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ARMOIRE [aʀmwɑʀ]
n. f.

Rem.

1. Parfois signalé comme masculin (voir Histoire). 2. Variante graphique : (jusqu’au XIXe s.) ormoire (voir Histoire).

1

Espace de rangement ménagé dans l’épaisseur ou le renfoncement d’un mur, fermé par une porte et comportant général. des tablettes; assemblage de menuiserie fixé au mur et destiné au même usage.

2023, TLFQ, Armoires de cuisine [photo].

Armoires de cuisine, de salle de bain. Armoires en bois, en mélamine. Les portes, les tablettes d’une armoire.

Rem.En France, armoire désigne un meuble de rangement fermé par des battants; cet emploi est également connu au Québec.

[...] deux petites armoires au-desous des fenetres garnie de pentures à gons ouvrant à deux paneaux et chacune deux terjette et de deux petites poignées [...]. 1725, Québec, BAnQQ, gr. J.-É. Dubreuil, 23 août, p. [1].

Dans toutes les ormoires poser des tablettes sur des echelles et dans les garderobes poser des tringles et accrochoirs de cuivre jaune. 1852, Québec, BAnQQ, gr. J. Petitclerc, p. [7].

Abel refit les mêmes gestes que sa mère, traînant un peu les pieds à sa façon, allant du frigidaire à la table et de la table aux armoires. 1974, V.-L. Beaulieu, Don Quichotte de la démanche, p. 52.

– Honoré : Heu... étiez-vous partie à donner un coup d’pinceau aux armoires, Marianna? – Marianna : Ben oui, mon grand ménage était pas feni que j’me sus dit qu’y faudrait ben rajeunir les armoires. 1981, M. Laberge, C’était avant la guerre à l’Anse à Gilles, p. 57 et 59.

Il revint dans la cuisine, ouvrit quelques portes d’armoires, puis celle d’un placard et laissa échapper un « Ah! » de satisfaction. 1989, Y. Beauchemin, Juliette Pomerleau, p. 498.

Petit réduit général. aménagé sous l’escalier menant à l’étage, dans lequel on range des vêtements, des chaussures, du bois de chauffage, etc., et qui se ferme par une porte.

 caveau (sens 2).

 Armoire à balais, réservée au rangement de balais ou autres objets servant au ménage.

Compartiment d’un buffet fermé par un vantail (par oppos. à la partie comprenant les tiroirs).

Serrer qqch. dans l’armoire du buffet.

2

Vieilli Buffet; vaisselier.

Armoire à vaisselle, à argenterie. Armoire vitrée.

[...] dans laquelle cuisine est aussy une armoire ou bufet ferment a deux paneaux garnie de petite penture deux tarjet et une ferure et un crojet en dedans et un dressoir au dessus de lad[i]te armoire ou bufet [...]. 1725, Québec, BAnQQ, gr. J.-É. Dubreuil, 23 août, p. [2].

Les armoires qui sont indiqués sur le plan seront garnis de tablettes, et auront des portes semblables à celles des chambres. Dans la cuisine il y aura une armoire à vaisselle (dresser). 1849, Québec, BAnQQ, gr. Ch.-M. Defoy, 21 juin, p. [12].

Cette chambre sert à la fois de cuisine, de salle à manger, de lieu de travail et de réunion. [...] Le mobilier en est fort simple. [...] La grande armoire jaune dans le coin sud-ouest, c’est le buffet où l’on serre la vaisselle et les ustensiles de cuisine. 1898, L. Gérin, « L’habitant de Saint-Justin », dans Msrc 4/1, p. 184.

Un ameublement de salle à manger [...] 9 morceaux : buffet, armoire à argenterie avec panneaux en bois sculpté appliqués sur la vitre, une table à rallonge, un fauteuil et cinq chaises de côté. 1920, Le Devoir, Montréal, 21 juin, p. 8 (annonce).

Vieilli Meuble servant de garde-manger.

Armoire à manger. Armoire à mets, à viande, à sucre.

 Petit meuble dans lequel on conserve les bouteilles d’alcool.

Armoire à boisson(s).

3

Armoire de coin ou armoire en, à coin : meuble traditionnel à un ou deux corps, conçu de manière à occuper l’angle d’une pièce.

Rem.Ce meuble est aussi appelé encoignure dans la langue soignée ou technique.

 Assemblage de menuiserie de même forme, fixé au mur, qui complète l’aménagement d’une cuisine (voir sens 1).

Une armoire a coin de bois de pin fermant a clef [...]. 1791, Québec, BAnQQ, gr. J.-N. Pinguet, 20 décembre, p. [6].

[...] faire une armoire de coint clouée après le mur [...]. 1817, Québec, BAnQQ, gr. Ch. Dugal, 23 septembre, p. [2].

Et plus je m’avance en terrain connu, plus je recule vers un champ miné où les objets jouent à n’avoir jamais bougé, le même miroir [...] trône au-dessus de cette patère de chrome [...] à côté de la vieille horloge coucou [...] près de l’armoire en coin dans laquelle je ne pourrai plus jamais me faufiler... 1993, M. Proulx, Homme invisible à la fenêtre, p. 121.

NOTICE ENCYCLOPÉDIQUE

Au Canada français, l’armoire de coin est apparue dans la seconde moitié du XVIIIe s. et fut par la suite adoptée autant dans les intérieurs bourgeois que paysans. Construites en même temps que la maison, les premières armoires de coin s’appuyaient directement sur les murs qui en constituaient le fond. La base du meuble sert généralement de buffet alors que la partie supérieure, le plus souvent vitrée, permet d’exposer les belles pièces de vaisselle. 

Sources : J. Palardy, Les meubles anciens du Canada français, 1963, p. 165 et suiv.; M. Lessard et H. Marquis, Encyclopédie des antiquités du Québec, 1971, p. 163-168.

4

Vieux Armoire montante : monte-plats.

Rem.Parfois écrit avec trait d’union.

[...] faire deux armoires montantes complettes de la cuisine aux salles à manger au-dessus [...]. 1846, Québec, BAnQQ, gr. J. Petitclerc, 4 février, p. [4].

Armoires-montantes à main et à pouvoir électrique, monte-charges de tous genres, ascenseurs modernes pour tous les besoins. 1926, dans Le Canada français, vol. 13, no 6, p. J (annonce à la fin du cahier).

Histoire

La variante ormoire (d’abord au sens de « meuble » puis au sens d’« espace de rangement ») a été relevée au Québec de 1644 (Marie de l’Incarnation) jusqu’au XIXe s.; cette variante, attestée déjà chez Estienne 1538, était répandue dans la région parisienne du XVIIe au XIXe s. et s’est maintenue dans de nombreux parlers régionaux (v. FEW armarium 25, 258-259; pour les diverses hypothèses qui expliqueraient cette variante, v. ibid. 263b, et JunPron 53-54). Le mot a été d’abord de genre masculin, puis a passé peu à peu au féminin, genre qui s’est imposé vers 1600; le masculin s’est toutefois conservé dans plusieurs parlers régionaux (v. FEW id., 262a; v. aussi 256b et 265a, n. 30).

1Depuis 1725. Survivance d’un sens ancien attesté déjà au XIVe et au XVe s. pour les formes plus anciennes dérivées du latin armarium, et à partir du XVe s. pour la forme armoire. Le mot dans ce sens est sorti de l’usage en France au XXe s., ayant été supplanté par placard, attesté depuis 1792. Il s’est toutefois maintenu dans de nombreux parlers régionaux (v. Havard 1, p. 150-151, RobHist et FEW id., 254a). Armoire « compartiment d’un buffet » (depuis 1825, Québec, BAnQQ, gr. A.-A. Parent, 3 décembre : un side board avec deux petites armoires en dedans) est un héritage des parlers de France. Voir Havard qui avait relevé cet emploi « sur des territoires fort différents (en Provence, dans le Comtat, en Anjou, dans l’Angoumois et la Bretagne) » du XVe au XVIIe s. mais qui signalait que, depuis cette époque, il n’avait plus rencontré le mot « pris dans ce sens singulièrement restrictif » (t. 1, p. 164); les données du FEW confirment qu’il s’agit d’un emploi régional qui serait cependant encore connu de quelques parlers (ibid. 254b). 2Depuis 1725. En France, armoire fut à une certaine époque un terme général pour désigner des meubles affectés à diverses fonctions dans la vie domestique. Ses emplois se sont restreints par la suite et le mot n’a plus été utilisé qu’en parlant du rangement du linge de maison et des vêtements, perdant ainsi ses autres emplois au profit d’appellations plus spécifiques (buffet, vaisselier, etc.) (v. FEW id., 263-264; Havard 1, p. 150). FEW date l’introduction du sens de « vaisselier » dans le vocabulaire du mobilier français vers 1400 (id., 264a); Richelet 1680 et Fur 1727 consacrent une entrée distincte à armoire à vaisselle. RobHist signale que le mot armoire « est parfois mal distingué de bahut et de buffet et l’on a dit bas d’armoire et armoire basse pour ‘buffet bas’ » (v. aussi Havard 1, p. 160-161); Fur 1690-1727 définit d’ailleurs armoire par « meuble de bois fait en forme de buffet [...] ». Ces sens de « buffet » ou de « vaisselier » continueront d’être bien attestés dans les parlers régionaux en France (v. FEW id., 255-259). Le sens de « garde-manger » (depuis 1835) serait apparu en France dès le XIIIe s.; sorti de l’usage général, cet emploi s’est conservé dans certains dialectes (ibid. 259 et 264a, v. aussi RobHist). Cp. dans le même sens armoire à viandes (Monet 1636). 3Depuis 1791. Armoire de coin n’est pas inconnu en français de France (v. PRobert 1993 et TLF), mais son emploi semble y être moins courant qu’au Québec. 4Depuis 1846.

Version du DHFQ 1998
Trésor de la langue française au Québec. (1998). Armoire. Dictionnaire historique du français québécois (2e éd. rev. et augm.; R. Vézina et C. Poirier, dir.). Université Laval. Consulté le 9 décembre 2024.
https://www.dhfq.org/article/armoire