saint-Denis et mourir que de boire sa broue dans autre chose qu’une bouteille brune et vitreuse comme le blues. 1995, M. Cloutier, Le Devoir, Montréal, 7 juillet, p. A10.

À cinq heures, les bureaux se vident, les bars se remplissent. […] Quatre heures quarante-cinq. Les verres sont bien astiqués, les frigos à bière pleins à ras bords : le compte à rebours commence. Les serveuses et serveurs sont aux aguets […]. Les heures après le bureau sont devenues le moment privilégié de la journée pour décompresser et s’envoyer une bonne petite broue (ou un Perrier) derrière la luette après le boulot. 1997, Voir, Montréal, 15‑21 mai, p. 9. 

Pour obtenir un succès cinématographique au Québec, pour réunir au pied du même écran, hommes et femmes, ados et vieillards […], il faut nécessairement passer par la broue et le hockey, les deux mamelles fondatrices de notre imaginaire. […] l’inconscient collectif québécois n’a toujours pas dépassé le stade oral de la bière consommée dans une taverne ou cuvée dans un vestiaire. 1998, N. Petrowski, La Presse, Montréal, 15 décembre, p. C13. 

Le centre-ville en toile de fond, une légère brise qui monte du fleuve, un soleil écrasant… La scène est idéale pour décapsuler un peu de bonheur. Bièrophiles, à vos goulots! Le huitième Mondial de la bière est commencé. Cette fête de la broue a lieu au quai Jacques-Cartier du Vieux-Port de Montréal, jusqu’au 23 juin. Au menu cette année, plus de 250 bières, scotchs et whiskies provenant d’un peu partout à travers le monde… 2001, M. Allard, La Presse, Montréal, 15 juin, p. B5. 

Dès mon retour du resto, ce soir-là, on est arrêtés au dépanneur pour s’acheter une petite caisse de broue puis on a pris l’autobus. 2004, Ph. Garon, Salut, mon frère!, p. 43.

En l’observant plus attentivement, je remarquai que j’avais encore un verre de bière à la main, comme s’il s’agissait d’une sorte de prothèse qui m’aidait à fraterniser dans des moments de grande sociabilité. Si tu ne fumes pas et que tu ne bois pas, t’es plate à mort! Il me restait la bière pour illustrer sans équivoque toute ma joie de vivre. Comme dans les annonces publicitaires à la télévision : rire et boire de la broue! 2013, M. Fortier, La décroche, p. 75.

 Par plaisant. Péter de la broue : boire de la bière. 

[…] passez donc par Gentilly durant la grande semaine du Carnaval… Et une fois rendu vous pourrez « embarquer » dans l’affaire : participer au rallye du Carnaval, le samedi 25 janvier […], vous amuser au Bal du Carnaval, assister à notre soirée canadienne du dimanche 26 janvier, « péter de la broue » à la [soirée] Bavaroise du 1[er] février etc. 1974, J. Blanchette, Courrier Sud, Nicolet, 24 décembre, p. 104.

Pour ceux qui sont un peu collet monté ou bien qui veulent « péter » de la broue, nous aurons un service de bar triple pour assurer une fluidité constante. Il y aura aussi des prix de présence, qui sont toujours les bienvenues [sic]. 1985, A. Lachapelle, L’Artisan, Repentigny, 23 avril, p. 17.

Au bar du 4040, Saint-Laurent, afin de s’y reconnaître dans toutes ces maltes boissons et pour arriver à péter de la broue convenablement, on offrira sous peu aux néophytes du houblon des petits verres-dégustation de bière. 1988, D. Boissonneault, La Presse, Montréal, 19 juin, p. D1.

Quoi de mieux qu’un masque, des palmes et un schnorkel pour mettre le client à l’aise? Évidemment, il faut garder les parasols ouverts, pour éviter de trop diluer la bière et de noyer le poisson, euh! le client. De plus, il faut que le tube qui aide le consommateur à respirer soit branché directement dans sa bière. Ainsi, vos clients pourront non seulement péter de la broue, mais se mettre soûls tellement vite qu’ils vont partir plus tôt, libérant la place pour d’autres ivrognes. 1994, Croc, juillet, p. 61.

Parfois, ça fait du bien de péter de la broue! De la broue de microbrasserie, tout particulièrement, une véritable manne pour les amateurs sherbrookois de bonne bière avec quatre institutions à produire du plaisir au centre-ville. 2011, La Tribune, Sherbrooke, 26 octobre, p. 12.

Il est désormais possible de « péter de la broue » un peu partout dans l’Est ontarien et en Outaouais, où la bière ne cesse de couler à flots et en fût depuis l’ouverture de la brasserie Beau’s, à Vankleek Hill, en 2006, et des Brasseurs du Temps (BDT), dans le secteur Hull, en 2009. 2018, Le Droit : affaires, janvier, p. 19.

 RareC’est (ce n’est pas) de la petite broue : c’est (ce n’est pas) quelque chose sans importance, sans conséquence. 

Il a la frousse devant cette vie qu’il convoite et qui sera la sienne, p’pa l’a dit encore hier. Penses-y, des bons repas tout le temps. La propreté. Des études sérieuses qui feront de toi un homme de la Haute. Pas d’la p’tite broue, ça. Comparé à c’que t’as… 1965, A. Major, La chair de poule, p. 95. 

Les émeutes de la coupe Stanley à Montréal ou à Vancouver, c’est de la petite broue de voyous face aux agissement [sic] des hooligans d’Angleterre. 1994, M. Gauthier, Le Droit, Ottawa-Hull, 17 juin, p. 59.

 Broue(-)pub n. m. Établissement où l’on consomme des bières artisanales brassées sur place. 

Rem.1. Au pluriel, généralement écrit broue(-)pubs. 2. Terme déconseillé par l’OQLF, qui privilégie plutôt les mots bistro(t)-brasserie et microbrasserie (v. GDT 2002).

Les bières des broue-pubs montréalais, concoctions admirables de maîtres-brasseurs à l’imagination débridée, dévoués à leur art au plus exprès bonheur des nouveaux « piliers » de taverne, sont désormais aussi incontournables, dans l’univers tout en bulles québécois, que leurs célèbres cousines des microbrasseries. 1999, M. Cassivi, La Presse, Montréal, 10 juin, p. D3. 

Depuis quelques années, un nouveau type de brasseries a fait son apparition. Communément appelées « broue-pub » ou « bistro-brasserie », de nouvelles microbrasseries offrant leurs bières à même le bistro adjacent ont vu le jour. Compensant leur possibilité réduite de production de bière par une grande variété de produits, ces « broue-pubs » offrent à leur clientèle de nombreuses bières toutes différentes selon les saisons. 2004, S. Daignault, Histoire de la bière au Québec, p. 32.

[Le président de l’Association des microbrasseries du Québec] croit que les microbrasseries qui innoveront et qui diversifieront leur offre pourront tirer leur épingle du jeu. Si une microbrasserie qui a un volume [de moins de 2000 hectolitres] ne vise que la consommation à domicile, donc de la vente en épicerie ou en dépanneur, et ne compte pas sur un broue pub, c’est là que ça va devenir problématique, fait[-il] valoir. 2023, Société Radio-Canada, Ici Gaspésie–Îles-de-la-Madeleine (site Web), économie (affaires), 30 novembre. 

 Arg.Eau-de-vie artisanale fabriquée de façon clandestine en milieu carcéral. 

Le travail des agents de la paix consiste notamment en la surveillance des détenus dans leurs allées et venues à l’intérieur de la prison, à les surveiller lorsqu’ils sont à la cafétéria afin que les détenus ne montent pas de nourriture à leur cellule, spécialement des fruits, du sucre et du pain avec lesqules [sic] ils se font de la « broue », sorte de boisson qui une fois fermentée devient enivrante et peut-être nocive pour la santé. 1980, La Presse, Montréal, 15 septembre, p. D1.

Les détenus confectionnent de l’alcool artisanal avec des épluchures de fruits et de légumes, du ketchup ou des tomates pour l’acidité, du pain pour la levure, et du sucre. Ils s’approvisionnent en ingrédients dans les cuisines, à la cafétéria ou encore à la cantine. Ils placent tous les ingrédients dans un contenant hermétique pour les faire fermenter. Ils filtrent ensuite la mixture pour obtenir ce qu’ils appellent dans le milieu de la « broue ». Distillé trois fois, ce mélange peut donner une boisson atteignant jusqu’à 95 % d’alcool pur. Selon des gardiens de la prison, la fermentation de la « broue » dégage une odeur de levure que les prisonniers masquent avec du parfum. 1995, Le Soleil, Québec, 12 août, p. A24.

Dans la salle des visites, les tables sont munies d’un système d’écoute électronique, qui sera utilisé en cas de doute. Des caméras permettent d’aller chercher avec netteté le moindre détail. Difficile d’y passer de la drogue, quoique ce ne soit jamais impossible […]. On a ainsi dû blinder les boîtes protégeant les fluorescents des douches, parce qu’elles servaient de cache. Pour limiter la confection de broue (alcool frelaté), on a remplacé les tomates en conserve ordinaires par des tomates épicées. 2003, La Presse, Montréal, 7 septembre, p. A7.

3

(Par anal. avec le sens I.1). Fam., vieilliBave blanchâtre qui s’écoule de la gueule de certains animaux échauffés, irrités ou malades.

Avoir la broue à la gueule.

 Fam.vieilliBave mousseuse qui vient aux lèvres d’une personne en colère ou en proie à un violent choc (nerveux ou physique).

Avoir la broue à la bouche.

Rem.Ces emplois de broue tendent à être remplacés par écume dans l’usage soigné.

Entre minuit et onze heures, un samedi le jour du meurtre, j’entendis deux personnes qui disait [sic] : il m’a frappé mais il en a mangé une de moi. Je l’ai laissé la broue à la bouche sans connaissance et même il ren[â]clait. 1882, Le Nouvelliste, Québec, 19 avril, p. [2]. 

Ce matin un chien s’est trouvé mal, dans la rue Saint Jean [sic], il est tombé et a commencé à se traîner sur le côté, la broue à la gueule. Heureusement que quelques sceaux [sic] d’eau lui ont rendu ses sens. Plusieurs criaient déjà à la rage. Le fait est qu’il y aurait quelque soin a [sic] prendre par ces temps de chaleur. 1890, L’Événement, Québec, 14 juillet, p. [4].

Là-dessus, Taschereau fait la plus laide grimace de sa vie […]. On grince des dents, on a la broue à la bouche, on se frappe la tête contre [l]es murs, la salle semble un refuge d’aliénés, de grands agités […]. Chacun cherche ses claques, ses gants, son chapeau. 1930, Le Goglu, Montréal, 21 mars, p. 3. 

Mais chacun le savait : [/] C’était lui, le coupable, [/] C’est lui qui récoltait [/] Tous les fruits de la fable. [/] Car il en profitait [/] Pour agrandir sa terre; [/] Il devint en effet [/] Un grand propriétaire. [/] Il avait un château, [/] Un très riche domaine, [/] Un splendide taureau, [/] Qu’on dit un phénomène. [/] Un député, hélas! [/] – Ce qui était fatal – [/] Osa, de guerre lasse, [/] Allumer le fanal. [/] Il dénonça l’affaire, [/] Mit les points sur les i; [/] Notre homme eut beau faire, [/] La Chambre était saisie. [/] Notre sainte nitouche [/] Sua abondamment, [/] Et la broue à la bouche, [/] Avait le nez dedans. 1941, Le Guide, Sainte-Marie-de-Beauce, 4 juin, p. [5].

Les clients étaient nombreux; il me fallut attendre. Mais ce contre-temps me valut une aubaine. En attendant mon tour d’être servi, je furetais les vitrines du regard quand j’aperçus… des pipes de plâtres! [sic] Jugez de mon plaisir! Moi qui n’en avais pas vu depuis 15 ans!... La « broue » m’en vint à la bouche. 1947, L. Morneau, Le Progrès du Golfe, Rimouski, 11 avril, p. 4. 

À son arrivée, cinq minutes plus tard, il fait son entrée « à l’envers » et est placé par terre sur le ventre, le temps pour les policiers de lui retirer les menottes. « Il est tourné sur le côté et là, il est cyanosé de la tête, immobile, avec du matériel blanchâtre à la bouche, broue ou salive avec des bulles. » 1987, Le Nouvelliste, Trois-Rivières, 1er avril, p. 37.

L’homme : un paquet d’explosifs! Plus dangeureux [sic] qu’une bombe atomique. Le moindre détonateur lui met la broue à la gueule. Il peut tuer à bout portant : son père, sa mère et son frère. L’homme : un fauve sans poils. Un animal raisonnable, mais un animal d’abord. 1992, Progrès-dimanche, Chicoutimi, 19 juillet, p. B10. 

Décidément, le comportement des ours tourne à l’agressivité cet automne. Ce fut au tour d’une femme de Forestville […] d’être la cible d’un de ces plantigrades mercredi soir. […] « Un ours a carrément surgi devant ma voiture, a lancé la dame de 37 ans […]. Ensuite, il s’est levé sur ses pattes arrière, la “broue” dans la gueule. J’ai même essayé de le pousser un peu, mais il ne bougeait pas. » 2002, Le Soleil, Québec, 4 octobre, p. A3. 

Lors de sa dernière arrestation au domicile de sa mère, […] Gagné a résisté à l’intervention de quatre policiers venus l’embarquer. Menottes aux mains, il se débattait comme un forcené, amenant une policière à déclarer qu’elle l’avait vu avec « de la broue autour de la bouche ». 2004, Le Quotidien, Saguenay, 21 août, p. 5.

Devant nous, donc, un chemin étroit et boueux – et tellement à pic que je serais tenté de l’appeler un mur − se faufile entre une petite maison et un berger allemand qui, vraisemblablement, n’apprécie pas la présence d’étrangers. Enfin, c’est ce que l’on pourrait penser à la vue du gros toutou : il grogne, il montre les dents et il a de la broue au bord des babines. 2008, Br. Blanchet, La Presse, Montréal, 28 juin, cahier Vacances/Voyage, p. 2.

J’avais toujours cru que les chevaux étaient des bêtes nerveuses, avec de la broue au coin de la bouche et des yeux fous dans la tête, mais ceux-là étaient patients, acceptaient toujours de se faire monter et ils étaient super forts. 2014, S. Dussault, Direction Saint-Creux-des-Meuh-Meuh, p. 118.

4

Par anal., Rare, vieilli Sueur abondante et épaisse, animale ou humaine.

Et on ne s’arrête [de danser] que quand la maison vire et qu’une douzaine de danseurs tombent sur le derrière. [/] – Crime de crime! s’écrie Ustache, ceux qui diront qu’y a pas moyen de s’amuser créquiennement [= chrétiennement], eh bien! qu’ils le disent pas devant moi. Mame Rochette, c’est pas pour vanter votre maison, mais jamais on s’est amusé comme ça. Aussi on va boire à votre santé […] [/] La veuve, qui est dans les transports et dans la joie par dessus [sic] la tête, dit d’une voix flûtée : – Je vous cré, qu’on va prendre quèque chose! J’sus toute en nage… – La femme à Tânisse, donc! A fait de la broue comme du savon à barbe… 1910, Mistigris [pseud. de P. Voyer], Soirée de Mardi Gras, La Revue populaire, vol. 3, no 2, p. 69.

Là, elle dit : « Je suis certaine de mourir. Elle dit, là, c’est certain que c’est ma fin, c’est certain, elle dit, je meurs ». « Oui, mais on va faire venir le docteur, y a-tu quelque chose pour te faire revenir[?] » « Ah! Elle dit, oui, il y a quelque chose. » « Bien [qu’est-ce] que c’est? » Elle dit : « Ça me prendrait de l’écume de chevaux sauvages. De l’écume ça, c’est de la broue, hein? » « Oui, mais il dit[,] où prendre ça? J’en ai pas moi, ici. » 1962, Giffard (Québec), AFEUL, S. Gagnon 31 (âge de l’informateur : n. d.).

[La jument répond :] – Oué! M’ âs t’ donné’ in conseil! Avant d’mon matin, c’tte nuit’ minme, tu vâs m’ brider, tu vâs m’ seller comm’ faut, tu vâs t’ prend’e in bon bâton, d’ quoi qui frapp’ fort. Tu vâs m’ brider, tu vâs m’ seller, tu vâ’ embarquer su’ moé. […] On vâ courir, on vâ coursé’ aussi vit’ comme on vâ pouvoèr [… ]. Tu vâs frapper su’ moé, tant qu’ possib’e, aussi fort que tu pourrâs! – Mé’, i’ dit, ’és-tu folle? J’ t’ai jama’s battue d’ ma vie! P’is, lâ, tu m’oblig’râ’ à t’ batt’e? Jama’s, i’ dit, j ’ frai çâ! […] – M’ âs t’ dire, ’a dit, qu’ tu ’n n’a’râs pâs de r’gret! ’A dit, mecqu’o’ (e) r’vienn’ d’ not’ course, mecqu’ ça soeille [soit] assez – je l’ sé’s, moé, mecqu’ ça soeille assez, moé – m’en vâ’ êt’ blanch’ de broue d’in bout à l’aut’e. Tu vâs prend’e c’tta broue-lâ, tu vâs prend’ dés chaudière’ à la’t [lait]’ lâ […]; tu vâ’ ’és emm’né’ écitt’e à étab’e. Tout’ la broue qu’ m’â’ a’oèr su’ l’ corps, tu vâs lés prend’e, tu vâs tout’s lés ramasser dans cés cheguiér’s [chaudières]-lâ, comm’ faut. 1970, Cap-Chat, G. Landry, dans G. Lemieux (dir.), Les vieux m’ont conté, t. 26, 1987, p. 161‑162.

C’est pas croyable comment ça va vite. La queue des chevaux flotte dans le vent, pis vient me frotter la face, j’entends les sabots fesser sur la traque, pis les chevaux respirer vite, vite. Y viennent les norines [sic] rondes comme des lunes de miel, pis la brou leur coule sur le dos comme un verre de bière que tu remplis trop vite. 1979, B. B. Leblanc, Y sont fous le grand monde!, p. 27. 

Donc, un de ces dimanches après-midi, […] il décida de « casser » le cheval. « En quelques heures, […] nous avons fait certainement une centaine de milles. En passant par Iberville, Saint-Alexandre et les paroisses environnantes. Toujours à la belle épouvante. […] J’étais morte de peur. Je m’étais bien promise de ne plus jamais retourner faire un tour de voiture avec cette jument ». Son mari ne l’a pas oubliée lui non plus cette belle balade, mais pour d’autres raisons. « La jument était couverte de “broue” sur tout le corps. Dieu sait si elle trottait bien […]. » 1986, Le Canada français, Saint-Jean-sur-Richelieu, 18 juin, p. B6.

 (Dans une expression et une locution). Fam.(Avoir)(de) la broue dans le toupet (ou, plus rarement, au toupet) : (être) couvert de sueur, transpirer abondamment (à cause de la chaleur, d’un effort physique intense, d’une vive émotion); (spécialement) (être) dans un état d’agitation, de surexcitation (à cause d’une surcharge de travail, d’affaires pressantes à régler, de défis à relever, etc.).

[…] un propriétaire de boutique nous a avoué que souvent il offre [des articles invendus] qui sont étalés depuis des mois et que l’on mord à l’appât. « Quand ça fait dix jours que l’on travaille le jour et le soir et qu’un gars nous arrive “la broue dans le toupet” pour avoir un cadeau, il faut aussi nous comprendre. On lui offre ce qu’il reste. [»] 1978, Progrès-dimanche, Chicoutimi, 24 décembre, p. 11.

D’une étoile à l’autre, il faudra travailler la broue dans le toupette [sic]. Le futur commence maintenant et rien de ce qui peut être fait aujourd’hui ne doit être négligé pour faire du Québec une terre aux milles [sic] visages du projet d’aimer. 1981, R. Laplante, Lettre pour continuer, Possibles, vol. 6, no 1, p. 33.

[…] mettez-vous à sa place : elle avait devant elle à la fois un acteur et un écrivain dans la même personne! Peu importait qu’elle n’avait jamais entendu parler de moi, j’étais là devant elle en chair et en os et je lui parlais. Moins chic, elle aurait eu la bave à la bouche et la broue dans le toupet! 1984, M. Tremblay, Des nouvelles d’Édouard, p. 111.

[Ils] admettent que les ressources et effectifs alloués par le gouvernement peuvent être insuffisantes [sic], compte tenu des besoins. « Mais nous n’avons personne qui a la broue au toupet », commentait [un directeur du personnel], alors que son patron nous assurait que des démarches auprès de l’État sont entreprises depuis déjà un certain temps afin d’obtenir des ressources supplémentaires. 1988, L’Éclaireur-progrès, Saint-Georges de Beauce, 16 mars, p. 20.

[Un omnipraticien] […] a la broue dans le toupet : il reçoit des malades à la salle d’urgence, s’occupe de ceux qui sont hospitalisés, sans oublier les vieux du centre d’accueil, et les patients du CLSC et de la clinique externe de l’hôpital. Il travaille 55 à 60 heures par semaine, avec des pics de 100 heures durant les semaines de garde à l’hôpital. Fatigué […]? « C’est un qualificatif qu’on n’ose plus employer », dit-il. 1993, Le Soleil, Québec, 8 juin, p. C10.

Mort de fatigue, il tomba endormi sur la banquette arrière, se servant de Tiboule comme oreiller, épuisé par les courses, les cris, l’excitation qui s’emparait de lui à chaque partie de pêche en chaloupe. Il en avait encore de la broue dans le toupet. 1997, G. Bouchard, L’enfant de la barrière, p. 64.

À la Régie du logement, une agente d’information me fait savoir qu’on a la broue dans le toupet depuis des mois. Les contestations de hausses de loyer s’accumulent et provoquent de longs retards. Des locataires en sont rendus à attendre la décision au sujet de leur augmentation de loyer de l’an dernier! À peine la moitié des dossiers de 2001 ont été réglés, c’est vous dire la grosseur du bouchon… 2002, N. Provencher, Le Soleil, Québec, 14 mars, p. A5.

Les propriétaires […] sont débordés en ce samedi matin […]. Le téléphone ne dérougit pas et la porte d’entrée du petit magasin adjacent à l’usine ne cesse de s’ouvrir pour faire sortir au froid l’odeur chocolatée. Le lendemain matin, des milliers de personnes mangeront du chocolat. Mme Gagnon nous reçoit dans son bureau, à travers la paperasse, la broue dans le toupet. 2003, P. Voyer, Progrès-dimanche, Chicoutimi, 20 avril, p. A6. 

Elle vient d’être nommée au bureau du sous-ministre adjoint à l’administration, responsable de l’implantation du nouveau cadre de gestion dans le ministère. Elle fait partie de l’équipe dite « de la réforme ». Francine aime raconter que depuis son arrivée, elle a « de la broue dans le toupet » tellement ce bureau s’active à diffuser l’information, à convoquer les réunions de gestionnaires et à assurer le suivi qui mènera au contrat de performance. 2004, A. Vinet, Travail, organisation et santé, p. 62.

J’ai deux enfants. Ça veut dire qu’une semaine sur deux, j’ai de la broue dans le toupet. Je cours partout comme une poule pas de tête et je suis brûlée par les deux bouts (d’où l’expression « femme au foyer »). Alors que la semaine suivante, je suis tellement en manque de vie sociale que je cours encore partout, mais à essayer de voir mes amis, de sortir, de prendre du temps pour moi ET de dater. 2014, A.‑M. Dupras, Ma vie amoureuse de marde, p. 45.

J’ai toujours gardé d’elle le souvenir d’une fille sportive, elle donnait des cours de workout au cégep, avait toujours la broue dans le toupet, alors que j’étais plutôt du genre à écumer les bars de la Saint-Do. 2017, M. Moisan, Les gens heureux ont une histoire, p. 258.

En ce soir de générale, l’équipe de la Maison Théâtre était à pied d’œuvre pour gérer les livreurs de pizza, les boîtes de barres tendres, la circulation, les répétitions, le niveau sonore des jeunes voix. La directrice artistique […] avait de la broue dans le toupet et l’énergie haute. 2024, C. Lalonde, Le Devoir, Montréal, 20 mars, culture, p B3. 

II
1

Fig., vieilliPropos qui comportent une bonne part d’exagérations, de mensonges, d’inventions. 

 (Spécialement). Faire de la broue : se vanter, se donner de l’importance en tenant des propos exagérés qui peuvent verser dans l’affabulation; faire de l’esbroufe.

[…] messieurs, sachez qu’on a vendu cette année 5,000,000 de livres de beurre et de fromage depuis l’année dernière. […] Nos adversaires n’ont jamais pu faire de beurre et du fromage, ils n’ont fait que de la broue. 1881, Le Canadien, Québec, 30 septembre, p. [2]. 

Qu’il faut en faire de la « broue » pour mousser une candidature! 1933, Tristan [pseud. de L.‑Ph. Robidoux], La Tribune, Sherbrooke, 5 octobre, p. 4.

Par contre, certains chefs ont démontré qu’ils avaient de gros et grands défauts. Nous n’avons qu’à lire certains communiqués de chefs, organisateurs, agents d’affaires pour avoir la preuve de ce que nous déplorons. Nous avons présentement en mémoire la conduite et l’attitude des Rowley et des Parent dont l’unique souci fut et est de faire parler d’eux en faisant beaucoup de broue et de bruit. Nous estimons que ces sortes d’individus font plus de tort à leur union et aux ouvriers qu’ils ne les aident. 1945, J. Pelchat, Le Front ouvrier, Montréal, 24 mars, p. 4.

« Je suis accusé de tentative de meurtre », aurait dit le prévenu. « Il y a trois, quatre gars qui sont venus dans mon restaurant. Ils ont voulu faire de la broue”. J’en ai frappé un dans le dos pour faire peur aux autres ». 1947, Le Soleil, Québec, 23 avril, p. 3.

Le club de la Faculté [de médecine dentaire] [titre] [/] Il ne pratique pas beaucoup. Mais, par contre, on nous promet de l’action dans une prochaine joute entre « ceux qui ouvrent la bouche pour la réparer » et « ceux qui l’ouvrent pour faire de la broue ». 1950, Le Quartier latin, Montréal, 3 mars, p. 6 (chron. humor.).

Mais le spectacle de la soirée, c’est un personnage plus important qui nous l’a donné. Un monsieur […], en l’occurrence vice-président du circuit Horwood, est venu faire de la « broue » à Québec. Ce monsieur, pour être poli, est parti de Montréal pour venir nous dire qu’il se foutait de la constitution de la ligue [de hockey], qu’il se foutait du Colisée, qu’il se foutait de nous, en un mot, qu’il se foutait de tout le monde. 1952, M. Fortier, Le Front ouvrier, Ottawa, 5 avril, p. 10.

Y faut absolument que tu viennes dans le rang St-Isidore pour la course de pitons [vieux chevaux]. Ti-Paul la Quille a réussi à faire venir de Baie St-Paul [sic] un « Percheron » qui appartient au gendre du « bom Euclide » pi qui trotte comme un orignal. C’est peut-être rien que de la broue… mais c’est peut-être vrai… 1965, La Corporation du Carnaval-souvenir, Progrès-dimanche, Chicoutimi, 14 février, p. 16.

Le grand désir des jeunes pharmaciens diplômés de se faire valoir, et leur volonté de servir honorent beaucoup notre profession. Servir sans être esclave, telle est la vocation d’un chacun. Pourquoi, trop souvent, se remplir la bouche d’écume, pourquoi faire de la broue avec des mots plats comme « actes pharmaceutiques, actes thérapeutiques », termes d’ailleurs qu’il faut redéfinir. 1971, L.‑G. Garceau, Le Devoir, Montréal, 9 janvier, p. 5.

« En formant cette association, […] notre but principal est de solutionner les problèmes des jeunes chanteurs qui ne sont pas très connus, ou qui ne peuvent quitter leur patelin faute de contact. On ne veut pas faire de broue, mais les chansonniers, interprètes et auteurs-compositeurs qui sont associés avec nous ont cessé de végéter. Ils se produisent régulièrement dans différentes boîtes à chansons au travers de la province et vivent très bien de leurs chansons. [»] 1976, Montréal-Matin, 31 juillet, p. 47.

De toute façon, les fusils pour la chasse aux oiseaux migrateurs étaient déjà limitées [sic] à trois cartouches; quant à votre carabine, cinq balles, c’est déjà trop. […] Dix balles pour une arme de poing, c’est l’abondance et tous les policiers vous le confirmeront. Pourquoi donc m’en prendre à ce règlement? Parce qu’encore une fois, c’est de la broue! Les honnêtes gens comme vous et moi n’ont pas besoin d’un magasin de type militaire pour leurs armes. 1992, Le Canada français, Saint-Jean-sur-Richelieu, 19 août, p. A7.

Nous n’avons reçu aucune subvention ou octroi de quelque gouvernement que ce soit, nous voulons être indépendants et fonctionner à notre rythme et l’amour du travail. Je me sens lésée dans mes droits et liberté, car ces paparazzi (fonctionnaires de l’impôt) eux ont droit à de gros salaires et une sécurité payée à même nos taxes et nos impôts et ils viennent nous faire la loi et de la broue dans notre maison. 1997, Progrès-dimanche, Chicoutimi, 5 octobre, p. B8 (lettre).

« Il est obligé de crier pour se faire valoir, tandis que nous, nous sommes obligés de réaliser des choses pour se faire valoir. Pendant qu’il crie, moi je travaille dans sa circonscription […] », indique le député libéral. « Il n’a même pas acheté un 2 X 4 dans la région pour sa maison; on peut faire de la broue quand on est loin. Nous nous sommes occupés de la crise du bois d’œuvre et nous avons encouragé d’autres façons de retirer des revenus de la forêt, comme le développement du Parc des monts Valin [sic] et du Village vacances-familles du Bas-Saguenay. » 2004, Le Quotidien, Saguenay, 2 mars, p. 4.

La mairesse […] qualifie « d’enfantillage » l’exercice de compressions de près de 110 millions $ au PTI [programme triennal d’immobilisations] effectué par l’opposition. D’autant plus que selon elle, les compressions n’allégeront que de 22 $ le compte de taxes du citoyen. Beaucoup de broue, pas de savon, juge la mairesse […], rephrasant le « Much Ado About Nothing » de Shakespeare. 2006, Le Soleil, Québec, 13 décembre, p. 7.

 VieilliFaiseur, faiseux, faiseuse de broue : personne qui exagère, qui fabule, qui fanfaronne ou qui ment dans le but de se donner de l’importance, d’impressionner ou d’intimider.

Le devoir de nos dirigeants est de prendre les devants, après s’être bien orientés, et de brider fermement tous ces faiseurs de broue qui cherchent à gagner du temps en détournant la question remontant désormais à la surface : celle de vivre et progresser chez nous, demain, dans la paix, cependant que le volontariat assure aujourd’hui à nos défenseurs d’outre-mer les renforts voulus pour achever heureusement et promptement la besogne agonisante. 1944, Ch.‑E. Gagnon, L’Action catholique, Québec, 22 novembre, p. 4.

Les autorités de la St-Jean-Baptiste de Deschambault ne sont pas des « faiseuses de pathos ou de broue », mais des patriotes qui aiment sincèrement leur pays et leur petite patrie. 1957, H. Lacourcière, Le Guide, Sainte-Marie-de-Beauce, 21 juin, p. 2.

C’est rendu aujourd’hui que ces faiseux de brou [les joueurs de hockey professionnels], y pense [sic] ben plus à faire de l’argent qu’à jouer au hockey. Y en a même qui veulent se lancer dans l’cinéma avec des p’tites poudrées. Moé j’sus renversé par l’allure des choses. On n’a pu le hockey qu’on avait dans l’temps pis c’est ben r’grettable. 1970, Progrès-dimanche, Chicoutimi, 27 septembre, p. 120 (chron. humor.).

Malgré son jeune âge et son nouveau revenu […] [le joueur de hockey] reste lucide. Quant à la racaille du hockey, elle ne pourra même pas s’en approcher. Il est trop sérieux et prévoyant pour se laisser conter fleurette par les « faiseurs de broue ». 1978, M. Dumas, Le Soleil, Québec, 3 août, p. C3.

1935 – [Un politicien] aux élections provinciales nous promettait une masse en l’air et l’autre sur le cœur : Vous l’aurez demain votre drapeau du « Québec ». On l’a eu en 1948… « Pas vite, lambineux, faiseurs de broue, les politicailleux de ce temps-la [sic] disent les vieux ». 1985, Progrès-dimanche, Chicoutimi, 17 novembre, p. 76 (lettre).

2

Par renforcement, Cour., fam.Péter de la broue (ou, plus rarement, péter une broue) : parler de façon prétentieuse, en ayant l’air de tout connaître, en exagérant ses mérites, en déformant ou en grossissant la réalité; faire étalage de sa culture, de ses atouts physiques ou de ses richesses dans le but de se faire remarquer. 

Arrête de péter de la broue!

Rem.Le sens de l’expression péter de la broue, quoique très proche de celui de faire de la broue (voir sens II.1), s’en distingue cependant par la présence plus prononcée des idées de « prétention » et de « volonté d’attirer l’attention vers soi ». 

Le frère […] pète de la broue depuis qu’il a gagné $ 100 avec son équipe. Si vous voyez une pipe au coin de la rue et une paire de mains en l’air, pensez au frère Alex Béland qui parle de curling. 1949, L’Écho de Louiseville, 11 mars, p. 10.

Il klaxonnait à tout propos, roulait d’un bout à l’autre de l’unique rue en plein dégel, éclaboussant les curieux sortis pour admirer la voiture. Après avoir paradé à son goût, Alidor stoppa devant le magasin général […], leva le capot, expliqua les derniers perfectionnements du moteur et, suant d’orgueil, crevant de joie, donna une leçon de technique à tous les « Jos. Connaissants » de la paroisse, avant de les inviter à monter. […] – As-tu vu s’y « pette de la broue »? dit Théophile. 1955, R. Ouvrard, La veuve, p. 221‑222. 

On a beau être intelligent [/] Et faire le galant [/] Il y en aura tout le temps [/] Pour « péter » de la broue savamment[.] 1957, Le Guide, Sainte-Marie-de-Beauce, 6 septembre, p. 6.

Ce soir-là, le maire […] a reçu une délégation du Conseil du travail à qui il a, comme on dit, « pété une broue » invraisemblable. Selon lui, le gangstérisme était disparu de Jacques-Cartier depuis son entrée en fonctions. 1962, Le Monde ouvrier, Montréal, mai, p. 6.

Voilà un savon difficile à avaler. Le même réseau CTV présente le lundi soir la comédie supposément scandaleuse et cochonne « Soap ». J’avais raté la première la semaine dernière, occupée à un autre canal. Le réseau ABC, d’où émane l’œuvre, a pété une broue incroyable tout l’été au sujet de cette parodie de roman savon [sic], promise comme la chose la plus osée de l’heure. 1977, L. Cousineau, La Presse, Montréal, 20 septembre, p. A12.

Mannequins et pilotes de F1 défileront sur la rue Sainte-Catherine, ce midi, portant des collections de designers québécois. […] Le communiqué parle de « rutilantes Jaguar » et d’un « somptueux cocktail VIP ». Pour péter de la broue, ces gens-là sont des champions. 2003, R. King, La Presse, Montréal, 12 juin, p. F4. 

J’étais […] au petit cocktail à l’hôtel de ville qui précédait l’avant-première […], là où une grande partie du gratin trifluvien avait été conviée, pour péter de la broue, se raconter des histoires, s’envoyer des faux sourires et s’épier pour savoir qui jase avec qui, pendant combien de temps et quel plaisir chacun en éprouve. 2004, J.‑M. Beaudoin, Le Nouvelliste, Trois-Rivières, 3 juillet, p. 3. 

Ce gars-là, c’est juste un vendeur de boucane… un pelleteux de nuages, comme dit mon père. Y a pété de la belle broue à ma mère, pis elle, la tarte, elle est tombée en amour avec lui, et là, elle tripe comme une petite adolescente boutonneuse qui n’a jamais eu de chum avant dans sa vie. 2012, L. Gélinas, C’est la faute à Ovechkin, t. 1, p. 79.

On va se la jouer! On va péter de la broue! On va louer une Lamborghini pour épater la galerie, se rincer la bouche au champagne et fumer des cigares gros comme les mollets de Gérard Depardieu! 2022, R. Martineau, Le Journal de Montréal, 8 juin, p. 8.

 Péteux, péteuse de broue (ou, plus rarement, péteur de broue) : personne qui parle en amplifiant les faits, en déguisant la vérité, en donnant l’impression de tout savoir; personne qui se donne beaucoup d’importance, qui cherche visiblement à impressionner les autres (par ses paroles, son attitude, son apparence, ses possessions matérielles, etc.).

C’est rien qu’un (maudit) péteux de broue.

On dit que… [titre] [/] Fernand (Ti-Cou Fin) Grenier, président du Club des Petteux de Broue a défendu à ses membres de prendre un verre, de jouer aux cartes ou même de porter de la boisson sur eux. 1946, L’Écho de Saint-Justin, 27 décembre, p. 11 (chron. humor.).

Il y a aussi la [commère] discrète : celle qui par quelques coups sur les tuyaux et ceci au moyen d’un code déterminé pressera son amie de l’étage supérieur à se précipiter à la fenêtre pour regarder la « péteuse de broue » d’en face qui « étrenne » son manteau en imitation de « seal ». 1955, L’Écho de Louiseville, 16 juin, p. 10.

On va lé wouère, ç’t’année, parce qu’j’pense aux élections qui s’en viennent. I s’mêleront à tout l’monde pour tirer lé vers du nez pi aller rapporter ça aux autes. Dé vendus comme ça, on d’vra pas payer cher pour une peau percée comme la leur… cé gars-là, cé dé petteux d’broue, pi i connaissent rien en politique, ben défois i savent pas qui é député à Ottawa […]. 1960, L’Écho de Louiseville, 17 mars, p. 10 (chron. humor.).

Elle est un cas de garde partagée : sa mère est accotée sur la rue Mentana avec le caissier surnuméraire d’une coop naturiste – ça c’est correct –, mais son père a refait sa vie à l’autre bout du monde, sur la rue Durocher, ce qui a pour résultat imbécile qu’elle perd la moitié de son temps ailleurs, dans une ville de péteux de broue, Outremont! 1987, Fr. Noël, Myriam première, p. 49.

L’ambiance était particulièrement détendue chez les Boily à peine une demi-heure après l’arrivée de cet invité tant attendu et tellement appréhendé! « C’est pas un péteux de broue comme les autres médecins que je connais », songeait-il. 1993, S. L. Norris, La pucelle, p. 252. 

J’suis pas surpris de te voir sortir avec le petit nouveau, poursuivit-il en désignant Julien d’un mouvement du menton, y ressemble à tout ce qu’on n’est pas avec son petit foulard fency et son accent de péteux de broue. Le monde au village commence d’ailleurs à se demander ce qu’il est venu foutre ici. 2016, A. Beaulieu, L’interrogatoire de Salim Belfakir, p. 207.

 (En fonction adj.). 

Ne me parlez plus de poésie poisseuse péteuse de broue qui parade et pétarade [/] Désormais, je ne fais plus dans la dentelle [/] Car je la sens [/] Elle est bien réelle [/] Solitude intraveineuse [/] dans toutes mes parcelles[.] 2005, C. Laurendeau, Les sourires de vos partiels, Tric Trac, février, p. 27.

 Pétage de broue : action de chercher à attirer l’attention par le biais de paroles, d’attitudes ou de démonstrations hâbleuses, prétentieuses. 

La protestation de notre bon ami de Québec […] contre le prétendu consortium du hockey organisé donnera-t-elle lieu à un nouveau pétage de broue? Dans le monde compliqué où nous vivons, la centralisation semble de mise. Non seulement dans la vie administrative et sociale mais dans les formules internationales de sécurité collective, voire même de la survivance de la liberté individuelle menacée par les États totalitaires. 1951, Ch. Daoust, Le Droit, Ottawa, 20 septembre, p. 15.

Le nœud étouffant s’était desserré en Lanthier, à l’évocation de ses souvenirs d’Angleterre. On l’avait tant maudite, la fameuse île, – mais qui ne serait pas prêt, pour y retourner, à donner sa chemise et beaucoup davantage? Le blitz de Londres, le McNaughton Circus, le Piccadilly Circus, le « Dome » de Brighton où on avait tant dansé, les bagarres de pub, les raids incendiaires, les femmes, la bière et tout le reste, – tout l’énorme « pétage de broue » de l’Armée canadienne qui aurait pu faire sauter l’Île. 1954, J. Vaillancourt, Les Canadiens errants, p. 118‑119.

Aussi disait-on le château pour désigner la propriété des Driscoll. Terme commode pouvant tout accueillir : le plus souvent, simple repère, ou marque de respect, d’admiration, d’envie, d’ironie ou de ressentiment parfois pour ses occupants qui, quoique polis, se montraient peu liants. Les mieux renseignés savaient que pour soutenir des prétentions à la haute il faut des terres d’une étendue autre et d’un meilleur rendement. […] Quand ils disaient château, c’était pour dire tape-à-l’œil, cache-misère, en tout cas pétage de broue ou de bretelles. 1990, G. Tougas, La mauvaise foi, p. 111.

Elle en but une grande gorgée [d’un vin], sans le humer au préalable, sans le faire tournoyer dans sa bouche, sans émettre ensuite des commentaires ineptes à propos de goût de cassis et de tannins soutenus. Bouquet, robe, passage en bouche, tout cela n’était que du pétage de broue inventé par les poivrots pour plaquer un verni de distinction sur cette basse activité : picoler. 2013, Fr. Blais, La classe de madame Valérie, p. 393.

 Par attén., Rare, vieilli(Se) péter une (de la) broue (avec, à qqn), faire péter de la (une) broue, péter sa broue : bavarder, s’entretenir familièrement (avec qqn).

« Il y a quelques années, […] j’étais […] dans le Corps d’Aviation Royal Canadien à Calgary. Un soir, je me suis mis à péter une broue au sujet du hockey avec un caporal-aviateur du nom de Will Côté. Dans le temps, j’ignorais même le nom du caporal[,] mais je savais qu’il était un fouilleur, un chercheur, un encyclopédique, avec la rage du hockey. » 1949, Le Droit, Ottawa, 1er avril, p. 17.

En revenant, il ne fut pas étonné que Vachon lui parlât de sa famille. Sa femme s’inquiétait toujours de lui, l’aînée de ses deux filles allait faire sa première communion. Vachon était un garçon sympathique. Chacun avait sa manière de « péter sa broue », selon l’expression inventée dans les tavernes par les soldats; le lance-caporal se rattachait, lui, à la phalange des intimistes et des sentimentaux refoulés. Il parlait de sa famille, de la ville de Montréal qui était tout ensemble sa patrie, son royaume et sa terre promise, et il parlait de son métier de laitier, le seul qu’il connût au monde. 1954, J. Vaillancourt, Les Canadiens errants, p. 79‑80. 

À la Kent House et au café Clover, au bistro de Toe Blake et chez le photogénique Jim Orlando, tout le monde parle de boxe. Les parieurs sérieux sortent les billets de banque qui sont déposés dans les caisses respectables. Les autres font péter de la broue. Des Maritimes et de la Nouvelle-Angleterre, les nombreux admirateurs de Durelle se sont informés de Don Allard […]. 1959, Ch. Daoust, Le Droit, Ottawa, 12 août, p. 13.

« Le seul ennui dans le monde enchanteur du sport demeure la pénurie du grand talent dans tous les domaines. La boxe particulièrement. Mais le temps saura guérir bien des bobos. J’espère que, l’un de ces jours, je me ramasserai dans votre adorable petite ville, pour casser la croûte et faire péter une broue […]. [ »] 1960, Le Droit, Ottawa, 5 mai, p. 14. 

Sous peu, Réjean Houle entend inviter son ex-compagnon Marc Tardif à le rencontrer à mi-chemin entre Montréal et Québec… « On pourrait se rencontrer à Drummondville, par exemple, pour bavarder pendant un bon moment, dit-il. Là, on va s’en péter de la broue! » 1976, Le Soleil, Québec, 9 novembre, p. D1.

 Rare, vieilliPéter une (petite) broue (à qqn), (faire) péter (de) la broue : faire une réprimande, une remontrance (à qqn). 

J’ai fixé une inspection pour demain matin, ayant trouvé que mes « surveyors », les enfants gâtés du régiment, se négligent un peu dans leur maintien. Donc, […] demain matin, je vais leur « petter une petite broue ». 1944, dans J. Gouin, Lettres de guerre d’un Québécois, 1975, p. 175.

À tout événement, c’est au tour du douceureux [sic] […] pilote des Alouettes, qui en est à sa troisième saison comme mentor à Montréal, à faire « péter la broue ». En plus de critiquer le mauvais rendement de deux de ses joueurs-clef [sic], [il] déplore le mode d’arbitrage dans le « Big Four » [= quatre principales ligues sportives professionnelles aux États-Unis et au Canada]. En vue d’améliorer le travail des arbitres, la ligue devrait exiger des rapports des instructeurs après chaque partie. 1954, Ch. Daoust, Le Droit, Ottawa, 26 octobre, p. 17.

La rage au cœur leur fait « péter de la broue » [titre] [/] On constate à tous les jours, que certains citoyens prennent un malin plaisir à mêler les cartes, à semer la discorde, à interpréter les faits et gestes des individus ou des associations à leurs façons, en cherchant la bête noire partout, en criant au scandale et en tachant [sic] de couvrir les autres de honte et de ridicule. 1957, G. A., Le Guide, Sainte-Marie-de-Beauce, 20 novembre, p. [1].

Histoire

Du germanique *brod, signifiant « bouillon », qui est passé à l’ancien français sous la forme breu (v. FEW germ. *brod 151, 291b-293a); la forme broue est attestée en moyen français (au XVe s.) au sens de « brouillard » (v. DMF).

I1Depuis 1817. Héritage des parlers de France, cet emploi a été relevé dans les régions du Nord-Ouest (Maine, Normandie, Perche, îles anglo-normandes). V. FEW germ. *brod 151, 292b et 293a; v. aussi BeaucNorm, s.v. brôo, broue, breue, BourdNorm, s.v. broe, DottMaine, s.v. bró, DudPerch, LepBNorm, s.v. bröe, et LepNormand, s.v. bröe, MoisAnglN, s.v. broe, MoisyNorm, s.v. broe, broue, PontBeauce. 2Depuis 1931. Cet emploi découle probablement, par métonymie, du sens 1. On observe d’ailleurs, en français, un phénomène de métonymie tout à fait similaire avec le mot mousse, qui a d’abord servi à nommer les bulles de gaz accumulées à la surface d’un liquide sous pression, puis la bière elle-même (v. Robert 1985‑2001, qui rattache le sens de « bière » au langage familier). Malgré tout, il n’est pas exclu que broue au sens de « bière » soit plutôt issu de l’anglais nord-américain brew, attesté depuis le début du XXe s. (v. RandomSlang, Gage 1997). Cette hypothèse semble toutefois moins plausible que la première, étant donné que broue « mousse (de bière) » est, depuis longtemps, bien implanté en français québécois. Péter de la broue « boire de la bière », depuis 1974, expression jouant sur un double sens, étant donné que péter de la broue signifie également « parler de façon prétentieuse » (v. sens II.2). C’est (ce n’est pas) de la petite broue, depuis 1965. Expression forgée sur le même modèle que la locution c’est (ce n’est pas) de la petite bière, attestée en français depuis la fin du XVIIIe s. (v. Robert 1985‑2001, s.v. bière). Broue-pub, depuis 1998 (La Presse, Montréal, 4 juillet, p. D10 : Broue-pub du sergent recruteur). Calque de l’anglais brew pub (v. CanOD 2001). 3Au sens de « bave blanchâtre qui s’écoule de la gueule de certains animaux », depuis 1894 (Clapin); au sens de « bave mousseuse qui vient aux lèvres d’une personne », depuis 1882. Ces deux emplois sont un héritage des parlers de France, en particulier de ceux du Nord-Ouest : le premier a été relevé en Normandie et dans le Perche (v. FEW germ. *brod 151, 292b et 293a; v. aussi BeaucNorm, s.v. brôo, broue, breue, DudPerch et MoisyNorm, s.v. broe, broue); le second a été relevé en Normandie, dans les îles anglo-normandes et dans le Perche (v. DubNorm, s.v. broe, broue, DudPerch, LeMJers, s.v. breue, MoisyAnglN, s.v. broe). 4Depuis 1910. Héritage des parlers de France, cet emploi est attesté en Normandie et dans le Maine (v. FEW id., 293a et MontMaine3), parfois spécifiquement en parlant de la sueur d’un cheval (v. BeaucNorm, s.v. brôo, broue, breue; BourdNorm, s.v. broe). Avoir de la broue dans le toupet, depuis 1970 (v. PPQ 2310 : avoir la broue au toupet « être en transpiration »). Cet emploi, qui compte parmi les innovations du français québécois, découle de broue « sueur abondante et épaisse » et de toupet « rideau de cheveux qui couvre le front sur toute sa largeur » (v. Usito), qui renvoient l’image d’une personne dont la sueur au front témoigne d’une activité intense, voire d’une agitation ou d’une surexcitation élevée.

II1Depuis 1881. Cet emploi figuré, le plus souvent attesté dans la locution faire de la broue, semble découler de l’image d’un liquide qu’on agite et qui produit de la mousse et dont le volume s’amplifie. On peut d’ailleurs mettre en lien faire de la broue avec la locution faire de la mousse, attestée depuis 1878 (v. TLF, s.v. mousse) et qui signifie « faire des embarras, chercher à briller, faire grand étalage de toilette » (v. ouvr. cité), « donner de l’importance (à qqch., à soi-même) » (v. Robert 2001, s.v. mousse) et « se faire valoir » (v. Quillet 1937 et 1948). On peut aussi établir un parallèle avec faire mousser qqch./qqn « vanter, mettre exagérément en valeur, donner une importance exagérée à », locution attestée en français depuis la fin du XVIIIe s. (v. TLF, s.v. mousser). Ces emplois de mousse et de mousser véhiculent également la même idée d’« amplification » qui, à son tour, mène à celle d’exagération. Faiseur de broue, depuis 1944. 2Depuis 1949. Péter de la broue paraît être une variante de faire de la broue, mais dont le sens procède d’un processus de renforcement par rapport à cette locution plus ancienne. Elle pourrait avoir été formée sur le modèle de péter le feu « être débordant d’entrain, de vitalité » (v. TLF, s.v. péter), ce qui s’accorderait avec l’image d’une production excessive de « broue » (broue pris au sens II.1). Péteux, péteuse de broue, depuis 1946. Pétage de broue, depuis 1951. (Se) péter une (de la) broue (avec, à qqn) et variantes « bavarder, s’entretenir familièrement (avec qqn) », depuis 1949; probablement le résultat d’une atténuation de l’emploi précédent. On ne peut toutefois totalement écarter l’hypothèse que, dans cet emploi, le mot broue aurait le sens de « bière » (sens I.2) et que, par métonymie (l’effet par la cause), l’expression aurait pris le sens de « bavarder », puisqu’il s’agit d’une activité qui caractérise normalement la prise d’un verre avec qqn. En revanche, le cas échéant, le recours au verbe péter paraît problématique, puisqu’il peut difficilement prendre le sens de « prendre » ou de « boire », sauf dans l’expression péter de la broue figurant sous I.2 qui, justement, semble reposer sur une réinterprétation plaisante du présent emploi. Péter une (petite) broue (à qqn) et variante « faire une réprimande, une remontrance (à qqn) », depuis 1944. Pourrait résulter de broue « bave mousseuse qui vient aux lèvres d’une personne en colère » (sens I.3); cp. avec se faire de la mousse « se mettre en colère », attesté en français depuis 1920 (v. TLF, s.v. mousse).

Nouvelle entrée de la deuxième édition

Dernière révision : décembre 2024
Trésor de la langue française au Québec. (2024). Broue. Dictionnaire historique du français québécois (2e éd. rev. et augm.; R. Vézina et C. Poirier, dir.). Université Laval. Consulté le 16 janvier 2025.
https://www.dhfq.org/article/broue