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BEURRÉE [bœʀe]
n. f.

Rem.

Prononciation populaire [bøʀe].

1

Beurrée ou beurrée de pain : tranche de pain recouverte de beurre.

Donner une beurrée à un enfant. Se contenter d’une beurrée de pain pour dîner. Faire, préparer une beurrée.

 Beurrée de (suivi d’un subst. désignant une substance alimentaire) : tranche de pain recouverte de (beurre ou, par ext., de tout autre aliment facile à tartiner).

Une beurrée de beurre, de beurre de peanut. Une beurrée de graisse de rôti, de cretons. Une beurrée de sirop, de mélasse, de confiture.

Une beurrée de crème, recouverte de crème, sur laquelle on ajoute du sucre d’érable, de la cassonade ou du sucre blanc.

SYN. tartine.

Rem.En France, beurrée, en parlant d’une tranche de pain recouverte de beurre, est considéré comme vieilli ou régional (voir Histoire).

Puis, le panier s’ouvrait, et c’était la collation, sur le bord du fossé. [...] Ah! le bon pain! le bon beurre! le bon lait! Et de quel appétit nous mordions dans les beurrées! 1914, A. Rivard, Chez nous, p. 55.

Il dînait seul sur les grands bancs de la salle de récréation, près de la petite fontaine où il allait boire en mangeant. Son goûter, très modeste, se composait invariablement de beurrées de pain de ménage accompagnées de radis, de feuilles de salade, ou de tomates et d’une pomme quand c’était l’été [...]. 1946, F. Leclerc, Pieds nus dans l’aube, p. 116.

Il aimait bien la crème, elle dit, des beurrées de crème, elle dit, avec du sucre d’érable dessus. Elle fait des beurrées de crème, pis elle s’en va dans porte, puis elle décide de lui montrer la beurrée. 1948, Sainte-Marie (Beauce), AFEUL, L. Lacourcière 635‑636 (âge de l’informatrice : n. d.).

– Je me garde tout seul. Je suis assez vieux. – Et qui te fait à manger? – Personne. Je fouille dans le frigidaire, puis je mange des Mae West, des beurrées de beurre de pinotes, toutes sortes d’affaires, répondit l’autre, étonné par la question. 1981, Y. Beauchemin, Le matou, p. 82.

Chez nous, il n’y avait jamais rien à manger! Combien de fois me suis-je retrouvée à l’école sans déjeuner, sans dîner... sinon d’une beurrée de moutarde? 1990, M. Claudais, Comme un orage en février..., p. 84.

Or, l’Abitibi a beaucoup changé. L’époque des héroïques défricheurs trompant leur faim à grandes beurrées de mélasse est révolue depuis belle lurette. 1992, Châtelaine, octobre, p. 38.

 (Dérivé). VieuxBeurrette n. f. (voir p. ex. Dionne).

2

Fig., fam. (Surtout dans coûter une beurrée). Forte somme d’argent.

– Zézette : Les beaux œufs frais papa! Tiens! achète-les! – M. Millote : Elle a pris les œufs de mes couveuses! aie! bon! elle les a échappés! Ben ça va vous coûter une beurrée! 1961, O. Légaré, Zézette, 13 mai, p. 8 (radio).

Vous autres, là, vous pouvez peut-être pas vous en rendre compte vu que vous m’voyez à prix d’aubaine [...]. Ah ben heye! souffrance! profitez-en; parce quand j’vas être rendu à la Place des Arts, là vous allez la payer, la beurrée... 1983, A. Montmorency, Souffrance que j’ai du fun!, p. 73.

VieilliAttendre une beurrée, longtemps, très longtemps. (GPFC).

VieilliRéprimande.

Tu vas attraper une beurrée. (GPFC, PPQ 1844).

VieilliFausse promesse, tromperie.

Le pro-maire [...] promet de presser le Conseil Economique du Saguenay d’envoyer une délégation à Ottawa. Dans la salle, on entend des grondements : ‘Encore des beurrées!’ 1950, Vers demain, Montréal, 1er janvier, p. 7.

Histoire

1Depuis 1810 (Viger 141 : beurrée de graisse, de sirop, de crême). Emplois hérités de France; beurrée « tranche de pain recouverte de beurre » est attesté en français depuis le XVIIe s. (v. FEW būtyrum 1, 664a), mais est considéré comme vieux ou régional depuis les années 1960 (v. PRobert 1967); beurrée de beurre et, par extension, de confiture, etc. est attesté dans les parlers du Nord-Ouest et du Centre (v. VerrAnj, CormMauges, DottMaine 72, LepBNorm, LeMJers et FEW id.). La prononciation [bøʀe] y est aussi signalée (v. CormMauges et DottMaine 72). Beurrette, depuis 1855 (DictBarb). 2Depuis 1906 (FSPFC). Cp. l’emploi argotique de beurre en français, au sens d’« argent » (v. TLF, Robert 1985). Le sens de « réprimande » est attesté dans un parler du Nord-Ouest de la France (v. FEW id.); celui de « tromperie », dans le parler lorrain (v. FEW id., 664b; v. aussi beurrer, sens II.3).

Version du DHFQ 1998
Pour poursuivre votre exploration du mot beurrée, consultez notre rubrique En vedette.
Trésor de la langue française au Québec. (1998). Beurrée. Dictionnaire historique du français québécois (2e éd. rev. et augm.; R. Vézina et C. Poirier, dir.). Université Laval. Consulté le 18 avril 2024.
https://www.dhfq.org/article/beurree