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ATOCA [atɔkɑ] ou  ATACA [atakɑ]
n. m.

Rem.

1. Aussi prononcé [atokɑ], dans la langue soignée. 2. Variantes graphiques anciennes : attoca, atocat, attocat, atocas, atoka; attaca, atouca; (1757) otoka.

  

(Général. au pluriel). Arbuste nain à tiges rampantes (fam. des éricacées) qui pousse principalement dans les tourbières et qui produit des baies rougeâtres à saveur acidulée; ces baies.

2022, TLFQ, Atocas [photo].

Aller aux atocas. Confiture(s), gelée, marmelade aux atocas, d’atocas. Dinde, poulet aux atocas. Tarte, pouding aux atocas.

Rem.Dans la langue commerciale et dans la langue soignée, on a plus souvent recours au synonyme canneberge. Dans la langue savante, on a aussi recours au synonyme airelle. On connaît aussi des appellations régionales (voir Notice encyclopédique).

 canneberge.

Dieu nous do[n]na un petit fruict sauvage qu’on nomme icy Atoka; La jeunesse en alloit ramasser dans les prairies voisines, & quoy qu’il n’eust presque ny goust ny substance, la faim nous le faisoit trouver excellent : il est presque de la couleur & de la grosseur d’une petite cerise. 1656, The Jesuit Relations and Allied Documents, vol. 43, p. 146.

L’Atoca est un Fruit à Pepins, de la grosseur des Cerises. La Plante, qui est rampante dans les Marais, produit son Fruit dans l’Eau. Ce Fruit est âcre, & on en fait des Confitures. 1744, Fr. X. de Charlevoix, Histoire et description générale de la Nouvelle France, t. 3, p. 163.

– Vous sauriez? s’écria Robin qui devint rouge comme un atocas. – Oui, je sais que vous aimez une belle jeune fille, tyrannisée par ses parents et que vous êtes en train de faire un voyage de deux mille lieues pour l’enlever. 1861 (1889), H.‑É. Chevalier, La Huronne, p. 277.

Les arbrisseaux, dans les environs, étaient si courts, qu’un homme debout les dominait de toute la tête. Nous nous traînions à plat ventre pour aller faire, dans le voisinage, une cueillette d’atacas, de pembinas, et de racines sauvages. 1887, J.‑B. Proulx, L’enfant perdu et retrouvé, ou Pierre Cholet, p. 52‑53.

L’atocas moderne est plus gros, plus juteux et plus savoureux que la baie connue des Indiens. L’atocas cultivé produit un fruit plus doux, plus luisant et de couleur plus brillante que l’atocas sauvage. 1956, La Tribune, Sherbrooke, 7 novembre, p. 9.

Le premier fruitage, c’est les fraises, les fraises sauvages. […] [Q. : Vous avez des bleuets, probablement?] Ah, les bleuets, puis on avait les atocas. On avait les pimbinas, les « graines rouges », qu’on appelle. 1959, Moisie (Sept-Rivières), AFEUL, G. Landry 28 (âge de l’informateur : 78 ans).

De toutes façons, vous étiez bien contents tous de venir vous empiffrer chez-moi [sic] pour le réveillon de Noël, de venir vous gaver de tourtières, d’atocas, de dindes et d’oies arrosées de sauces au vin, de tartes à la ferlouche, tout cela mijoté pour vous par ma femme [...]. 1970, P. Châtillon, Le journal d’automne de Placide Mortel, p. 82.

Farcie ou pas, avec ou sans atocas, la traditionnelle dinde sera au rendez-vous encore cette année. Une fois de plus, l’énorme volaille jouira d’une place de choix sur la table de plusieurs foyers du Saguenay–Lac-Saint-Jean à Noël. 2005, Le Quotidien, Saguenay, 17 décembre, p. 4.

Celles‑ci [les canneberges séchées] ne contiennent que 2 g de sucre par portion de 40 g et présentent un apport élevé en fibres. La texture moelleuse et la saveur acidulée de l’atoca en font la collation parfaite ou le petit plus recherché, à ajouter à ses recettes de muffins et à ses salades fraîches d’été. 2020, Métro, Montréal, 26 mars, p. 7 (art de vivre).

Elle [une chef cuisinière abénakise] n’hésite pas non plus à mentionner les combinaisons de viandes et de fruits dans une même assiette, comme la fameuse dinde aux atocas, qui était traditionnellement mangée lors du vrai été des Indiens. « Le vrai été des Indiens, c’est le redoux avant que l’hiver commence. Il faut qu’il y ait eu la première neige. C’était le moment de troc crucial où on pouvait échanger nos récoltes. 2020, La Tribune (site Web), Sherbrooke, 21 août.

 (Dérivé). RareAtocatier n. m. Arbuste nain qui produit des atocas.

Rem.Variante graphique ancienne : attocatier.

On rencontre fréquemment l’ours noir entre les mois de juin et d’octobre, rôdant seul ou en compagnie sur les rivages ou les déclivités des hauts plateaux, pacageant à travers les amelanchiers, les busseroles, les myrtiles, les attocatiers et autres arbustes à baies, dont il est friand. 1890, Le Monde illustré, Montréal, 5 avril, p. 389.

NOTICE ENCYCLOPÉDIQUE

1. Sous le nom de atoca, on désigne deux variétés d’éricacées du genre Vaccinium dont les noms scientifiques sont airelle canneberge et airelle à gros fruit. L’airelle canneberge (Vaccinium oxycoccos) est répandue dans le nord de l’Amérique, de l’Europe et de l’Asie alors que l’airelle à gros fruit (Vaccinium macrocarpon) est particulière à l’Amérique du Nord, où elle fait l’objet d’une culture commerciale. La coutume de servir des atocas en accompagnement de la dinde à l’occasion de l’Action de grâces et de la période des fêtes est originaire des États-Unis, mais déjà à l’époque de la Nouvelle-France on appréciait ces fruits en confiture ou en gelée.

2. Dans certaines régions du Canada français, l’airelle canneberge et l’airelle à gros fruit portent des noms distincts : dans Charlevoix et au Saguenay–Lac-Saint-Jean, la première variété est connue sous le nom de atoca de cran et la seconde sous celui de atoca de savane; en Acadie, on les appelle respectivement mocauque et pomme de pré.

Histoire

Depuis 1656. D’origine iroquoienne, plus précisément huronne-wendat. On relève dans la langue huronne-wendat les formes atoxa et toxa « petit fruit rouge » (où x rend une prononciation [kh], v. PotHuron 285; v. également ChambInd‑1, p. 221 et DictWend, s.v. ato’kha’). La variante toxa est attestée déjà en 1632 chez le père Sagard, sous l’orthographe toca, mais comme mot de la langue huronne : « Il y a aussi d’autres graines rouges, nommees [par les Hurons] Toca ressemblans à nos Cornioles; mais elles n’ont ny noyaux ny pepins, les Hurons les mangent crües & en mettent aussi dans leurs petits pains. » (Le grand voyage du pays des Hurons, p. 328); c’est donc à tort que cette attestation a été considérée comme étant la première du mot atoca dans l’histoire du français (v. p. ex. OLF‑Can et Robert 1985); cp. par ailleurs tokware « atoca, canneberge, airelle coussinette » dans une langue iroquoise (v. CuoqIroq 50). Atoca a été relevé dans les parlers franco-américains de la Nouvelle-Angleterre et du Missouri (v. p. ex. LockeBr 189 et McDermMiss, s.v. ataca et otoka). Il a pénétré en outre en anglais canadien, où il est cependant désuet de nos jours (v. DictCan). Longtemps seul nom courant de la canneberge au Québec, atoca a commencé à subir la concurrence de canneberge, d’abord faiblement, à partir de la seconde moitié du XIXe siècle, notamment dans la langue commerciale et dans l’usage soigné. L’inclusion de atoca dans la liste des « canadianismes de bon aloi » publiée par l’Office de la langue française en 1969 (v. OLF‑Can) et son entrée dans des dictionnaires, dont Le Petit Larousse en 1975, n’ont pas suffi à renverser une tendance déjà bien engagée, et canneberge s’est peu à peu imposé dans la langue courante au cours du XXe siècle. Atocatier, depuis 1876 (É. Petitot, Vocabulaire français-esquimau, p. 6. Le mot est relevé dans Clapin 345 et PoirAlg 342.

Dernière révision : janvier 2023
Pour poursuivre votre exploration du mot atoca, visionnez notre capsule vidéo Dis-moi pas!? sur le site Web du Trésor de la langue française au Québec
Trésor de la langue française au Québec. (2023). Atoca ou ataca. Dictionnaire historique du français québécois (2e éd. rev. et augm.; R. Vézina et C. Poirier, dir.). Université Laval. Consulté le 3 octobre 2024.
https://www.dhfq.org/article/atoca-ou-ataca