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BABOUNE [babun]
n. f.

1

(Souvent par plaisanterie). Fam.(Généralement au pluriel). Lèvres, souvent charnues, épaisses.

Avoir des grosses babounes, une paire de babounes.

SYN. babines.

 (Au sing.). Partie inférieure de la figure.

Avoir, recevoir une claque, un coup de poing, une tape sur la baboune. Se cogner la baboune. Avoir la baboune enflée.

Rem.Dans cette dernière acception, baboune peut commuter avec gueule, mais n’est pas un synonyme exact de ce mot en raison de sa connotation plaisante.

Wilbrod, est-ce vrai que tu ne peux pas te trouver d’arpenteur pour te mesurer la baboune? 1927, Le Canard, Montréal, 15 mai, p. 3.

Tapez-leur fort sur la baboune. 1931, Le Goglu, Montréal, 20 février, p. 2.

Le « Pocket Rocket » s’échappe et d’une allure vertigineuse passe la ligne bleue, monte sur une chaise et de la main droite donne un dur « slap shot » en plein sur la baboune du grand Serge Savard. 1972, La Revue de Terrebonne, 6 décembre, p. 26.

J’avais beau essayé [sic] d’y parler, mai y était toujours saoul comme une botte et en plusse de ça, un soir, y s’est battu et a mangé une vrée ramasse [= raclée]; y avait les yeux noirs comme le poêle et les babounes toutes fendues; y s’est aussi fait voler son butin [= effets personnels]. 1981, L. Proteau, Grand-mère ’Toinette m’a raconté…, p. 112.

« Il y a des virages en épingle autour de bouées, et ça crée un effet d’entonnoir, dit Tremblay. Et oui, ça joue cochon. Ça se cale, ça se donne des coups de poing sur la baboune. » 2008, Le Devoir, Montréal, 2‑3 août, p. A8.

Pour reprendre l’expression de l’entraîneur-chef Mario Bernard, le Momo Sports/Powertek [équipe de hockey] a « mangé une bonne claque sur la baboune » samedi soir en s’inclinant 9‑0 devant le Dynamik de Coaticook. 2012, La Tribune, Sherbrooke, 22 octobre, p. 37.

VieuxPersonne qui a de grosses lèvres, personne qui a l’air idiote. (BPFC 3/1, 1904, p. 19; Dionne, GPFC).

Emile R., ta baboune doit être en grève car on ne te voit plus avec. 1921, Le Samedi, Montréal, 4 juin, p. 38.

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Fam.Air de mécontentement, de contrariété, attitude maussade.

Se lever avec la baboune.

 Avoir la baboune (longue), faire la baboune (à qqn) : faire la moue (pour manifester sa déception, son mécontentement), être d’humeur maussade; bouder (qqn), être fâché (contre qqn).

2022, TLFQ, Faire la baboune [vidéo].

Avoir une face de baboune. Faire la grosse baboune, se lever avec la baboune.

– Sam, tu as bien une grosse baboune, as-tu reçu des « bavasses » [= médisances]? 1930, Le Canard, Montréal, 20 juillet, p. 7.

– Tobie : Voyons m’sieur Brie choquez-vous pas, j’voulais seulement que vous taquiner une p’tite bit [= un peu]. Envoyez-donc, m’sieur Brie, faites-donc pas la baboune! 1950, A. Brie, Le père Tobie, 17 octobre, p. 2 (radio).

« […] je pense que t’as pas crû [sic] en moi et aux immenses possibilités que je t’offrais en voulant te faire entrer dans mon organisation, et à matin non seulement tu me fais la baboune mais tu me regardes aussi comme un chien de faience [sic], moi qui suis ton sauveur » […]. 1969, V.‑L. Beaulieu, La nuitte de Malcomm Hudd, p. 101.

La Sainte Vierge n’est pas femme à faire la baboune, pourtant elle a dit se plissant le bec : « Pauvre, pauvre Québec ». 1971, La Presse, Montréal, 3 juillet, p. D10 (chron. humor.).

[Il] avait la « baboune » quand il s’est présenté au Colisée, hier matin. Il avait presque passé une nuit blanche à visionner le film du match […]. « Ce n’était pas beau à voir, a-t-il grogné. » 1980, Le Soleil, Québec, 1er février, p. C1.

La politesse prend congé le lundi, journée gris souris du retour à l’usine, à l’école, au désœuvrement. Le lundi a la gueule de bois et vous fait une baboune longue comme ça. Une aspirine pour tout le monde, c’est ma tournée. 1998, J. Blanchette, Le Devoir, Montréal, 4 novembre, p. B1.

Ce film annonçait la fin d’une autre époque dans la vie des Stones, Jagger et Richards se faisaient déjà un peu la baboune et il faudra attendre la tournée Steel Wheels huit ans plus tard pour qu’ils retrouvent la forme. 2006, La Presse, Montréal, 8 janvier, cahier Arts et spectacles, p. 3.

L’absence des sœurs Williams et de Maria Sharapova, toutes blessées, n’a pas aidé aux guichets. « Nous savons tous qu’il ne faut pas que ça arrive souvent (l’absence des vedettes), dit Eugène Lapierre. Nous pouvons faire la baboune, mais en même temps, nous devons admettre que nous avons été extrêmement malchanceux cette année. » 2010, La Voix de l’Est, Granby, 24 août, p. 25.

« J’ai envie de voir les gens utiliser leurs forces à bon escient au lieu de s’arrêter sur leurs complexes et sur ce qui n’est pas beau. Parce que c’est un choix qui nous appartient, qu’on décide de se lever avec le sourire ou qu’on se lève avec la baboune. » 2018, L’Itinéraire, 15 février, p. 22.

– Mais qu’est-ce que tu veux que je lui dise? C’est mon enseignante! – Et alors? – Ben alors, c’est elle qui a raison : c’est la prof! – Ça ne change rien, ça, Guillaume. – Oui, mais de quoi je vais lui parler? Je n’ai rien à discuter… […] Je ne veux pas… – Ce n’est pas grave, hein? – Non. – Pourquoi tu fais la baboune, alors? – Je ne fais pas la baboune. – Oui, tu fais la baboune. Tu es triste parce qu’elle ne te croit pas. Oui ou non? [/] Elle avait parfaitement raison. [/] – … Oui. 2020, G. Dulude, Je suis un chercheur d’or, p. 46.

 Fig.

Ces gens avaient simplement répondu à l’appel du nouveau Club de rire de Magog, qui tenait sa première activité publique et gratuite en cette journée mondiale de la rigolade. Des rates de partout dans le monde, dont Montréal, Gatineau et Québec, se sont dilatées en groupe hier. Même le ciel avait rangé sa baboune. 2006, L. Martin, La Tribune, Sherbrooke, 8 mai, p. 33.

Histoire

Formé de la racine onomatopéique bab- (qui a donné notamment babine « lèvre », v. FEW bab 1, 192a, et TLF, s.v. babine) et du suffixe -oune.

1Depuis 1897 (Le Canard, Montréal, 26 juin, p. 8 : Pas de doute que le Président aurait parlé encore une heure, laissant couler de ses babounes […] du style de François Coppée et de Sully Prud’homme). Relevé dans un parler du Centre de la France (baboune « lèvre », v. JaubCentre2). Le sens de « personne qui a de grosses lèvres, personne qui a l’air idiote » (depuis 1903, BPFC 2/3, p. 96 : baboun) est probablement aussi un héritage des parlers de France; cp. babiau « homme à grosses lèvres » dans le Centre de la France, bâbau « niais » ou bâbô « ignorant, qui est sans étude » en Wallonie, babouin « nigaud, jeune sot » dans le Nord-Ouest et le Centre de la France ainsi qu’en Suisse romande (v. FEW bab 1, 192a et b, RemWall2, s.v. bâbô, GPSR); relevé aussi en Ontario (v. BénMots) et en Acadie (v. CormAcad). Il ne paraît pas nécessaire d’avoir recours à l’anglais baboon (comme le fait Dionne et, dans une certaine mesure, GPFC) pour expliquer cet emploi. Au sens de « personne qui a de grosses lèvres, personne qui a l’air idiote », depuis 1904; un emploi similaire est attesté en Louisiane (v. DLF, s.v. baboune : « large stupid-looking face »). 2Depuis 1930. Également héritage de France; cp. faire les babounes « faire la moue », attesté dans le Centre de la France (v. JaubCentre2); cp. en outre baboue « moue, grimace », attesté en français des XVIe et XVIIe s., notam. dans faire la baboue (v. Godefroy, s.v. baboe, Cotgrave 1611, s.v. babou) et relevé encore parfois au XIXe s. mais présenté comme vieilli (v. Besch 1847‑1892, Larousse 1866, DG; v. aussi VerrAnj); faire la baboune « faire la moue, bouder » est aussi relevé en Acadie et en Louisiane (v. Mass no 1474 et DLF).

Dernière révision : juin 2024
Pour poursuivre votre exploration du mot baboune, consultez notre rubrique Saviez-vous que sur le site Web du Trésor de la langue française au Québec
Trésor de la langue française au Québec. (2024). Baboune. Dictionnaire historique du français québécois (2e éd. rev. et augm.; R. Vézina et C. Poirier, dir.). Université Laval. Consulté le 3 octobre 2024.
https://www.dhfq.org/article/baboune