BEIGNE [bɛɲ]
n.
n. m. ou région.f. (surtout dans Charlevoix et au Saguenay–Lac‑Saint‑Jean).
Pâtisserie traditionnelle généralement en forme d’anneau, faite d’une pâte sucrée que l’on fait frire dans la graisse ou dans l’huile.
2022, TLFQ, Pâte à beigne [photo]. 2021, TLFQ, Faire des beignes pour le temps [photo].Pâte à beigne. Faire des beignes pour le temps des fêtes. Rouler un beigne dans le sucre en poudre.
Pâtisserie de même type, de confection commerciale, en forme d’anneau ou fourrée à la crème ou à la confiture.
Des beignes trempés dans le miel. Des beignes au chocolat. Des beignes nature, sans garniture. Beignes glacés au chocolat, à l’érable. Beignes fourrés à la crème, aux fraises.
Rem.On trouve aussi beignet (surtout dans la littérature) pour désigner ces pâtisseries.
C’étaient des beignes cuits dans l’huile de pourcil; tout le monde y mordait à belles dents. Je fis de même, et ma foi! ce n’était pas mauvais. 1874, Faucher de Saint‑Maurice, À la brunante, p. 273.
Les gens avaient faim quand on était rendu vers dix heures et demie, onze heures [le soir]. Alors là, on commençait à servir le café et puis, maman avait souvent fait des beignes. […] Alors, on passait des beignes, ou on passait des petites galettes, des petits biscuits ou des choses du genre. Et puis, on prenait une tasse de café avec ça. 1970, Baie-des-Sables (Matane), AFEUL, Fr. Bernier 38 (âge de l’informatrice : n. d.).
Les jeunes enfants dînèrent de quelques beignes, reçurent des taloches et montèrent dormir dans les niches creusées parmi les vêtements empilés sur les lits. 1966, M. Ferron, La fin des loups-garous, p. 102.
[...] au numéro neuf [de la rue Haldimand], le Petit Château où mon compagnon d’université avait logé sous les combles et partagé avec moi ses repas de patates, cretons et beignes au miel que nous savourions dehors sur un toit voisin du Château Frontenac [...]. 1970, J. Poulin, Le cœur de la baleine bleue, p. 36.
Les gens avaient faim quand on était rendu vers dix heures et demie, onze heures [le soir]. Alors là, on commençait à servir le café et puis, maman avait souvent fait des beignes. […] Alors, on passait des beignes, ou on passait des petites galettes, des petits biscuits ou des choses du genre. Et puis, on prenait une tasse de café avec ça. 1970, Baie-des-Sables (Matane), AFEUL, Fr. Bernier 38 (âge de l’informatrice : n. d.).
Et elle roulait sa pâte avec énergie, découpait ses beignets avec un gobelet ou un verre saupoudré de farine et nous permettait de percer les beignes avec des dés à coudre. On mangeait ces « nombrils de pâte » en riant et on se battait pour gratter les fonds de plats qui avaient contenu les divers « crémages », comme on appelait les glaces des gâteaux. 1972, Cl. Jasmin, La Petite Patrie, p. 69.
La recette que ma mère m’a transmise ne contenait aucune mesure. Pour le beurre, elle disait « gros comme un œuf », pour le sucre, « deux ou trois poignées » et pour la grosseur du beigne, « grand comme le verre de cognac de papa ». 1978, St. Moissan et A. Lebel, Les petits plats de nos grand-mères, p. 113.
Si nous satisfaisons notre appétit avec de bonnes choses, nous avons moins de chances d’être affamés plus tard et de sauter sur des aliments que nous ne mangerons pas autrement, comme des beignes, des muffins commerciaux, des croissants, des danoises ou des chips. 2000, Progrès-dimanche, Chicoutimi, 27 août, p. D12.
Dans nos vies, le hockey sert à vendre de la bière et des camions, mais aussi des burgers, des beignes et bien d’autres choses. Il sert à rassembler des familles et des villages, mais aussi à produire des bagarres générales entre enfants sur la patinoire et entre parents dans les gradins. 2014, R. King, La Presse, Montréal, 6 janvier, sports, p. 3.
Dans les plans [d’un projet de développement commercial] se trouvent notamment une station d’essence, un dépanneur, un restaurant de style café-beigne et plusieurs autres commerces et service de proximité. 2020, Le Journal Les 2 vallées, Gatineau, 3 juin, p. 2.
(Emplois analogiques). Anneau de caoutchouc gonflable à usage thérapeutique sur lequel on s’assoit de manière à réduire la douleur périnéale ou anale.
Au lendemain de son accouchement, [...] elle s’asseyait un peu de travers sur un « beigne » gonflable, prêté par une copine compatissante (qui a connu, elle aussi, les affres de l’épisiotomie). 1993, Châtelaine, mai, p. 140.
Sorte de chignon en forme d’anneau.
Je revois cette vieille dame, aux cheveux oxygénés ramenés en « beigne » sur le sommet de sa tête. 1979, La Presse, Montréal, 28 juillet, p. 1.
(Parfois en apposition à style ou type). Poils faciaux (barbe et moustache) rasés de sorte qu’ils prennent ainsi une forme circulaire autour de la bouche.
Porter un beigne. Avoir une barbe de style beigne.
Quant au suspect, il s’agit d’un individu âgé d’une quarantaine d’années, mesurant environ 1 m 80 et pesant 86 kilos. Il a peu de cheveux et ceux‑ci sont blonds. Il porterait aussi la barbe (communément appelé un beigne). Il circulait à bord d’une Honda Civic bleue. 2004, Le Nouvelliste, Trois‑Rivières, 16 janvier, p. 2.
On peut le voir à chacun des stades de la session de rasage. Avec sa grosse barbe, avec un « beigne », avec un pinch, et avec juste la moustache. Bien sûr, l’animateur n’allait pas garder une pilosité faciale de la sorte et il a fini par se raser complètement. Mais ça nous a tout de même permis de rire un bon coup. 2018, Monde de stars (site Web), 27 mars.
Plais.Taille épaisse, bourrelet au niveau de la ceinture.
Avoir un (bon) beigne. Faire du beigne.
Auparavant, je subissais ma ville et j’étais dans le trou; aujourd’hui, j’en profite pleinement au risque de faire du beigne parce que je ne vais plus au dépanneur à pied. 1997, J. Blanchette, Le Devoir, Montréal, 26 septembre 1997, p. B1.
Manœuvre de dérapage circulaire effectuée avec un véhicule motorisé; traces sur le sol qui en résultent.
Faire un beigne, région.faire de la beigne. Tracer des beignes.
Après la finale opposant ces camions, ils ont présenté, dans le cadre de l’épreuve style libre, leur nouveauté : le concours de beignes. C’est Avenger qui a réussi le plus de beignes allant au-delà de quatre tours. Le tourbillon de poussière issu des beignes d’Avenger a été si fort, telle une tempête dans le désert, que le Bigfoot a été invisible plusieurs longues secondes. 2002, Le Nouvelliste, Trois‑Rivières, 10 août, p. 9.
Le roi du rallye et de la drift n’a pas perdu une seule seconde. Dans la plus récente vidéo mise sur sa page Facebook, on le voit au volant de sa voiture. Fidèle à son habitude, il ne ménage pas la voiture à bord de laquelle il se trouve. Cette fois-ci, il a enfilé les beignes les uns après les autres et s’est rapidement retrouvé au cœur d’un nuage de caoutchouc brûlé. 2017, Journal de Montréal (site Web), 10 octobre.
Néol.Beignerie n. f. Établissement spécialisé dans la fabrication et la vente de beignes.
Rem.Terme recommandé par l’OQLF (voir OLF‑Avis4, no 185).
La vitrine d’une beignerie brillait en face de lui, seul point d’animation dans la rue déserte. La faim le prit. 1989, Y. Beauchemin, Juliette Pomerleau, p. 299.
Par anal., Très fam. Derrière (d’une personne); cul.
Se pogner le beigne : paresser, ne pas faire d’effort; perdre son temps.
La rengaine est connue, les employés de l’État sont grassement payés et « y s’pognent la beigne su’ à [sic] job »; le ministre du Trésor (on aimerait bien savoir ce qu’il y a de caché dans ce fameux trésor…) ne fait pas exception à la règle et alimente avec un plaisir malicieux cette croyance populaire en gelant les salaires des employés provinciaux. 1993, A. Côté, La Revue, Terrebonne, 18 mai, p. A4.
Michel Donato se tire bien d’affaire. Mieux que d’autres, c’est vrai. Mais il ne croit pas vraiment à sa chance : « Dans ce métier, explique-t-il, si tu veux avoir de l’ouvrage, il faut que tu crées ta situation. Autrement dit, il faut que tu te grouilles le cul! » Selon lui, les musiciens de jazz peuvent vivre à Montréal même si le marché est restreint. Encore faut-il s’ouvrir à différentes options. « Ceux qui se plaignent c’est parce qu’ils se pognent le beigne! affirme-t-il. Il faut préparer sa job et créer la demande. » 1995, La Presse, Montréal, 9 juillet, p. A1.
« Pourtant, on s’est bien adapté aux 2e et 3e sets. On a joué avec intensité et combativité. Mais on s’est assis sur notre beigne avec une priorité de 2‑1. » 1996, Le Soleil, Québec, 6 janvier, p. S13.
J’espère qu’ils vont rester en grève très longtemps et que par la suite la municipalité change tous ses employés. Si la municipalité peut tenir son bout. Je suis bien tanné de les voir se pogner le beigne car j’ai vu plusieurs exemples d’abus. 2000, Le Sentier, Saint‑Hippolyte, août, p. 3.
J’ai souvent soupçonné Mignon de ne pas apprécier à sa juste valeur mon dévouement exemplaire à la cause du farniente. Et là, maintenant, alors que je fais vaillamment bronzette, je crois deviner dans ses propos une légère ironie. Genre que dans le fond, je serais en train de me pogner le beigne. 2004, R. Germain, La Presse, Montréal, 26 juin, actuel, p. 5.
Êtes-vous comme moi, en cette période de l’année où le froid, la pluie, le vent et l’obscurité mènent nos vies? Tout ce qu’on a envie de faire dans ce temps-là, c’est d’enfiler son kit de relaxation et de planifier dans les moindres détails une journée végé. Je ne vous parle pas ici de bouffe végétarienne. Non. Végé comme dans végéter. Ne rien faire. Se pogner le beigne. Chienner. 2006, I. Authier, La Voix de l’Est, Granby, 28 octobre, p. 10.
J’ai quinze kilos à perdre et ce n’est pas en restant assise sur mon beigne que je vais y arriver! 2009, La Seigneurie, Boucherville, 9 octobre, p. 16.
J’ai pas toujours envie de lui shooter des balles après l’école, pour tout vous dire. Des fois j’ai juste envie de faire le souper et de me pogner le beigne en me demandant ce qui va se passer dans L’auberge du chien noir [feuilleton télévisé]. Mais ce soir‑là, j’avais envie de lui tirer des balles, au petit. Pis de le couvrir de baisers. 2016, P. Lagacé, La Presse, Montréal, 2 avril, p. A7.
Trou de beigne : pâtisserie faite de la boule de pâte retirée du centre d’un beigne non cuit, frite et traditionnellement consommée saupoudrée de sucre en poudre.
2021, TLFQ, Trous de beigne [photo].Alimentation du jour : trous de beignes à la Savignac, graisse à la Crémazie, compote au bain-Marie, champignons de parcs publics. Éviter les chansons tristes. 1931, Le Goglu, Montréal, 8 mai, p. 2.
Tous les clichés imaginables y étaient : la dinde rôtie farcie, les tourtières pur porc arrosées de ketchup Heinz, les cretons, les marinades variées, sucrées et salées [...], la gelée d’atacas, les patates pilées, les petits pois numéro deux, les beignes, les trous de beignes, les tartes aux pommes, la bûche de Noël et même, choses rarissimes de nos jours, la bonne vieille tarte au citron meringuée et les cream puff fourrés à la crème fouettée. 1986, M. Tremblay, Le cœur découvert, p. 295.
« Je garde de merveilleux souvenirs de l’époque où je faisais les trous de beigne pour aider ma grand-mère. À l’aide d’un mini emporte-pièce usé par les années, je m’acquittais de ma tâche avec précision. Je me sentais très utile et j’adorais ces moments où je ressortais enfarinée mais heureuse », se souvient Christine. 2012, Le Journal de Joliette, 26 décembre, p. 21.
L’activité, qui existe depuis six ans, consiste à chercher des boules de Noël dans la sapinière en suivant des indices menant à un cadeau pour chaque enfant. S’ajoute à cela le tirage de quatre lutins. Les participants ont aussi dégusté un chocolat chaud et des trous de beignes. 2018, L’Oie blanche, Montmagny, 19 décembre, p. 39.
La franchise de Québec compte d’ailleurs sur la variété de leurs produits pour faire face à la concurrence. « Notre produit vedette est évidemment le beignet ou trou de beigne entièrement végétal que l’on peut garnir de multiples façons. […] ». 2020, Beauport Express, 19 août, p. 2.
Fig. Forme d’étalement urbain résultant de la désertion du centre d’une ville au profit des quartiers qui l’entourent, ou d’une ville importante au profit des banlieues.
Montréal est triste. Le « trou de beigne » s’agrandit en faveur de la banlieue. Des usines ferment ou déménagent. 1991, La Presse, Montréal, 5 novembre, p. B2.
Trou de beigne ou rondelles d’oignons, le phénomène de l’étalement urbain touche toutes les grandes villes. Peut-on rester urbain et roupiller en banlieue? 1997, J. Blanchette, Le Devoir, Montréal, 26 septembre, p. B1.
Pour la promotion et le développement de la qualité de vie dans les quartiers montréalais et pour stopper l’effet ‘trou-de-beigne’ si longtemps décrié [...]. 1998, Le Devoir, Montréal, 8 janvier, p. A7.
Les jeunes familles s’en vont vers de nouveaux développements, ailleurs à Laval, ou dans les villes de la deuxième couronne nord, et amènent avec eux leurs taxes scolaires. Là, on construit de nouvelles écoles et on en rénove, pendant que le trou du beigne urbain s’agrandit. 2000, La Presse, Montréal, 3 avril, p. A5.
Le phénomène du trou de beigne saute aux yeux à Jonquière. Tant le commerce en général que la construction résidentielle ont connu une croissance substantielle dans différents secteurs de l’arrondissement, laissant des centres-villes en grande difficulté. D’ailleurs, c’est le discours des conseilleurs jonquiérois : ils souhaitent des investissements publics pour relancer les centres-villes. 2018, Le Quotidien (site Web), Saguenay, 8 septembre.
n. Fig., fam. Personne dénuée d’intelligence, d’une grande naïveté, gauche dans son comportement, son maintien.
Un beau beigne. (En fonction attribut). Avoir l’air beigne.
Rem.Moins répandu que beignet.
Jean-Guy, avec le sourire : Autrement dit, c’que vous nous dites, c’est qu’on est peut-être tarte mais y a moyen de faire des gâteaux avec nous autres. Stéphane, blagueur : Écoute, je l’sais pas si t’es tarte, moi... Jean-Guy : Chus pas tarte, chus beigne. 1981, Cl. Meunier et L. Saia, Appelez-moi Stéphane, p. 18.
Plus tard, j’ai compris que les touristes étaient souvent beignes : crédules et ignorants. Ils commandaient du Chambolles-Musigny, on leur servait du vin ontarien; ils dégustaient. Ils photographiaient les calèches. Se perdaient dès qu’ils quittaient la rue des Remparts; cherchaient toujours le chemin du Château Frontenac; trouvaient tout beau et intéressant. 1992, B. Aubin, L’Actualité, 15 mars, p. 14.
Un jour, il y a quelques années, j’ai été témoin d’une collision entre un cycliste et une voiture qui s’apprêtait à tourner dans le stationnement d’un Tim Hortons, à une intersection. […] Malheureusement, il y avait un cycliste. Il s’est engouffré sous ses roues. […] Maintenant, en voiture, je regarde toujours huit fois avant de tourner à une intersection pour être sûr qu’aucun vélo ne se cache dans mon angle mort. J’ai l’air un peu beigne, mais c’est ça. 2015, Métro (site Web), Montréal, 27 juillet.
fam.Passer les beignes à qqn, le battre, le réprimander, le semoncer.
Se faire passer les beignes, passer aux beignes.
Rem.Relevé un peu partout au Québec, mais n’est pas d’un emploi général.
Un curieux a relevé dans les feuilles les nombreux synonymes de « soufflet » il a trouvé : Gifle, claque, calotte, pain, gnon, torgnole, mornifle, beigne (passer les beignes) horion, giroflée à cinq feuilles, tapins. En revanche on prétend qu’il n’existe pas de synonyme de « caresse ». Est-ce assez humain. 1901, Les Débats, Montréal, 21 juillet, p. 1.
Quand je me suis réveillé sur ce bougre de bateau, j’ai pas besoin de vous dire que j’ai été épaté, pas rien qu’un petit brin, moi qui me croyais au Pôle Nord, en train d’attendre que la ville de Montréal passe pour embarquer ; mais comme vous le savez, Ladébauche est pas un homme à se faire de la bile pour des fonds de téquiéres, aussi, m’as dire comme on dit, j’ai eu betôt fait de reprendre mes sens et de passer les beignes aux farceurs de matelots qui m’avaient réveillé : ce qui fait que je suis venu échouer à New-York, rapport que le bateau arrêtait pas avant et que le capitaine voulait pas me donner de « transfert ». 1905, La Presse, Montréal, 16 décembre, p. 4.
Tout de même, je dois vous avertir, les amis, que le premier bonguienne qui répète ce que je vais dire, j’y passe les beignes sans plus de cérémonies. 1912, La Presse, 24 août, p. 4 (chron. humor.).
– Toryabe! Elle s’est tout de même pas envolée [la jument]. [/] La Camirand entrebâilla sa porte. – Holà! m’sieu’ l’curé. C’est encore un sale tour des bessons Savoie. J’ai tout vu. [...] – Les mécréants, fit le pasteur en levant les deux poings au ciel. Si j’les attrape, j’vas leu’ passer les beignes. 1981, J. Pellerin, Au pays de Pépé Moustache, p. 98.
Histoire
L’origine du mot beigne est incertaine, mais l’hypothèse la plus probable le fait remonter à une base celtique *bun(n)ia « souche d’arbre » ou « tronc d’arbre » (v. FEW *bunia 1, 628a; TLF, s.v. beigne). De son sens vieux de « bosse à la tête provoquée par un coup », le plus ancien attesté (XIVe s.), découle, par métonymie, celui de « coup qui va provoquer ou qui a provoqué l’enflure », toujours usuel en français (v. TLF, Robert (en ligne) 2023‑07 et DMF). Le type lexical beigne a donné le dérivé beignet, dont le type lexical est attesté dès le XIIIe s. (forme buignet) comme désignation d’une sorte de pâtisserie (v. TLF, s.v. beignet).
I1 Depuis 1743‑1744 (PotierH 32 : Crocsignole f. ou baigne : patisserie). Également attesté en français louisianais pour désigner la même pâtisserie ou des pâtisseries similaires (« fritter, doughnut, deep fried corn or wheat cake », v. DLF). Hérité de France; on trouve les formes begne et bingne n. f. au sens de « beignet »», respectivement en ancien et en moyen français (v. Godefroy, s.v. begne). Beigne est aussi à mettre en relation avec la forme dialectale bugne, de la même famille, qui désigne des pâtes variées, frites dans de l’huile, dans les parlers du Centre et de l’Est de la France ainsi qu’en franco-provençal (v. FEW *bunia 1, 628b, OnLyon et TuaillDauph; v. aussi GPSR, s.v. bounyə3; RobHist donne par erreur une forme ancienne beigne, plutôt que bugne, attestée en 1720 en Suisse). Pour la forme en anneau de cette pâtisserie, cp. beugnon ou bignon, diminutifs de bigne ou de beugne (autres variantes de beigne, v. TLF), que LarGastr définit comme une « sorte de beignet traditionnel dans le centre de la France, fait en pâte levée, façonné en petite couronne, souvent frit dans de l’huile » (s.v. beugnon). Quant à beigne « taille épaisse », cp. beugne (variante de beigne), il désigne ironiquement « la panse, le ventre » dans les parlers du Centre de la France (v. JaubCentre2). Au sens de « poils faciaux […] », depuis 2004. Au sens de « manœuvre de dérapage circulaire », depuis 1997, d’après l’anglais doughnut (aussi écrit donut), de même sens (v. OED (en ligne) 2021‑07). Beignerie, depuis 1982 (OLF-Avis1, no 667). 2Depuis 1993. Le sens de « derrière d’une personne » semble découler, par analogie, du sens précédent, mais il pourrait également procéder d’une métonymie à partir du sens d’« anneau de caoutchouc gonflable […] sur lequel on s’assoit » (v. sens 1). Se pogner le beigne est construit sur le modèle de se pogner le cul, de même sens. 3Depuis 1931. Probablement d’après l’anglais doughnut hole (v. OED (en ligne) 2021‑07). 4Depuis 1906 (FSPFC). Peut-être un héritage des parlers de France. On trouve le même sens pour des variantes régionales de beigne en franco-provençal. Ainsi bugne y a été relevé comme terme d’injure (« On dit d’un imbécile ou d’un homme sans caractère qu’il est une bugne », v. OnLyon 83; v. aussi FEW *bunia 1, 628b : bugne « personne sotte », bugni « personne sans énergie »). Par ailleurs, cet emploi découle peut-être de l’influence du mot beignet, de même sens et qui est plus ancien.
IIL’expression passer les beignes à qqn (depuis 1901) paraît se rattacher au français familier beigne « coup provoquant une bosse, une enflure », attesté depuis le XIXe s. et qui découle de beigne dans le sens, aujourd’hui vieilli, de « bosse à la tête », attesté depuis 1606 (déjà sous la forme buyne au XIVe s., puis bigne au XVe s.; v. TLF et RobHist). Cp. en outre l’expression passage à beigne « action de donner des claques », relevée dans l’argot du cirque (d’après TLF, qui cite Vie et langage, mai 1962, p. 242).