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ADON [adɔ̃]
n. m.

I
1

Fam.Coïncidence, hasard général. heureux, chance.

2022, A. Galarneau, Adon [illustration], TLFQ.

C’est tout un adon!

 loc. adv. Par adon : par hasard, par chance.

– Monsieur Asselin, [...] je suis prêt à vous aider de mes conseils et de mes services [...]. Tenez!... je n’y vais pas par quatre chemins, croyez-vous aux cartes? – Dame! il y a de drôles d’adons parfois. 1877, P. LeMay, Le pèlerin de Sainte Anne, t. 1, p. 282.

– [...] j’ai vu un chapelet accroché au-dessus de son lit. – Quand cela?... Tu es donc dans son intimité? – [...] Dieu merci, je me respecte, et c’est par pur adon que j’ai vu ce chapelet [...]. 1890, V.‑E. Dick, L’enfant mystérieux, t. 1, p. 190‑191.

Q. : Était-ce par adon que vous passiez devant la maison de Cloutier? R. : Je m’en allais à mon ouvrage. 1895, région de la Beauce, BAnQQ, Cour d’appel (Québec), cause no 6, factum des appelants, p. 48.

Fridolin : [...] imprudemment, sans savoir si réellement vous vouliez prendre des leçons de moi, j’ai donné votre nom comme une de mes élèves. Maubourg : Ça c’est curieux. Hier encore, je me disais : « Ah, si je pouvais étudier le théâtre avec Fridolin... quelle carrière je ferais... » Fridolin : Ah bien, ça c’est une bonne! C’est un vrai adon. 1938, Gr. Gélinas, Le train de plaisir, 5 octobre, p. 7 (radio).

Ça fait que finalement, toujours, le lendemain, encore un bel adon : il tue encore une perdrix puis un canard. 1956, Jonquière (Saguenay), AFEUL, C. Laforte 476 (âge de l'informateur : 60 ans).

[...] si Benoît venait la voir plus souvent, c’était par adon, sans raison particulière, sans doute parce qu’il lui était plus facile de venir que les autres. 1971, J. Ferron, Les roses sauvages, p. 140.

J’ai sauvé la vie de mon premier chien. […] Je m’accrochais à Bamako et je lui disais : sauve-moi. Il me léchait. Il me léchait plus que d’habitude. Il comprenait. Les chiens, ça comprend. […] Quand les humains te lèchent, c’est qu’ils veulent quelque chose de toi. Lui, Bamako, voulait juste me lécher pour me faire du bien. Peut-être que c’était un adon, comme disent les vieux Canadiens français. J’ai jamais entendu un jeune dire ce mot-là. Un adon. Il y a le mot don dans adon. 2005, A. Farhoud, Le fou d’Omar, p. 39.

Mais on ne peut s’empêcher de lui attribuer [à un ministre] une connotation électoraliste dans la mesure où cette contribution d’Ottawa était attendue depuis longtemps et que le tout survient moins de quatre mois avant le jour du vote. Comme dirait l’autre, un drôle d’adon! 2015, M. Rochette, Le Nouvelliste, Trois-Rivières, 30 juin, p. 14.

On a vu plus tôt que cette équivalence n’est pas complète : il ne suffit pas, pour vérifier « tout B est A », qu’aucune exception ne vienne maintenant l’informer; il faut qu’il n’y en ait jamais eu; il faut même qu’il ne puisse y en avoir, si l’énoncé universel est plus qu’une simple constatation d’adon, de coïncidence factuelle, accidentelle, du sujet et de l’attribut : il n’existe aucun brontosaure qui ne soit dinosaure; il n’y en a jamais eu non plus et il n’a jamais pu y en avoir. 2019, Y. Pelletier, Le traité « De l’interprétation » d’Aristote et son commentaire thomiste, Société d’études aristotélico-thomistes, p. 67.

2

Vieilliou région.(notam. Charlevoix et Saguenay–Lac-Saint-Jean). Qualité, caractère de ce qui tombe à propos, est opportun, convient bien à sa destination, de ce qui a du bon sens.

Avoir de l’adon.

 allure.

 loc. adj. (En parlant de qqch.). D’adon : approprié, opportun, convenable, sensé.

Être d’adon, pas d’adon, guère d’adon.

Un temps, une température d’adon, favorable.

Vous connaissez les locutions à la brunante, un clair d’étoiles [...]. Cela sonne-t-il à vos oreilles comme de l’iroquois? cela n’est-il pas plutôt d’excellent français? et dans un récit, cela n’aurait-il pas de l’adon? 1914, A. Rivard, Études sur les parlers de France au Canada, p. 84.

Si ça parlait ben, ce prêtre-là, c’est pas assez de le dire! [...] puis tout ce qu’il disait, ç’avait toujours de l’adon sans bon sens. 1919, Cap-Saint-Ignace (Montmagny), The Journal of American Folklore, vol. 33, no 129, 1920, p. 284.

Après sa mort, sa femme voulait me garder pour tenir la terre parce qu’elle restait avec des jeunes enfants, mais je trouvais que c’était point guère d’adon et j’ai parti. 1935, Saint-Gédéon (Lac-Saint-Jean-Est), V. Tremblay, Mémoires de vieillards, no 95, p. 8.

Or, un gros bonhomme m’est venu de ce pays dormant, avec tous ses garçons. Je lui ai fait voir des lots. Il a partout levé le nez. Aucun n’était de son goût, d’adon, comme il m’a dit. 1943, F.‑A. Savard, L’abatis, p. 109.

– Fulgence : Une minute... quand on fait un bis [= travail en commun, volontaire et gratuit], on mange hé? – Nazaire : Ça serait ben d’adon, justement, moi j’ai pas soupé... 1947, O. Légaré, Nazaire et Barnabé, 13 juin, p. 9 (radio).

[...] On donne le nom du petit garçon de Julanino, puis de la petite fille de Julanina. Ah! c’est d’adon, pour des jumeaux! 1965, Lac‑Bouchette (Le Domaine‑du‑Roy), AFEUL, C. Laforte 1081 (âge de l'informateur : 59 ans).

Je vous conseille à vous et votre petite vie plate une sortie ultra excitante d’adon avec la température : la cabane à sucre! 2012, La Gatineau, Maniwaki, 15 mars, p. 35.

Ils s’érigent dans les entrées dès que le givre tisse sa toile dans les fenêtres. Ils ne gagneront pas de concours de beauté, mais ils sont bien d’adon une fois la neige tombée. Les abris d’auto et de porte sont autorisés dans tous les quartiers depuis lundi. 2018, Infodimanche, Rivière-du-Loup, 17 octobre, p. 18.

Les glaces s’éternisent sur le lac Saint-Jean, les chars passent vite sur la 169, le vent de décembre est pas d’adon, impitoyable, tu mettrais pas un chien dehors. 2018, K. Lambert, Querelle de Roberval, p. 17.

3

Vieilliou région.(notam. Charlevoix et Saguenay–Lac-Saint-Jean). Manière convenable ou agréable de paraître, de se tenir, de se comporter.

Avoir de l’adon.

 loc. adj. D’adon : qui s’entend facilement avec autrui, qui est d’un abord facile, d’un commerce agréable; qui est aimable, serviable.

Être b(i)en d’adon, pas d’adon, mal d’adon.

SYN. avenant, accommodant.

 Par MÉTON. 

Une figure d’adon.

 adonnant, adonnante

Un jour, la blonde de Joseph vint se promener à Saint-Alexis. Joseph l’amena chez nous pour nous la présenter. Je dois vous dire qu’elle était pas déplaisante à voir; elle avait une belle façon et une figure passablement d’adon. Ernestine et moi, nous lui fîmes une belle réception afin qu’elle pût trouver la maison de son goût. 1925, D. Potvin, La Baie, p. 59 (aussi cité dans Verreault et Simard, La langue de Charlevoix et du Saguenay–Lac-Saint-Jean, 2020, p. 59).

Maxime, regarde-moi donc ton oncle, comme il a de l’adon sur l’estrade; pauvre Romuald, c’est lui qui est président... 1939, A. Rousseau, Les amours de Ti‑Jos et les mémoires de Max Potvin, 9 mai, p. 20 (radio).

J’ai si bien connu votre père. Il était bien d’adon. Il nous a rendu tant de services. 1950, Fr. Gaudet‑Smet, Racines, p. 20.

– Ce n’est pas tout, mon Alexina, les jeunes d’aujourd’hui, ça a ni adon ni bon sens... – Quoi? – Imagine-toi qu’hier [...] c’était mixté de garçons et de filles derrière le clocher... 1974, B. Lacroix, Les cloches, p. 36.

Y a pas à dire, y est pas piqué des vers, c’joual-là, dit Piton Carignan, dans un transport patriotique. À vrai dire, Souris [le cheval] ne manquait pas d’adon. Il avait une portance de cérémonie qui n’aurait pas fait honte à un grand seigneur. 1981, J. Pellerin, Au pays de Pépé Moustache, p. 82.

Une dame charmante qui ne s’en laissait pas imposer, qui avait du caractère mais qui aimait bien s’amuser dans les nombreuses soirées festives ou de l’Âge d’Or auxquelles elle aimait participer accompagnée de son compagnon de cœur Charles-Henri Pelletier. Un couple d’adon comme disaient leurs ami(e)s. 2012, Le Chamberland : Journal des descendants de Noël Chamberland et Marie-Alice Richard, Lévis, printemps, p. 6.

« Ben kin, d’apparence que ça ressemble à ça! Si tu connais des gens qui ont autant de bon goût que toi en matière de divertissement, rends-leur donc service pis swing c’te message-là de leur bord, ils vont te trouver ben d’adon! Au plaisir Batinse! » 2017, L’Étincelle, Windsor, 24 mai, p. 20.

VieilliÊtre d’adon avec qqn : être d’accord avec qqn. Être d’adon avec, pour qqch. : donner son assentiment, son aval à qqch., reconnaître qqch. comme acceptable.

– Mam’zelle Marie-Ange, vous seriez-t-y d’adon pour que j’vienne vous laisser le bonjour, les bons soèrs? Pis, t’êt’ ben vous faire un p’tit brin de cour itou? [/] Marie‑Ange, éblouie par la générosité de ce nouveau cavalier, acquiesçait en minaudant. 1945, M. Grandbois, Maria de l’Hospice, p. 139.

DisparuDon fortuit, notam. d’alcool, fait avec libéralité.

Ah! Oui! je vais en recevoir un savon! j’en serai quitte à bon marché, s’il ne me retranche pas mon eau-de-vie pendant un mois… A trois coups par jour, ajouta José en branlant la tête, çà [sic] fait toujours ben quatre-vingt-dix bons coups de retranchés, sans compter les adons (casualités, politesses)! mais c’est égal : je n’aurai pas volé ma punition. 1863, P. Aubert de Gaspé, Les anciens Canadiens, p. 37.

Eh bien! la soupe et le pain noir des camps valent-ils les croquecignoles du capitaine d’Haberville et les adons de mon oncle Raoul? 1894, P. Aubert de Gaspé, Les anciens Canadiens, p. 7.

II

VieilliAptitude naturelle ou acquise (pour faire qqch.), don (de faire qqch.), habileté (dans qqch.).

Avoir de l’adon pour le dessin, pour les études. Avoir un adon pour la charpenterie. Avoir de l’adon dans les affaires, pour faire des affaires.

Il a un adon dans ses doigts, c.‑à‑d. […] il est très habile de ses mains. 1894, S. Clapin, Dictionnaire canadien-français, p. 7.

– La Tildé pour une chanson, cria la compagnie, fidèle à la formule traditionnelle. – En v’la-t-anne qu’a d’l’adon pour quiouner [« chanter »], dit Pit, admirativement. [/] Et de fait Tildé savait quiouner, savait mettre dans ses chants toute la passion de la poésie rustique, [...] tout l’art des gestes obligés. 1921, J. Tremblay, Trouées dans les novales, p. 160.

(Francine Grimaldi – CBF Bonjour); « un vrai beau petit spectacle tout simple, tout net, tout frais, tout drôle et tout chaleureux (…) interprété par son auteur avec beaucoup d’adon et de finesse (…) un véritable tour de force ». 1981, Ma p’tite vache a mal aux pattes, Théâtre d’aujourd’hui, Montréal, BAnQ, p. [3] (feuillet promotionnel).

Histoire

Déverbal de adonner.

I1Depuis 1877. Héritage des parlers de France; relevé dans le Nord-Ouest et l’Ouest (v. FEW *addōnare 24, 137a; FleurNorm 109, s.v. adoun; DudPerch et MussSaint); cp. en outre à l’adon « par hasard » dans les parlers du Nord et de l’Ouest (v. DebrPic 15 et MussSaint p. ex.).  2Depuis 1914 (déjà vers 1902 dans la loc. adj. d’adon, v. LavSpfc 19).  3Depuis 1905 (FSPFC). Le sens de « don fortuit fait avec libéralité » (depuis 1863), qui n’est relevé que sous la plume de P. Aubert de Gaspé, est à rattacher à l’emploi d’adon « don » ayant eu cours en ancien et en moyen français (v. FEW donum 3, 138b et DMF, s.v. adon). 

IIDepuis 1894. Sans doute originaire de France; cp. [ãdɔ̃] « dextérité, savoir-faire » en dauphinois (v. DevDauph 17). Considéré comme appartenant à la famille de adonner (cp. du reste s’adonner à tout « être très adroit » en normand, v. MaizNorm), cet emploi pourrait également être rattaché à la famille de don, avec laquelle il présente des similitudes de sens évidentes; en outre, du point de vue formel, cp. adon « don, présent » en ancien français (v. FEW donum 3, 138b).

Dernière révision : septembre 2021
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Trésor de la langue française au Québec. (2021). Adon. Dictionnaire historique du français québécois (2e éd. rev. et augm.; R. Vézina et C. Poirier, dir.). Université Laval. Consulté le 18 avril 2024.
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