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BEURRÉ, BEURRÉE [bœʀe]
adj.

Rem.

Prononciation populaire : [bøʀe].

1

Recouvert d’une couche de beurre ou d’une autre substance alimentaire.

Une tranche de pain beurrée de confiture, de mélasse.

Rem.En France, ne se dit que pour le beurre.

Je suis entré sans cérémonie dans la cuisine où les filles étaient occupées à faire le train après le souper. Comme j’étais arrivé un peu tard j’ai dû me contenter d’une tranche de pain beurrée de menasse [= mélasse]. 1880, Le Vrai Canard, Montréal, 4 septembre, p. [2].

Ils avalent des morceaux de pain beurrés de fromage. Ils ont les doigts raides, les gestes lourds. C’est le froid, c’est la fatigue et le doux dégoût de vivre. 1968, A. Major, Le vent du diable, p. 26.

Grignoter, répliqua Ovila, vous voulez rire! Savez-vous ce qu’elle a grignoté hier soir? Une aile pis une cuisse de poulet avec deux grosses tranches de pain beurrées de graisse de rôt. 1985, A. Cousture, Les filles de Caleb, t. 1, p. 307.

2

Par ext., Fam.(En parlant du corps, d’une partie du corps). Enduit, recouvert d’une substance grasse ou huileuse destinée à protéger, à guérir.

 (Spécial.). Péjor.Maquillé de façon exagérée ou maladroite.

Rem.On trouve aussi graissé, graissée dans le même sens.

 graisser (sens 2).

(Ontario). Il [Ti-Jean] sort une grosse bouteille d’onguent de dessus lui, pis il se lève avec son onguent pis il va frotter sa mère, partout, sur les tempes, sur le front [...] il voulait la faire réveiller. [...] Il recommençait encore, pis la frottait encore; pis là, elle était rendue qu’elle était toute beurrée d’onguent. 1967, ALBan, dans G. Lemieux, Les vieux m’ont conté, t. 2, 1974, p. 300.

Ses ongles étaient peints. Ses cheveux étaient teints. Ses lèvres étaient beurrées de rouge à lèvres. Sa face était graissée. Ses cheveux noirs comme de la cire à chaussures n’étaient pas peignés mais empesés, mais pris en pain. Ce n’était pas une femme, mais une peinte, une pinte, une peintre. 1967, R. Ducharme, Le nez qui voque, p. 148.

Les gars de bicycle [« les motards »] m’ont toujours excitée, moé, mais j’sais pourquoi! Mais j’me sus toujours demandé pourquoi un gars comme moé, un gars comme moé, déguisé, pis fardé, pis beurré, pis épilé, excitait tant que ça les fameux gars de bicycle! 1973, M. Tremblay, Hosanna, p. 46.

– Rita : Cé Ti-Guy qui arrive pis chus même pas maquillée. – Mario : Quand même qu’y t’verra pas toutte barbouillée pis beurrée pour une fois. 1977, J. Frigon, Ti-Jésus, bonjour, p. 80.

3

Fam.Sali, taché; barbouillé.

Avoir les mains beurrées, la face beurrée. Être tout beurré. Des murs beurrés.

Rem.On trouve aussi graissé, graissée dans le même sens.

 graisser (sens 3).

Une heure plus tard Ti-Pite rentra dans la maison paternelle tout beurré de sang. 1880, Le Vrai Canard, Montréal, 10 janvier, p. 1.

J’avais vu trois, quatre ours le long du chemin, pis j’avais une maudite peur des ours, hein. Là, je te dis que je te lâchais des gros cris là […], mais je te dis quand j’ai eu fini de mettre mes chaînes, j’étais tout beurré de vase, pis j’avais chaud, ça fait que là, j’ai monté à côte, j’ai pas eu de misère. 1973, Hébertville (Lac-Saint-Jean-Est), AFEUL, A. Fortin 54 (âge de l’informateur : 80 ans).

Les enfants se promenaient avec ça [des pommes de tire] à la main. Y en mangeaient un peu, y en laissaient la moitié sur eux autres, l’autre moitié sur le linge du grand monde. [...] Quand c’était pas ça, c’était le ketchup des frites, ou ben la moutarde des hot dogs. Y étaient beurrés jusqu’aux oreilles. 1976, B. B. Leblanc, Moi, Ovide Leblanc, j’ai pour mon dire, p. 189.

Il me montre une caisse remplie de tubes de peinture à l’huile, des potiches chargées de pinceaux plantés à l’envers, des toiles blanches montées sur des cadres de bois, des canistres de térébenthine, des pots de peinture à l’eau, d’huile de lin, de vernis, tout ça éparpillé sur une grande table beurrée de couleurs avec, à côté, une chaise droite, un banc rond, et même une sorte de banc-lit pour se reposer « quand on n’en peut plus des yeux », qu’il me dit. 1977, J.-P. Filion, Les murs de Montréal, p. 86-87.

J’ai été chercher Jina pour me donner un petit coup de main. [...] On y a mis une grosse heure, où dans son zèle et son entrain elle s’est coincé un pouce et beurrée de boue jusqu’au nombril. Elle était superbe et dégouttante [sic]. 1994, R. Ducharme, Va savoir, p. 142-143.

Histoire

De beurrer.

1Depuis 1880. 2Depuis 1967. Cp. beurré « enduit d’une substance pâteuse quelconque » (dans TLF qui s’appuie sur un exemple d’Aragon : les cheveux beurrés, l’œil peint). 3Depuis 1880.

Version du DHFQ 1998
Trésor de la langue française au Québec. (1998). Beurré, beurrée. Dictionnaire historique du français québécois (2e éd. rev. et augm.; R. Vézina et C. Poirier, dir.). Université Laval. Consulté le 9 décembre 2024.
https://www.dhfq.org/article/beurre-beurree